Mathilde l'Emperesse
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Mathilde l'Emperesse (7 février 1102, Sutton Courtenay, Oxfordshire – 10 septembre 1167, abbaye Notre-Dame du Pré, Rouen), fut impératrice du Saint Empire romain germanique, et aspirante déçue à la couronne d'Angleterre.
Elle était la fille et héritière dépossédée du roi Henri Ier d'Angleterre, et de Mathilde d'Écosse (prénommée Edith avant son mariage). Elle était donc à la fois la petite-fille de Guillaume le Conquérant (normand), et de Malcolm III d'Écosse (écossais), l'époux de Marguerite d'Écosse (anglo-saxon).
Sa lutte contre son cousin Étienne de Blois qui avait usurpé sa place sur le trône d'Angleterre engendra une guerre civile en Angleterre qui fut appelée « l'Anarchie ».
Sommaire |
[modifier] Impératrice du Saint Empire
Elle reçoit le prénom de baptême d'Adélaïde, mais prend celui de Mathilde (ou Maud) à son départ d'Angleterre. Dès l'âge de 7 ans, elle est promise à Henri V du Saint-Empire (1081 – 1125), futur empereur romain germanique.
En mars 1111, son père et sa mère se rendent à Rome afin d'assister le 13 avril suivant au couronnement de leur futur gendre par le pape Pascal II. Pendant leur absence, c'est elle qui assure la régence du royaume d'Angleterre. Après leur retour, elle est alors envoyée à la cour germanique pour y être éduquée par Bruno de Brettheim, l'archevêque de Trèves.
Le 7 janvier 1114, Mathilde et Henri se marient à Mayence, lors d'une splendide cérémonie.
Devenue veuve en 1125 et comme son mariage n'avait pas engendré de descendance, elle revient en Normandie, puis en Angleterre. Elle en gardera le surnom d'« Impératrice » ou « Emperesse ».
Son frère Guillaume Adelin étant décédé le 25 novembre 1120 lors du naufrage de la Blanche-Nef, Mathilde est la seule héritière légitime au trône d'Angleterre. Le 1er janvier 1127, son père demande à tous les barons anglais, y compris son cousin Étienne de Blois, de prêter serment et de reconnaître sa fille comme héritière et successeur.
[modifier] Alliance avec les Plantagenêt
Avant sa mort, Guillaume Adelin avait épousé une fille de Foulque V d'Anjou. Henri Ier, étant toujours décidé à faire entrer le Maine et l'Anjou dans sa sphère d'influence, lui arrange un autre mariage avec Geoffroy, fils de Foulque V.
Le 17 juin 1128 au Mans, elle épouse le comte du Maine Geoffroy V le Bel (1113 – 1151). Celui-ci, surnommé Plantagenêt est l'héritier désigné de son père Foulque V d'Anjou, comte d'Anjou. Son mariage n'étant pas très heureux, elle retourne auprès de son père. En 1131, elle se réconcilie avec Geoffroy, et leur premier enfant Henri naît le 5 mars 1133.
Son père lui rend visite et il est très heureux de voir ses petits-enfants. Il se querelle néanmoins avec son gendre et refuse de lui céder la moindre parcelle de terre en Normandie. Quand il meurt le 1er décembre 1135 en Normandie, Mathilde et son mari se trouvent à ce moment là en Anjou.
[modifier] Lutte pour le trône d'Angleterre
[modifier] L'usurpation d'Étienne de Blois
À la mort de son père, il est attendu que Mathilde lui succède, mais très peu de seigneurs anglo-normands désirent être gouvernés par Mathilde et son mari angevin. Prévenu de la mort du roi par son frère Henri, l'évêque de Winchester, son cousin Étienne de Blois rejoint au plus vite Winchester et s'empare du trésor royal. Le 22 décembre 1135, il se fait couronner reniant ainsi les serments faits au feu roi Henri.
Alors que tout ce passe bien pour Étienne pendant deux ans, Mathilde prépare sa vengeance. En 1138, tandis que Geoffroy envahit la Normandie, David Ier d'Écosse, son cousin, envahit le nord de l'Angleterre et Robert de Gloucester, son demi-frère bâtard déclenche la rébellion dans l'ouest du pays. Ces événements sont le commencement effectif de la guerre civile qui fut appelée « l'Anarchie » car elle plongea l'Angleterre dans un état effroyable. Chacun des camps prit l'ascendant à tour de rôle.
[modifier] Capture du roi
En août 1139, Mathilde envahit l'Angleterre. Dans un incroyable esprit chevaleresque, Étienne la fait escorter jusqu'à Bristol. Forte du soutien de quelques barons mécontents de la faiblesse du roi, elle a la confiance de l'Église qu'Étienne a gravement contarié. Elle prend rapidement le contrôle d'une grande partie de l'ouest de l'Angleterre. Elle établit sa cour à Oxford, attribua des titres de comtes à ses partisans[1], et les barons du royaume changent de camp au gré de leurs intérêts. Robert de Gloucester est le capitaine charismatique de ses troupes et de son parti.
En février 1141, intervient le plus grand succès de Mathilde. À la bataille de Lincoln, Étienne est battu et capturé, puis déposé et enfin emprisonné à Bristol. Elle se trouve en position de force dans le royaume, et le 3 mars, elle se proclame Domina Anglorum, « Dame des Anglais ». Le 8 avril, elle est proclamée Angliae Normanniaeque domina, « Dame des Anglais et des Normands », au concile de Winchester, par l'évêque de Winchester, Henri de Blois, frère d'Étienne. Bien qu'elle contrôle dorénavant le royaume, elle n'est pas encore couronnée.
En juin, elle part à Londres se faire sacrer reine. Entrée dans la ville le 24 juin, son séjour y est court et houleux. Elle perd rapidement l'avantage que sa victoire à Lincoln lui avait donné, par son attitude particulièrement arrogante. Dès son arrivée dans la ville, elle demande immédiatement la levée de lourds impôts. La cité qui a subi de nombreux désordres depuis le début de la guerre de succession, s'est organisée en une forme de commune pour se défendre dans le chaos de l'époque. Les Londoniens voient donc très mal l'arrivée d'une femme despotique exigeant leur allégeance. Elle refuse en outre un traité de paix proposé par Henri de Blois qui aurait mit fin à la guerre civile, et dont les termes seront entièrement repris dans le traité de 1153.
Mathilde est obligée de quitter la ville en catastrophe et de se replier sur Oxford, devant le soulèvement de la population. Les Londoniens ne tardent pas à accueillir l'autre Mathilde (de Boulogne), la femme d'Étienne, qui a pris la tête du parti de son mari.
[modifier] Fin du conflit
L'évêque Henri de Blois décide une nouvelle fois de changer de camp et rejoint le parti de son frère. Mathilde se rend à Winchester pour le forcer à lui faire allégeance à nouveau. Mathilde de Boulogne et Guillaume d'Ypres, capitaine de son armée y voient une opportunité de reprendre l'avantage. Ils assiègent les troupes de l'Emperesse à l'intérieur de la ville. S'ensuit ce qui est aujourd'hui connu sous le nom de déroute de Winchester. Le 14 septembre, Mathilde réussit à s'enfuir de Winchester grâce à une diversion organisée par Robert. Ses troupes sont mises en déroute, et Robert de Gloucester, qui couvre sa fuite, est capturé à Stockbridge.
Tout l'avantage gagné à Lincoln a disparu. Les belligérants se mettent d'accord pour un échange de prisonniers. Robert n'est pas roi, mais il est l'âme et le leader charismatiqe du parti de sa sœur. Il est relâché le 1er novembre, en contrepartie de la libération d'Étienne. Ce dernier retrouve sa place sur le trône, et se fait à nouveau couronner le 25 décembre. La guerre civile peut reprendre de plus belle.
À l'hiver 1142, Mathilde se trouve assiégée dans le château d'Oxford. Elle ne doit son salut qu'à une fuite ingénieuse et dangereuse. Elle et quatre compagnons s'enroulent dans des draps blancs, pour ne pas être repérés, et se font descendre le long du mur du château en pleine nuit, alors qu'une tempête de neige sévit. Ils s'enfuient d'abord à pied dans la neige vers Abingdon, traversant la Tamise gelée, puis à cheval jusqu'à Wallingford.
Fin 1147, son demi-frère Robert, son plus ardent supporter décède d'une fièvre à Bristol. Au cours de l'année suivante, elle renonce à sa lutte, et retourne en France.
Son fils Henri, reprend le flambeau du combat pour son propre compte, et fait une première tentative en 1149. Début 1153, il redébarque en Angleterre avec une puissante armée. À la fin de l'année, après le décès d'Eustache IV de Boulogne, fils et héritier présomptif du roi, les conditions sont réunies pour un traité de paix. Selon les termes de l'accord, Étienne d'Angleterre et Henri se reconnaissent pour père et fils, et il est conclu que ce dernier succédera à Étienne à sa mort.
[modifier] Fin de vie
Elle se retire à Rouen, en Normandie pour le restant de sa vie, tenant sa propre cour. Elle intervient dans les querelles entre ses fils Henri et Geoffroy, mais la paix fut brève entre eux. Geoffroy se rebella deux fois contre son frère, mais il mourut soudainement en 1158. Les relations entre Henri et son frère Guillaume furent plus cordiales, et ce dernier ce vit attribuer de vastes possessions en Angleterre.
Guillaume, qui était son favori, se réfugia à sa cour quand Thomas Becket refusa qu'il épouse Isabelle de Warenne, la comtesse de Surrey. C'est là qu'il mourut en 1164, la laissant dans un grand chagrin. Elle essaya aussi de servir de médiateur entre Henri et Thomas Becket, mais sans succès.
Elle ne fut jamais aimée des anglais qui la jugèrent trop étrangère et trop hautaine. Elle parlait trois langues : le français, l'allemand et le latin. Bien qu'elle eût espéré se faire couronner en 1141, elle ne fut jamais reine d'Angleterre. Elle est néanmoins reconnue comme ayant été souveraine du royaume entre février et novembre 1141.
Lorsque le traité de Wallingford fut connu, la rumeur qui circulait depuis plusieurs années en Angleterre, insinuant qu'Étienne était en fait le père biologique d'Henri, fut renforcée.
Elle mourut à Rouen en 1167, et fut inhumée dans la cathédrale. Son épitaphe dirait « Ci-gît la fille, femme, et mère d'Henri »
[modifier] Familles et descendance
À Mayence, le 7 janvier 1114, elle épousa Henri V du Saint-Empire (1081 – 1125), empereur romain germanique dont elle n'eut aucune descendance connue.
En secondes noces le 17 juin 1128 au Mans, elle épouse Geoffroy V le Bel, comte du Maine (1113 – 1151), dont elle eut trois fils :
- Henri (1133 – 1189), futur comte d'Anjou, du Maine et du Poitou, duc de Normandie et d'Aquitaine, roi d'Angleterre ;
- Geoffroy Plantagenêt (1134 – 1158), futur comte d'Anjou, du Maine et de Nantes ;
- Guillaume Plantagenêt (1136 – 1164), comte du Poitou.
[modifier] Voir aussi
[modifier] Notes
- ↑ Elle recréa les titres de comte de Hereford pour Miles de Gloucester et comte d'Essex pour Geoffrey de Mandeville. Ces titres étaient dormants depuis leur désertion de la cause d'Étienne. Elle créa les titres de comte de Devon pour Baudouin de Reviers (1141), comte d'Oxford pour Aubrey de Vere, comte de Somerset (avec Dorset) (1141) pour Guillaume de Mohun, l'un de ses favoris, comte de Cornouailles pour Réginald de Dunstanville, un demi-frère illégitime, comte de Salisbury pour Patrick de Salisbury (1143). Seuls les titres de Somerset et Salisbury ne furent pas reconnus par Étienne et son successeur Henri II. Il faut remarquer que les deux rivaux ne cherchèrent pas à désigner des comtes rivaux pour un même titre.
[modifier] Sources
- Rois et reines d'Angleterre, sous la direction d'Antonia Fraser, Éd. Taillandier, 1975, (ISBN 2235006507).
- The empress Matilda. Queen Consort, Queen Mother and Lady of the English, Marjorie Chibnall, 1992 (ISBN 0631190287), 1993 (ISBN 0631157379)
