Révolution copernicienne
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On désigne sous l'expression révolution copernicienne la transformation des méthodes scientifiques et des idées philosophiques qui a accompagné le changement de représentation de l'univers du XVIe au XVIIIe siècle, faisant passer les représentations sociales accompagnant les représentations mentales de l'univers, d'un modèle géocentrique, selon Ptolémée (IIe siècle, déjà adopté au IVe siècle av. J.-C. par la plupart des Grecs), au modèle héliocentrique défendu par Nicolas Copernic, perfectionné par Johannes Kepler, Galilée, et Isaac Newton.
La révolution copernicienne, au sens propre, consistait à expliquer le monde, et les objets qui le composent, par la gravitation, appelée loi universelle de la gravitation en raison de son caractère considéré comme général à l'époque.
[modifier] Situation antérieure à la Révolution copernicienne
Pour la représentation du monde antérieure au XIIe siècle en Occident, consulter :
Entre le XIIe et le XVe siècles, la représentation du monde qui se met en place en occident est une représentation géocentrée, dont les fondements sont les suivants :
- Parménide, Platon, et Aristote avaient conscience que la Terre était sphérique
- Eratosthène, estimation du rayon terrestre,
- Ptolémée, géographe grec,
- Al-Farghani, astronome arabe,
- Récits des missionnaires franciscains en Asie,
- Récits des missions des franciscains et dominicains en extrême orient,
- Devisement du monde de Marco Polo.
Seul Aristarque de Samos suggéra que la Terre tournait autour du Soleil.
Après les grandes invasions, l'occident revint à une représentation de la Terre plate. Il fallut attendre les croisades et les échanges avec la civilisation arabo-musulmane pour que l'on prenne conscience que la Terre était sphérique. Cependant, au XIIIe siècle, seules les tranches les plus cultivées de la population en occident commençaient à prendre conscience de la forme sphérique de la Terre. En effet Albert le Grand et Roger Bacon avaient introduit cette connaissance dans les universités.
Après la guerre de Cent Ans, les personnes les moins instruites dans la société occidentale n'avaient donc pas encore conscience des possibilités théoriques de "circumnavigation" qu'entraînaient la forme sphérique de la Terre. Cette information se diffusa progressivement, par des ouvrages tels que le Livre des merveilles du monde de Jean de Mandeville (à ne pas confondre avec le devisement du monde de Marco Polo). Jean de Mandeville était un explorateur originaire de Liège. Il fut qualifié quelquefois d'imposteur ou d'affabulateur de génie. Toujours est-il que, après un voyage de 34 ans en extrême orient (1322-1356), ce qui était considérable pour l'époque, il compila les informations de son voyage et de ceux de missionnaires franciscains et dominicains. Le livre des merveilles du monde, manuscrit rédigé en trois versions, puis traduit en 250 exemplaires dans une dizaine de langues vernaculaires, dut avoir un retentissement important dans la société. On est à peu près sûr qu'il influença le jeune Christophe Colomb (circumnavigation...).
D'autres ouvrages présentaient une représentation cosmographique géocentrée, tels que l'Imago mundi de Pierre d'Ailly. L'Imago mundi fut rédigé en 1410, et imprimé pour la premlère fois en 1478). Christophe Colomb en avait un exemplaire.
Les grandes découvertes, et principalement les voyages de Vasco de Gama, de Christophe Colomb vers l'ouest, et de Magellan, la découverte consécutive de nouvelles terres situées entre l'Europe et l'Asie ainsi qu'une meilleure connaissance par les Européens des territoires de l'extrême orient, eurent un grand retentissement en Europe, qui fit prendre conscience de la rotondité de la Terre à toutes les tranches de la population.
Il est nécessaire également d'avoir en tête qu'aux XIVe et XVe siècles, on ne faisait pas de grosse différence entre l'astrologie, l'astronomie, la géographie, la cosmologie, la cosmographie, etc.
La prise de conscience collective équivalente sur les mouvements respectifs de la Terre et du Soleil (héliocentrisme) n'aura lieu que plus tard.
Il est nécessaire de bien distinguer ces deux représentations : forme sphérique (géocentrisme) / héliocentrisme, même si d'un point de vue chronologique et sociologique, il y eut des recouvrements entre les deux représentations cosmologiques.
[modifier] Chronologie de la Révolution copernicienne
- Aristarque de Samos (310–230 av. J.-C.), postérieur à Aristote, est le premier savant dans la Grèce antique à proposer un modèle héliocentrique. Sa théorie est très mal acceptée à cette époque.
- Nicolas de Cues est l'un des premiers astronomes à proposer une représentation qui se rapproche de l'héliocentrisme.
- Regiomontanus s'intéresse aux théories de Nicolas de Cues, mais adopte finalement la théorie du géocentrisme,
- 1512 : Nicolas Copernic rédige un court traité De Hypothesibus Motuum Coelestium a se Contitutis Commentariolus, qu'il termine vers 1515, mais qui ne sera pas publié de son vivant. Dans cet ouvrage, qu'il dédie au pape, Copernic estime que la Terre décrit une trajectoire circulaire autour du Soleil. Une phrase illustre bien l'ampleur de la faille (que Freud décrira selon l'expression brisures du complexe narcissique) que l'ouvrage introduit dans la représentation géocentrique de l'univers : « Tous les mouvements apparents que l’on constate au firmament sont dus aux mouvements de la Terre et non du firmament ».
- 1530-1543 : Nicolas Copernic écrit un second traité, De Revolutionibus Orbium Coelestium (Des révolutions des sphères célestes), achevé vers 1530. Cette œuvre ne sera publiée, par un imprimeur luthérien de Nuremberg, que le 24 mai 1543, peu de temps avant la mort de Copernic.
- 1580-1600 : la doctrine de l'équivalence des hypothèses est discutée ; elle visait à concilier les conceptions ptoléméenne (géocentrisme) et copernicienne (héliocentrisme) du monde.
- 1600 : Giordano Bruno est condamné au bûcher plus sur ses positions théologiques jugées hérétiques et ses attaques répétées contre le dogmatisme, que parce qu'il s'était basé sur Copernic pour développer son système philosophique d'un univers infini peuplé de mondes identiques
- 1604 : quand surgit la supernovae SN 1604 dans la Voie Lactée, la « nouvelle étoile » achève de jeter le trouble dans les esprits à propos du dogme de l'immuabilité du ciel. D'autant que les mesures expérimentales faites sur « la nouvelle étoile » amènent nombre d'astronomes (dont Kepler et Galilée) à rejeter de plus en plus ouvertement l'ancien système des étoiles fixes.
- 1608 : Invention de la lunette d'approche, en Hollande vers 1608 (grossissement 3 fois) ; l'attribution de cette invention est difficile à établir, car plusieurs personnes cherchèrent à en obtenir le brevet : l’opticien hollandais Hans Lippershey, Jacques Metius, Sacharias Janssen...
- 1609 : Galilée perfectionne la lunette d'approche (grossissement 6 fois), il est le premier à l'utiliser comme lunette astronomique pour l'observation d'objets célestes ; il observe des montagnes sur la Lune, les satellites de Jupiter, les taches solaires,...
- 1608 à 1610, Thomas Hobbes rencontre Galilée à Paris ;
- 1609 : Johannes Kepler formule les deux premières lois de Kepler sur le mouvement des planètes ; Kepler pense que les trajectoires décrites par les planètes sont elliptiques, et non circulaires, comme le pensait Copernic.
- 1610 : Kepler prend connaissances de la découverte de quatre satellites autour de Jupiter grâce aux observations de Galilée avec sa lunette astronomique et écrit une lettre de soutien publiée sous le titre de Dissertio cum Nuncio Sidero (Conversation avec le messager des étoiles), puis après avoir lui-même observé ces satellites, il publie ses observations dans Narratio de Observatis Quatuor Jovis Satellibus.
- 1615 : dans une lettre à Christine de Lorraine, Galilée fait état de ses interrogations sur les observations qu'il a effectuées, par rapport aux passages cosmologiques de la Bible, ainsi qu'à quelques passages des livres d'Aristote.
- 1616 : l’édit anticopernicien de 1616 du cardinal Bellarmin admoneste Galilée, condamne comme hérésie le système de Copernic en tant que système philosophique, mais n’interdit pas de débattre du mouvement de la Terre dans un contexte « purement mathématique ».
- 1618 : Johannes Kepler formule la troisième loi de Kepler sur le mouvement des planètes.
- 1624 : Galilée est reçu en avril en audience par le pape Urbain VIII, qui l'encourage à reprendre par écrit l’analyse et la comparaison entre les plus grands systèmes astronomiques, le modèle copernicien pouvant aussi être pris en compte, pourvu que ce soit dans une perspective purement mathématique.
- 1632 : Galilée publie Dialogo sopra i due massimi sistemi del mondo, le dialogue sur les deux grands systèmes du monde, ouvrage ouvertement procopernicien, dans lequel il met en scène trois personnages, dont un aristotélicien, Simplicio, qu'il ridiculise.
- 1632 : début du procès de Galilée.
- 22 juin 1633 : Galilée est condamné par l'Inquisition pour son ouvrage dialogo sopra i due massimi sistemi del mondo; Urbain VIII commue immédiatement sa peine en assignation à résidence.
- Novembre 1633 : Descartes apprend la condamnation de Galilée.
- 1634 : Descartes reçoit de son ami Beeckman l'ouvrage dialogue sur les deux grands systèmes du monde qui a valu à Galilée sa condamnation ; Descartes suspend la publication de son propre ouvrage, le traité du monde et de la lumière, et préfére donner une orientation philosophique à sa carrière.
- 1637 : Descartes écrit son premier ouvrage philosophique : Discours de la méthode (1637),
- 1640-1641 : Descartes demande son avis à Hobbes sur son projet de livre méditations sur la philosophie première ; Hobbes écrit les Troisièmes Objections, qui sont un témoignage précieux pour l’étude de sa philosophie première. Elles sont transmises à Descartes en janvier 1641.
- 1641 : Descartes ne tient pas compte des objections de Hobbes ; il publie les Méditations métaphysiques (1641), les Principes de la philosophie (1644), recherche de la vérité par les lumières naturelles ;
- 1646 : en réaction à la fois à l'aristotélisme et à la philosophie de Descartes, Blaise Pascal adhère aux thèses de Jean Duvergier de Hauranne, abbé de Saint-Cyran, qui introduisit le jansénisme en France.
- 1656 : Blaise Pascal écrit une série de lettres, les Provinciales, pour défendre son ami janséniste Antoine Arnauld, et critique violemment la casuistique, méthode introduite dans l'enseignement par certains Jésuites au début du XVIIe siècle.
- 1657-1696 : dans l'abbaye janséniste de Port-Royal à Paris, le scientifique Blaise Pascal, et de grands écrivains, Robert Arnauld d'Andilly, Pierre Nicole, Pierre Thomas du Fossé, sous la responsabilité du maître d'œuvre Louis-Isaac Lemaître de Sacy ont participé à la traduction de la Bible, dite de Port-Royal (voir Logique de Port-Royal) ; ce fut la seule traduction de la Bible en français au XVIIe siècle.
- 1659 : John Locke lit Descartes et commence à s'intéresser à la philosophie.
- 1686 : Robert Boyle écrit A Free Enquiry into the Vulgarly Received Notion of Nature.
- 1690 : John Locke publie l'essai sur l'entendement humain, premier traité sur l'étude moderne de la conscience, sorte de fondement de la philosophie de l'esprit.
- 1741 : devant la preuve optique de la trajectoire orbitale de la Terre, le pape Benoît XIV donne l'imprimatur aux ouvrages de Galilée,
- 1757 : le pape Benoît XIV lève l'index sur les ouvrages relatifs à l'héliocentrisme,
- 1781 : Kant publie la Critique de la raison pure, remise en question des fondements de la métaphysique.
La victoire des thèses de Galilée a commencé d'intervenir avec le succès de la théorie newtonienne. La victoire définitive a été obtenue par la preuve optique de la trajectoire orbitale de la Terre et les mesures de levées d'index de la première moitié du XVIIIe siècle.
[modifier] Conséquences philosophiques
[modifier] Questionnement sur la scolastique et l'aristotélisme
La controverse ptoléméo-copernicienne a d'abord ébranlé, puis provoqué l'abandon de certaines théories soutenues par la scolastique. L'école scolastique s'appuyait sur la description de l'univers physique contenue dans certains passages de quelques livres d'Aristote, notamment la Physique : selon ces théories, le monde était un assemblage ordonné d'objets spécifiques et soumis à leur nature propre : monde lunaire des objets légers et sub-lunaire des objets lourds, etc.
Dans un premier temps, les autorités scientifiques, à cette époque liées à l'Église catholique, tentèrent de concilier le système de Ptolémée et le système héliocentrique, par l'équivalence des hypothèses, mais cela ne suffit pas.
Dans l'organisation des enseignements de la scolastique, la cosmologie faisait partie intégrante de la métaphysique, avec la théologie. Ces enseignements étaient les plus prestigieux à l'université. Les nouvelles théories cosmologiques ont reposé sur l'expérimentation, en particulier l'observation avec des lunettes astronomiques. L'expérimentation était précisément l'un des maillons faibles de l'école scolastique. On voit en effet le franciscain Roger Bacon critiquer la scolastique sur ces aspects dès le XIIIe siècle. Il ne faut pas sous-estimer pour autant la philosophie scolastique, qui comprenait des méthodes éprouvées, tant en logique, qu'en éthique, et même en métaphysique.
En fait, les hommes du XVIIe siècle semblent ne pas avoir fait la distinction entre la philosophie d'Aristote basée sur une observation de la nature, et ses traités scientifiques (physique,...). Aristote était un philosophe avant d'être un scientifique.
[modifier] Le projet cartésien en réaction au procès de Galilée
Dans ce contexte, le projet cartésien d'une science universelle se conçoit comme une réaction contre la scolastique, et contre les "aristotéliciens" : après avoir appris en novembre 1633 le résultat du procès de Galilée, Descartes reçut de son ami Beeckman l'ouvrage de Galilée, le dialogue sur les deux grands systèmes du monde, en 1634, soit un an après la condamnation de Galilée.
Descartes renonça à la publication de son propre ouvrage, le traité du monde et de la lumière (1634), qui ne fut publié qu'en 1664. Il inaugura sa carrière philosophique avec le Discours de la méthode (1637). Dans les méditations sur la philosophie première (1641), Descartes décrivit une forme de doute, très axée sur le sujet, qualifiée quelquefois d'hyperbolique. Descartes cherchait à refonder la philosophie sur un principe premier, le cogito, appelé à remplacer la cause première (Aristote). Descartes écrivit aussi les Principes de la philosophie (1644) et recherche de la vérité par les lumières naturelles.
[modifier] La conversion de Pascal aux thèses jansénistes
La conversion de Blaise Pascal, qui aboutit à son adhésion aux thèses jansénistes (Jean Duvergier de Hauranne abbé de Saint-Cyran, Antoine Arnauld), se comprend quant à elle à la fois comme une critique du laxisme des autorités ecclésiastiques, particulièrement des méthodes casuistiques introduites par les Jésuites au début du XVIIe siècle, et d'une réaction par rapport au rationalisme cartésien.
Jean Lacouture (Jésuites) note :
- « En 1646, il (Blaise Pascal) fait la connaissance de disciples de Saint-Cyran qui lui font découvrir que marcher sur les traces de Copernic et de Galilée pour libérer la physique du poids mort d'Aristote et de la scolastique n'est que la démarche d'une vaine raison, impliquée dans la souillure de l'humanité toute entière, et que tout ce génie qui bouillonne en lui ne le conduit qu'à le divertir d'une révélation terrible et rédemptrice. Que signifie un savoir qui ne jette pas l'homme au pied de la Croix ?
- Dès lors, et à jamais, Blaise Pascal - sans abandonner pour autant ses travaux scientifiques - vivra hanté par l'universelle corruption de la nature humaine conduite invinciblement au mal. Au coeur de cet océan de souillures, il se sent appelé à se dresser dans un combat sans trêve ni merci, avec le sentiment, écrit François Mauriac, de vivre au plus près de lépreux inconscients de leur lèpre et voué à observer avec autant de soin que la pesanteur de l'air la corruption de la nature. »
Blaise Pascal critiqua la casuistique et ses tenants jésuites de la Sorbonne (fidèles à la scolastique), d'une façon particulièrement virulente dans les Provinciales (1656) (surtout les lettres IV et V). Ces lettres furent publiées à plus d'une dizaine de milliers d'exemplaires. Elles eurent un impact considérable à l'époque, et encore pendant les Lumières.
- Article détaillé : les Provinciales.
Depuis la victoire des jésuites, la position officielle de l'Église catholique est de déplorer l'aveuglement de Pascal qui ne se rendait pas compte que, par de tels écrits, il donnait des armes aux adversaires du catholicisme. On en aura un exemple dans l'Encyclopedia Catholica :
- « Que Pascal ait pensé faire un travail utile, c'est toute sa vie qui en témoigne, aussi bien que ses déclarations à son lit de mort. Sa bonne foi ne peut pas sérieusement être mise en doute, mais certaines de ses méthodes sont plus discutables. S'il n'a jamais sérieusement altéré les citations des casuistes qu'il faisait, comme on l'a quelquefois accusé injustement de l'avoir fait, il les arrange un peu et de manière peu sincère; il simplifie à l'excès des questions compliquées et, dans sa façon de présenter les solutions des casuistes, il se permet quelquefois de mêler sa propre interprétation. Mais le reproche le plus grave qu'on puisse lui adresser est d'avoir injustement fait tort à la Société de Jésus, en l'attaquant exclusivement et lui attribuant un désir d'abaisser l'idéal chrétien et de mitiger le code de la morale dans l'intérêt de sa politique; il a par là discrédité la casuistique elle-même en refusant de reconnaître sa légitimité voire, dans certains cas, sa nécessité, si bien que ce ne sont pas seulement les jésuites, mais la religion qui a souffert dans ce conflit, même s'il a contribué à accélérer la condamnation par l'Église de certaines théories laxistes. Ainsi, sans le vouloir ni même s'en rendre compte, Pascal a fourni des armes aussi bien aux incroyants et aux adversaires de l'Église qu'aux partisans d'une morale indépendante.
L'impact sera grave sur l'image des jésuites et de l'Église catholique. Marc Fumaroli, cité par Jean Lacouture (Jésuite) note :
- « La modernité jésuite, à l'épreuve de la France, apparut à la fois choquante et démodée, et la fidélité jésuite à Aristote, à Cicéron, à saint Thomas, sembla impure et équivoque. Bien quils fussent en fait, par leur encyclopédisme, les derniers tenants de l'Antiquité vivante, les jésuites passèrent pour traîtres à l'Antiquité. Bien qu'ils fussent par leur adaptation aux réalités du monde de la Renaissance, les premiers historiens, sociologues et ethnologues du catholicisme, ils furent tenus pour ses pires réactionnaires... »
[modifier] Spinoza et l'intuition
Spinoza aborda également la métaphysique, quelque temps après Descartes, en apportant davantage d'importance à l'intuition que ce dernier. Bergson s'inspira sur ce point de Spinoza au XXe siècle.
[modifier] Affranchissement de la science de la tradition aristotélicienne
Les hésitations des scientifiques, qui à cette époque étaient liés à l'Église catholique, les erreurs d'interprétation de certains théologiens (Inquisition) du XVIIe siècle, notamment lors du procès de Galilée (1633), la confirmation des thèses héliocentriques avec Newton et les preuves optiques de la trajectoire orbitale de la Terre, ont eu pour conséquence que la science s'est affranchie de la tradition aristotélicienne.
[modifier] L'image de l'Église ternie pendant les Lumières
La lecture sans doute trop littérale des textes au XVIIe siècle, tant de la Bible que d'Aristote, et les différentes querelles sur ce sujet (conflits entre jésuites et jansénistes), a entraîné une polémique très dommageable pour l'image de l'Église catholique et du christianisme en général, qui se ressent encore aujourd'hui.
Il n'y eut pas, au XVIIIe siècle, de théologien qui fût à la hauteur de cet enjeu, alors que la traduction de la Bible, avec des modifications syntaxiques et grammaticales (voir logique de Port-Royal) produisit probablement un effet important sur les philosophes des Lumières.
Les levées d'index de la première moitié du XVIIIe siècle (1741, 1757) sont intervenues trop tard pour restaurer l'image de la scolastique, qui fut qualifiée d'obscurantiste par certains philosophes des Lumières.
[modifier] Kant et la survie de la métaphysique
La conception de la métaphysique changea ainsi progressivement. Kant écrivit sa critique de la raison pure, en grande partie pour sauver la métaphysique, qui était gravement menacée par la révolution copernicienne. Kant ajusta les fondements et les concepts de la métaphysique, en vue de renouveler l'éthique et le droit.
[modifier] Influence en littérature
Le style de la traduction de la Bible dite de Port-Royal par les jansénistes, effectuée avec la participation de Blaise Pascal, a influencé la création littéraire de grands écrivains français, tels que Victor Hugo, Arthur Rimbaud.
[modifier] Postérité
[modifier] Changement de configuration du savoir
Le philosophe Michel Foucault, dans les mots et les choses, identifie un changement dans la configuration du savoir (épistémè), qui s'est produit selon lui entre le milieu du XVIIe siècle (époque de Descartes et Pascal) et 1825 environ.
[modifier] Rejet de la métaphysique par les idéologies
Après cette période de mise en doute de la métaphysique, la période qui suivit la Révolution et l'Empire vit l'émergence de philosophies matérialistes, quelquefois franchement idéologiques.
Dans les années 1820, au XIXe siècle, et dans la première moitié du XXe siècle s'est développée la doctrine du saint-simonisme, du nom de Claude Henri de Rouvroy, comte de Saint-Simon (en abrégé Saint-Simon, à ne pas confondre avec le duc de Saint-Simon, le célèbre mémorialiste de Louis XIV).
Le comte de Saint-Simon prétendait remplacer Dieu par la loi universelle de la gravitation. Dans sa lettre d'un habitant de Genève à ses contemporains (1803), il fit référence à Isaac Newton, comme le symbole du scientifique idéal, élevant une sorte de culte aux scientifiques.
Cette doctrine connut un certain succès, sous la forme de la philosophie des réseaux, selon Pierre Musso.
La doctrine de Saint-Simon inspira un certain nombre d'idéologies matérialistes, comme le positivisme (Auguste Comte), le marxisme,...
Auguste Comte parla d'une loi des trois états, faisant passer l'humanité de l'âge théologique, à l'âge métaphysique, puis à l'âge positif. Il est intéressant de rapprocher cette loi des trois états des bornes chronologiques indiquées par Michel Foucault :
- Le milieu du XVIIe siècle correspond aux méditations métaphysiques (ou méditations sur la philosophie première) de Descartes (1641),
- L'année 1825 correspond à la mort de Saint-Simon.
[modifier] Aujourd'hui
[modifier] Au-delà du modèle copernicien
Les découvertes scientifiques de la deuxième moitié du XIXe siècle, et surtout du XXe siècle ont montré que la gravitation n'est pas la seule force de l'univers. On trouve en effet l'électromagnétisme, l'interaction faible, et l'interaction forte. Les découvertes de la relativité (générale et restreinte), ainsi que la physique quantique, ont conduit à revoir la prétention selon laquelle l'univers est prédictible selon des "lois" scientifiques. La notion de hasard a été réintroduite, par exemple la théorie des jeux.
Ainsi, aujourd'hui, le modèle héliocentrique de l'univers apparaît comme insuffisant : il ne permet pas d'expliquer la déviation du périhélie de Mercure, la courbure des rayons lumineux dans le voisinage des corps célestes de forte masse, les trous noirs, les pulsars, les quasars, etc.
Du reste, le Soleil n'est pas fixe, comme on le croyait à l'époque de Galilée : il tourne autour du centre de la Voie lactée, qui est composé d'un nuage d'hydroxyde (OH), dont la composition isotopique est d'ailleurs un peu différente de celle que nous connaissons sur notre planète. Ces nouvelles théories cosmologiques ont pu être obtenues grâce à la radioastronomie, avec de nouveaux types d'instruments, les radiotélescopes, comme celui de Nançay.
[modifier] Utilisations de l'expression en dehors du champ astronomique
L'expression révolution copernicienne n'a vraiment de sens qu'employée dans son contexte historique. Il est pourtant devenu d'usage courant de l'employer de manière métaphorique dans des contextes contemporains, notamment pour justifier des changements de perspective dans une discipline donnée, en particulier dans le domaine scientifique. Ainsi, dans Ni Dieu, ni gène, Jean-Jacques Kupiec et Pierre Sonigo soutiennent que la génétique n'a pas encore effectué sa révolution copernicienne, et est encore prisonnière du concept aristotélicien d'espèce.
En philosophie, l'utilisation la plus fameuse de l'expression est celle de Kant, qui qualifie de « révolution copernicienne » la nouvelle théorie de la connaissance qu'il propose : en considérant que la connaissance ne résulte pas d'une simple observation passive du monde mais d'un acte de notre esprit (qui élabore des concepts, procède à des expériences), il estime avoir placé le sujet au centre de la connaissance et non l'objet comme ses prédécesseurs. Voyez l'article sur Emmanuel Kant.
Michel Foucault parle, pour notre époque, d'un nouveau changement de conception du monde. Il qualifie les conceptions du monde liées aux époques de l'Histoire d'épistémè. Selon lui, nous entrons dans l'hypermodernité.
[modifier] Renouvellement de la lecture des textes bibliques
L'Église catholique a compris au cours du XIXe siècle que la controverse ptoléméo-copernicienne provenait en grande partie d'une lecture trop littérale des textes bibliques et d'ingérences non légitimes dans le domaine des sciences fondamentales.
Les protestants approfondirent la lecture de l'Ancien Testament au XIXe siècle.
À partir de Léon XIII, puis avec Pie XII, l'Église catholique introduisit des consignes pour les études bibliques : en herméneutique (interprétation des textes) ainsi qu'en exégèse (étude des textes anciens).
- Léon XIII publia l'encyclique Providentissimus deus en 1893,
- Pie XII publia l'encyclique Divino afflante Spiritu en 1943.
Le pape Pie XII n'a pas été particulièrement ému par la théorie du big bang, à laquelle il a réagi par cette expression : fiat lux !
Les papes modernes ont reconnu les talents exceptionnels de Galilée et les erreurs commises par certains théologiens au XVIIe siècle. Le pape Jean-Paul II a renouvelé cette reconnaissance des erreurs commises par certains théologiens du XVIIe siècle à la suite des travaux menés par une commission d'étude entre 1981 et 1992
- Article détaillé : purification de la mémoire.
Il n'en reste pas moins que la philosophie d'Aristote a été quasiment exclue des enseignements philosophiques en France jusqu'à la deuxième guerre mondiale, et qu'on n'y fait guère référence encore aujourd'hui dans les programmes de philosophie.
[modifier] Citation
« Prêtez-moi seulement votre attention ; je vais vous conduire plus loin que vous ne pensez. En effet, c’est de ce doute universel que, comme d’un point fixe et immuable, j’ai résolu de dériver la connaissance de Dieu, de vous-même, et de tout ce que renferme le monde. »
Descartes, recherche de la vérité par les lumières naturelles.
[modifier] Voir aussi
Aspects scientifiques
- Géocentrisme, Héliocentrisme, Équivalence des hypothèses
- Nicolas Copernic | Principe de Copernic
- Lois de Kepler
- Galilée
- Isaac Newton
- Cosmologie
- Relation entre science et foi
- Autonomie de la science
Aspects philosophiques
- Métaphysique
- Scolastique
- Descartes, Méditations métaphysiques
- Blaise Pascal, les Provinciales
- Kant, Critique de la raison pure
- Représentation sociale
- Brisures du complexe narcissique
Aspects historiques
Aspects religieux
Aspects médiatiques
[modifier] Bibliographie
- Dialogue sur les deux grands systèmes du monde, Galileo Galilei, traduction par René Fréreux et François de Gandt. Paris, Seuil, Points Sciences, 2000. ISBN 2-02-041635-2 ;
- Traité du monde et de la lumière, Descartes
- Galileo Galilei, 350 ans d'histoire (1633-1983), ouvrage collectif sous la direction de Mgr Paul Poupard, Desclée International, Tournai 1983.
- L'affaire Galilée, cardinal Paul Poupard, édition de Paris, octobre 2005.
- Descartes, Samuel S. de Sacy, Seuil, réédité en 1996.
- Jésuites, Jean Lacouture, Seuil, octobre 1991.
- ISBN 2-02-012213-8 (tome 1, édition brochée)
- ISBN 2-02-014407-7 (édition complète)
- ISBN 2-02-013714-3 (tome 1, édition reliée)
- ISBN 2-02-014408-5 (édition complète)
- Blaise Pascal, ou le génie français, Jacques Attali, Fayard, 2000.
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