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Jean Lefebvre de Cheverus - Wikipédia

Jean Lefebvre de Cheverus

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Jean Lefebvre de Cheverus[1], de son nom complet : Jean-Louis-Anne-Magdeleine Lefebvre de Cheverus, (28 janvier 1768, Mayenne - 19 juillet 1836, Bordeaux), cardinal français, archevêque de Bordeaux.

Sommaire

[modifier] Origine

Son ascendance provient de la famille Lefebvre établie en Mayenne. Son père était juge général civil et de police à la barre ducale de Mayenne. Il effectue ses études au Collège de Mayenne.

[modifier] Etudes théologiques

Il reçoit la tonsure en 1780, où il devient prieur de Torbéchet malgré son jeune âge. Il continue ses études à Paris avec distinction au collège Louis-Le-Grand à Paris en 1781, où dès lors son esprit et sa bonté lui attachèrent tous les cœurs. S'étant destiné à l'état ecclésiastique, il étudia la théologie au séminaire de Saint-Magloire, tenu par les oratoriens, et s'y lia avec l'abbé de Maccarthy, qui était du même âge et qui, depuis, se fit tant de réputation dans la chaire. Emery, supérieur général de Saint-Sulpice, si juste appréciateur du mérite, voulut lui offrir une place gratuite dans son séminaire ; mais le jeune de Cheverus était trop attaché aux directeurs de Saint-Magloire pour les quitter : la reconnaissance l'empêcha d'accepter.

[modifier] Prêtre pendant la Révolution française

Il est ordonné diacre en octobre 1790, et n'avait pas vingt-trois ans lorsqu'il fut ordonné prêtre, le 18 décembre 1790 par dispense spécial, à la dernière ordination publique qui se soit, faite à Paris avant la Révolution française.

Déjà les biens du clergé étaient envahis, la constitution civile décrétée, le serment prescrit à tous les ecclésiastiques, sous peine de déchéance ; le jeune prêtre n'avait donc à attendre que la pauvreté, la persécution et la mort. Cependant il ne recula point devant les dangers qu'il était permis de prévoir ; il retourna dans son diocèse.

Son oncle, curé dé Mayenne, alors infirme et paralytique, le demanda comme coopérateur sous le titre de vicaire ; l'évèque du Mans le nomma en même temps chanoine de sa cathédrale ; et revêtu de ce double titre, l'abbé de Cheverus déploya dans ses nouvelles fonctions tout le zèle, la prudence et la fermeté d'un ancien ministre des autels. Il refusa le serment, exerça son ministère en secret, au milieu des contradictions et des alarmes auxquelles on était exposé en ces temps. Sa prudence déjà connue et appréciée avait porté l'évèque du Mans à lui donner des pouvoirs de grand vicaire.

Obligé de quitter Mayenne au printemps de 1792, ainsi que tous les ecclésiastiques insermentés du département, il eut ordre de se rendre à Laval, où il dut être en surveillance et se présenter chaque jour aux autorités. Jean-François de Hercé, évêque de Dol, était à leur tête. Le décret du 26 août 1792 condamna à la déportation les prêtres insermentés. On donna à ceux de Laval des passe-ports pour se rendre en pays étrangers ; Cheverus en prit un pour l'Angleterre, et passa par Paris, où il arriva au moment des massacres de septembre. Il se cacha pendant ces journées, et partit bientôt pour l'Angleterre, sans connaître la langue de ce pays, et n'ayant pour toutes ressources que 500 francs.

Le gouvernement anglais accordait alors des secours aux prêtres français réfugiés ; Cheverus ne voulut pas en profiter, et il réussit à pourvoir lui-même à ses besoins, en se plaçant comme professeur de français et de mathématiques chez un ministre protestaut qui tenait une pension. Au bout d'un an, il sut assez l'anglais pour se charger du service d'une chapelle catholique et y faire des instructions.[2] En même temps, on lui proposa de se mettre à la tête d'un collège à Cayenne.

[modifier] L'Amérique

Heureusement il crut ne devoir pas accepter, car il n'eût point échappé à la persécution qui éclata peu après contre les prêtres de ce pays. En 1795, l'abbé [François-Antoine Matignon]], ancien docteur et professeur dé Sorbonne, l'appela en Amérique, où son zèle, ses vertus pourraient se déployer sur un plus grand théâtre. Les esprits, divisés en plusieurs sectes religieuses, ne se réunissaient que dans une haine commune contre ce qu'ils appelaient le papisme.[3] [4]

L'abbé de Cheverus s'appliquait aux études qui étaient le plus en honneur à Boston [5]

M. Carroll, évèque de Baltimore, informé de tant de vertus et de talents, lui proposa la cure de Sainte-Marie, à Philadelphie ; mais son cœur ne put supporter la pensée de quitter son digne ami, Matignon, qui l'avait appelé d'Angleterre et qui était pour lui un père chéri. Bientôt il se livra avec un nouveau zèle à ses, travaux évangéliques, en visitant les catholiques des environs de Boston, qui n'avaient point de prêtres, et passant jusqu'à deux ou trois mois chez les Indiens de Passamaquody et de Pénobscot.[6]

[modifier] Boston

Après avoir passé trois mois au milieu de ce peuple, l'abbé de Cheverus repartit pour Boston. La fièvre jaune s'était déclarée dans cette ville (1798), et déjà de nombreuses victimes avaient succombé.[7]

Le nombre des fidèles s'accrut bientôt à Boston : les protestants eux-mêmes désiraient entendre les prédications et assister aux cérémonies si touchantes de l'Église romaine. L'abbé de Cheverus ouvrit donc une souscription pour bâtir une église dans cette ville. Le premier des souscripteurs fut le président des États-Unis, John Adams. Bientôt la souscription fut couverte des noms les plus honorables, tant protestants que catholiques. L'abbé de Cheverus éleva les mûrs jusqu'à la concurrence des sommes déposées entre ses mains ; mais, ces fonds épuisés, il arrêta tous les travaux, et jamais ils ne furent repris et continues qu'en proportion des fonds qu'il avait reçus.

[modifier] Un retour en France ?

Après le concordat de 1801, sa famille et ses amis de France le pressaient de revenir dans sa patrie, il fut un moment près de céder à leurs instances, mais les besoins des catholiques de Boston, son attachement pour l'abbé Matignon et les raisons que lui donna M. Carroll, dans une lettre du 9 avril le décidèrent à rester.[8]

Pendant qu'il se livrait aux travaux de son ministère, on lui adressa, des prisons de Northampton, une lettre qui l'appelait à la plus pénible de toutes les fonctions ecclésiastiques, Deux Irlandais catholiques, condamnés à mort pour un crime qu'ils n'avaient pas commis, lui écrivirent afin de réclamer l'assistance de son ministère. L'abbé de Cheverus accourt, les console, et trouve dans son cœur et dans les sublimes enseignements de la foi les moyens d'adoucir ce que ce dernier moment a d'horrible pour là nature abandonnée à elle-même. C'est la coutume aux États-Unis de conduire le condamné au temple pour qu'il y entende un discours funèbre immédiatement avant l'exécution.[9]

[modifier] Evêque de Boston

En 1808, M. Carroll demanda l'érection clé quatre nouveaux sièges, dont un serait à Boston pour toute la Nouvelle-Angleterre. Il avait d'abord proposé l'abbé Matignon, qui, par son âge et sa réputation, semblait avoir des droits à cette préférence. Mais le docteur, sans en prévenir son ami, dont il connaissait la modestie, fit tomber sur celui-ci ce choix honorable. Le 8 avril 1808, Pie VII donna le bref qui établissait quatre nouveaux évêchés. Un des nouveaux évêques, le P. Concanen, évêque de New-York, devait porter les bulles ; mais comme il mourut à Naples avant d'avoir pu se rendre dans son diocèse, les bulles n'arrivèrent aux États-Unis qu'en 1810.

L'abbé de Cheverus fut sacré à Baltimore le 1er novembre, et l'abbé Matignon, son maître et son guide, s'honora d'être son aide et son second.[10] Evêque comme missionnaire, il continuait les plus pénibles fonctions de son ministère, confessant, catéchisant, visitant les pauvres et les malades, ne craignant pas d'aller, en toutes saisons, à toutes les heures du jour et de la nuit, porter à plusieurs milles de distance ses abondantes aumônes.

Deux ou trois traits qu'on lit dans sa vie prouvent mieux que les réflexions les plus éloquentes à quel degré d'héroïsme l'évêque de Boston portait les vertus évangéliques, et combien il était digne du glorieux nom d'apôtre dans la plus sainte acception du mot.[11]

[modifier] Protecteur de la foi catholique

Au milieu de ses actes de charité, M. de Cheverus savait repousser les attaques des protestants contre la foi catholique, qu'il prouvait d'ailleurs si bien par ses vertus et sa vie admirable. Il avait même recours quelquefois aux feuilles publiques pour confondre l'erreur ou dissiper les préventions, et il est permis de croire que les journalistes se félicitèrent d'avoir un tel confrère.[12]

Quelquefois M. de Cheverus traduisait et lisait en chaire les plus beaux passages du Génie du Christianisme, où sa modestie seule l'empêchait de se reconnaître dans le tableau des merveilles opérées par les missionnaires dans les forêts du nouveau monde ; et jamais le chef-d'œuvre de M. de Chateaubriand n'a reçu un plus magnifique éloge.

[modifier] Le départ des Etats-Unis

Le 19 septembre 1818 fut un jour de grand chagrin pour l'évèque de Boston ; il perdit l'abbé Matignon. Ses occupations s'en accrurent, et sa santé même en fut altérée. L'Eglise de France devait envier aux Etats-Unis un de ses enfants qui lui faisait tant d'honneur, et dont elle pouvait espérer tant d'utiles services. M. Hyde de Neuville, qui avait été témoin des travaux de M. dé Cheverus et de son état de souffrance, avait engagé Louis XVIII à le rappeler et à le rendre au royaume auquel il appartenait par sa naissance.

Le 15 janvier 1825, le prélat fut nommé à l'évèché de Montauban. Nous ne devons pas dissimuler qu'il fut blâmé, à cette époque, même par des hommes religieux d'avoir quitté un poste où il faisait tant de bien, et où son influence pouvait être encore si salutaire. Mais il était malade ; les médecins avaient déclaré que le seul moyen de sauver sa vie était de passer sous un ciel plus doux ; qu'autrement l'âpreté du climat de Boston le conduirait au tombeau avant peu d'années. D'ailleurs le grand aumônier lui avait notifié la volonté expresse du roi. Il refusa d'abord, suppliant Sa Majesté de lui pardonner de faire ce qu'il croyait devant Dieu, être son devoir...

Les habitants de Boston et plus de deux cents protestants des principaux de la ville y joignirent leurs instances et leurs réclamations, ne se doutant pas que le tableau même qu'ils faisaient des vertus de l'évèque devenait un obstacle au succès de leur demande. Le roi n'accepta pas son refus, et chargea son grand aumônier d'insister avec force pour un prompt retour. Cette lettre, dit son historien, arriva à M. de Cheverus dans un moment où il était extrêmement souffrant, où les médecins, après une étude sérieuse de son état, venaient de lui déclarer qu'il était impossible que sa santé supportât un second hiver sous le ciel rigoureux de Boston.

Après, ces diverses circonstances, qui sont toutes d'une rigoureuse vérité, nous ne savons qui pourrait blâmer le pieux évêque d'être rentré dans sa patrie.[13] Enfin il quitta la ville au milieu des plus touchants adieux : plus de quarante voilures l'attendaient à la porte pour lui faire cortège, et l'accompagnèrent plusieurs lieues sur la route de New-York, on il s'embarqua, le 1er octobre 1825. Pendant la traversée, il charma le capitaine et tous les passagers par sa bonté et l'affabilité de ses manières. La navigation fut d'abord heureuse ; mais à l'entrée de la Manche, le bâtiment, surpris par une tempête, fut obligé de s'échouer, à Saint-Germain-des-Vaux, près du cap de la Hague. L'évèque fut accueilli chez le curé d'Auderville, et, le lendemain, il officia à la grand'messe et prêcha à vêpres. Le clergé des environs vint le saluer.

Le prélat ne se revit pas sans émotion sur la terre natale, trente et un ans après l'avoir quittée, au lieu d'ecclésiastiques dont quelques-uns avaient été ses compagnons d'exil. Il se rendit à Cherbourg, et de là à Paris, où il retrouva plusieurs de ses anciennes connaissances. Sa famille l'attendait avec impatience ; il visita tous ses parents, prêcha à Mayenne, à Laval, et laissa tout le monde enchanté de ses aimables vertus, de son caractère noble et élevé.

Il s'attendait à recevoir ses bulles à chaque instant, lorsqu'une nouvelle et bien étrange difficulté vint en suspendre l'exécution : on prétendit qu'ayant été naturalisé Américain, absent de France depuis plus de trente ans, il ne pouvait plus être réputé Français, ni, par conséquent, promu à un siège clans le royaume.

M. de Cheverus écrivit aussitôt au ministre que, si le roi de France, après l'avoir appelé comme son sujet, refusait de le reconnaître comme tel, il quittait Paris dès le lendemain matin, et renonçait pour toujours à l'évèché de Montauban. Cette résolution trancha la difficulté : les bulles furent enregistrées sur-le-champ, et remises le soir même à l'évêque, reconnu enfin pour Français.

[modifier] Evêque de Montauban

Son entrée à Montauban, le 28 juillet 1824, fut marquée par d'éclatants témoignages de joie et de respect. Les autorités, les catholiques, les protestants, rivalisèrent d'empressements et d'égards. Les ministres protestants vinrent le saluer. Il conquit les cœurs dans cette ville comme à Boston. Chacun était frappé de la simplicité de ses manières et des grâces de son esprit.[14]

Bientôt la France apprit par les cent voix de la renommée le généreux dévouement de l'évêque, lorsqu'on 1825, le Tarn débordé envahit les deux principaux faubourgs de Montauban. A la première nouvelle du désastre, le prélat accourt sur les lieux, se porte partout où il y a du danger, fait préparer des barques pour ceux qui sont près de périr.[15]

Charles X, instruit de la noble conduite de M. de Cheverus, et des sacrifices qu'il avait faits dans cette circonstance, lui envoya 5,000 francs qui lui furent transmis avec une lettre très flatteuse du ministre, l'évêque d'Hermopolis. Cette somme fut aussitôt distribuée aux pauvres. En arrivant à Montauban, il s'était chargé de faire lui-même le prône tous les dimanches à la messe paroissiale, tous, savants et ignorants, protestants et catholiques, se pressaient autour de sa chaire. [16]

[modifier] Evêque de Bordeaux

M. d'Aviau du Bois de Sanzay, archevêque de Bordeaux, mourut en 1826, laissant de longs regrets dans un diocèse où son esprit aimable, sa douceur, sa charité, avaient été justement appréciés ; M. de Cheverus fut choisi comme le seul digne de le remplacer ; et bientôt on vit revivre avec un nouvel éclat, clans son successeur, les vertus du prélat que l'on pleurait. [17]

Peu de temps après, Charles X le fit pair de France. Cheverus arriva à Bordeaux le 14 décembre. Nous l'avons vu au milieu de nous, écrivait à l'époque de sa mort un de ses grands vicaires, tel qu'il avait été à Boston et à Montauban, inspirant l'amour par toutes les qualités qui gagnent les cœurs, commandant le respect par les vertus les plus éminentes. Dans sa conduite comme évêque, comme homme public, comme homme privé, il a toujours été égal à lui-même, c'est-à-dire plein d'une haute sagesse, ne s'occupant que de ses devoirs, et se conciliant, par son zèle, sa prudence, sa douceur, sa charité, sa ce simplicité, une vénération et une confiance universelles.

Dans les divers voyages qu'il était obligé défaire à Paris, comme pair de France, il eut l'occasion de prêcher souvent. Invité à parler le vendredi saint devant l'école polytechnique, on craignît beaucoup qu'il ne pût se faire écouter. Le duc de Rohan, archevêque de Besançon, y avait échoué l'année précédente : les élèves, par leur tumulte, l'avaient forcé à descendre de chaire. [18] Il accueillait ses prêtres avec bonté quand ils venaient à Bordeaux, et c'eût été le fâcher que de ne pas s'asseoir à sa table.

Dans une circonstance grave, l'archevêque de Bordeaux parut divisé d'opinion avec ses collègues ; c'était au sujet des ordonnances du 16 juin 1828, M. de Cheverus, qui n'approuvait pas les ordonnances, ne fut pas cependant d'avis d'adopter le mémoire présenté alors au roi par le cardinal de Clermont-Tonnerre, au nom de l'épiscopat. Il paraît qu'il trouvait quelques expressions de ce mémoire trop vives et trop fortes.

Cette même année, il fut fait conseiller d'Etat, autorisé à prendre part aux délibérations du conseil et aux travaux des comités divers dont il se compose. En 1850, le roi le nomma commandeur de l'ordre du Saint-Esprit, et le ministre de l'intérieur, M. de Peyronnet, lui annonçant cette honorable promotion, lui écrivait :

« Le cordon bleu n'ajoutera rien à vos vertus et à votre mérite, mais il prouvera que le roi les conte naît, les aime, et prend plaisir à les honorer. » 

Au milieu des troubles qui agitèrent la France, deux mois après, sa réputation protégea son clergé dans les moments les plus fâcheux, et le diocèse n'éprouva point de ces secousses violentes qui ailleurs affligèrent l'Église, et forcèrent des prélats et des curés à s'éloigner : Le nouveau gouvernement eut d'abord l'idée de demander aux prêtres en charge, comme aux fonctionnaires publics, le serment de fidélité. Dès le premier avis qu'en eut l'archevêque de Bordeaux, il s'empressa d'écrire à un personnage puissant, lui fit sentir que cette mesure serait également impolitique et désastreuse, et qu'il s'ensuivrait une division semblable à celle des prêtres jureurs et des prêtres insermentés de la première révolution. Sa lettre eut un heureux effet, et on ne songea plus à demander le serment.On sait qu'après la révolution de 1830, la chambre des députés priva de la pairie ceux qui l'avaient reçue de Charles X.

Plusieurs membres du gouvernement eurent la pensée, le désir, de réintégrer l'archevêque de Bordeaux dans sa dignité de pair de France, et de l'associer au nouvel ordre de choses. Il paraît même que les députés de la Gironde sollicitaient pour lui avec instances les faveurs du pouvoir, lorsque l'archevêque voulut arrêter, d'un seul coup, toutes les tentatives, en faisant publier dans les journaux une note [19] Cette déclaration, il faut l'avouer, déplut également aux amis et aux ennemis du gouvernement : elle n'en était peut-être que plus conforme à la politique de l'Evangile, - Pendant la captivité de la duchesse de Berry dans la citadelle de Blaye, il sollicita d'aller lui porter les consolations de son ministère, ne dissimulant pas ses sentiments pour Charles X. [20] Au reste, la plus parfaite intelligence régnait entre les autorités et lui ; toutes les classes et toutes les opinions étaient unanimes dans leurs sentiments de vénération pour le saint prélat.[21]

Lors de l'invasion du choléra, il offrit son palais aux malades, et, au-dessus de la porte, on inscrivit ces glorieuses paroles : Maison de secours. Un bruit sourd d'empoisonnement ayant circulé parmi le peuple les autorités s'adressèrent à l'archevêque pour faire tomber ces bruits absurdes, et bientôt on eut honte de les avoir accueillis ou répétés. Il apaisa aussi une sédition au dépôt de mendicité, et prévint ne évolte au fort du Hâ.

Dès 1852, il avait été question de lui pour un des chapeaux vacants ; mais l'occupation d'Ancône relarda la présentation. Enfin, le 1er février 1856, le pape déclara le prélat cardinal. Il reçut la barrette le 9 mars. Croyant le moment favorable, il sollicita alors une grâce que son cœur désirait vivement, la délivrance de M. de Peyronnet, son diocésain, et celle de ses compagnons d'infortune. Le roi Louis-Philippe Ier lui protesta de sa bonne volonté et de ses intentions bienveillantes mais tout s'arrêta là pour le moment.

Nommé cardinal aux applaudissements de toute la France, M. de Cheverus ne fut point ébloui, on le croira facilement, par cette éminente dignité. Au milieu de tant d'honneurs, il était profondément triste.

« Qu'importé, disait-il, d'être enveloppé après la mort, d'un suaire rouge, violet ou noir ? » 

Après avoir passé quelques jours à Mayenne en mars 1836, il partit pour retourner à Bordeaux, où on lui fit une réception magnifique. Il était aussi vivement sollicité de visiter son ancien diocèse de Montauban, et il y alla passer quelques jours. Sa présence y excita un véritable enthousiasme, que les protestants eux-mêmes semblaient partager.

[modifier] La fin du Cardinal

Mais, depuis quelque temps, le prélat avait le pressentiment de sa mort.[22]

Le cardinal de Cheverus tomba malade au mois de juillet 1836, et il éprouva une perturbation d'idées, une absence de mémoire qui effrayèrent tous ses amis, et lui firent juger à lui-même que sa fin était proche. Il ne songea qu'à se préparer à son dernier passage, ajouta un codicile à son testament, se confessa encore le 15, et le lendemain, à cinq heures du matin, frappé d'une attaque d'apoplexie et de paralysie, il perdit toute connaissance. II expira le 19, le jour même où l'Eglise célèbre la fête de Saint Vincent de Paul, dont il avait, sous tant de rapports, eproduit les vertus.[23]

L'évêque de la Rochelle prononça son oraison funèbre, qui n'a pas été imprimée. M. Villenave lut, le 17 avril 1857, à la séance publique de la société de la Morale chrétienne, dont il est vice-président, un éloge touchant du cardinal de Cheverus, qui fut vivement applaudi.

Un buste à son effigie est inaugurée à Mayenne le 8 août 1844.

[modifier] Bibliographie

[modifier] Bibliographie ancienne

Il existe une Vie du cardinal de Cheverus, archevêque de Bordeaux, 1 vol. in-8°. Cet ouvrage porte le nom de M. J. Huen-Dubourg, ancien professeur de théologie, mais il est de M. Hamon, grand vicaire et supérieur du séminaire de Bordeaux. Il a eu trois éditions et a été traduit deux fois en anglais, d'abord à Philadelphie, par M. Walsh, auteur catholique et écrivain distingué ; ensuite, à Boston, par M. Stewart, auteur protestant ; et partout on a rendu hommage à la vérité des faits. La deuxième édition est sans nom d'auteur. Quelque chose de l'âme douce et bienveillante du cardinal a passé dans le récit et dans le style de son historien.

L'Académie française a décerné à la Vie du cardinal de Cheverus, indiquée ci-dessus, un prix Montyon, sur le rapport de M. Villemain, qui a payé un juste tribut d'éloges à cet ouvrage qui se recommande autant par la agesse des jugements que par l'intérêt touchant du récit, la parfaite intelligence de toutes les onvenances ecclésiastiques et l'élégante simplicité du style. C'est l'ouvrage le plus parfait de biographie après les histoires de Fénelon et de Bossuet par le comte de Bausset.

  • Sermon preached in the Catholic church of St. Peter, Baltimore, November 1st, 1810; on occasion of the consecration of the Rt. Rd. Dr. John Cheverus, bishop of Boston. Baltimore: Pr. for Bernard Dornin, by G. Dobbin and Murphy, 1810. de William Vincent Harold.
  • ''Archevêque de Bordeaux, vie du cardinal de Cheverus. Abbé Hamon, le curé de Saint-Sulpice. 1837. Perisse 1842. Lecoffre, 1858. Victor Lecoffre, 1883
  • Le cardinal de Cheverus, archevêque de Bordeaux. J. Huen-Dubourg. Périsse. Paris & Lyon. 1837.
  • Life of the Cardinal de Cheverus, Archbishop of Bordeaux, translated from the French by Robert M. Walsh. J. Huen-Dubourg. Philadelphie. Hooker & Claxton 1839.
  • Monsieur de Cheverus. Abbé Barbier. Paris, Appert, 1842.
  • Le cardinal de Cheverus. Trébutien. Amiens, 1876.
  • Le cardinal de Cheverus. Blavien. Paris, 1896. Paru dans l'hebdomadaire "Les contemporains"
  • Une lettre écrite en 1802 par le futur cardinal de Cheverus. Bertrand de Broussillon.
  • Le cardinal de Cheverus. Godbert, Laval.
  • Sermon pour le centenaire du cardinal de Cheverus. Mayenne, 1936. Chanoine Herpin.

[modifier] Bibliographie moderne

  • A Memorial to Bishop Cheverus with a Catalogue of the Books Given By Him to the Boston Athenaeum. Boston Atheneum, 1951.
  • Jean Lefebvre De Cheverus. Milwaukee, WI: Bruce Publishing Co. 1958. Annabelle Melville.
  • Vie et œuvre du cardinal Lefebvre de Cheverus, par le Chanoine Picquenard. 1968.
  • Cardinal de Cheverus 1768-1836, Lettres et documents. Christian de Jouvencel. 2005. Memodoc.

[modifier] Notes et références

  1. Il s'est attiré dans les deux mondes, par sa piété et ses vertus, l'estime et l'affection des hommes même les plus opposés à sa croyance ; et revenu au sein de sa pairie, après trente années d'absence, il a retracé le même spectacle d'une vie pure, apostolique, gagnant tous les coeurs, multipliant les fidèles, pur son aimable simplicité et l'inaltérable aménité de son caractère.
  2. La première fois qu'il prêcha en anglais, voulant s'assurer s'il avait été bien compris, il demanda à un homme du peuple ce qu'il pensait de son sermon :

    « Votre sermon, répondît naïvement cet homme simple, n'était pas connue les autres, il n'y avait pas un seul mot de dictionnaire, tous les mots se comprenaient tout seuls. » 

    Jusque dans les dernières années de sa vie, Cheverus aimait à rappeler cette réponse à ses prêtres, pour les convaincre que le principal mérite de la prédication, c'est d'être intelligible à tous, même aux plus simples ; que les grands mots, les néologismes à prétention, pour l'intelligence desquels un homme du peuple aurait besoin d'un dictionnaire, doivent être bannis de la chaire, et qu'il vaut mieux être compris par une simple femme que loué par un académicien.
  3. Pour faire tomber les préjugés, gagner les cœurs, conquérir l'estime, il fallait un homme d'une vertu aimable, d'un caractère doux, d'un noble désintéressement, d'un esprit orné, de connaissances étendues, et cet homme fut l'abbé de Cheverus.
  4. Rien de plus admirable que le début de son apostolat, tel qu'on le lit dans le Magasin mensuel de Boston, il est beau de voir un auteur protestant louer ainsi un prêtre catholique et rendre hommage à ses vertus. Tantôt c'est un dissident qui épie les démarches, observe les actions du jeune apôtre, et qui lui dit :

    « Je ne croyais pas qu'un ministre de votre religion pût être un homme de bien ; je viens vous faire réparation d'honneur ; je vous déclare que je vous estime et vénère comme le plus vertueux que j'aie connu. » 

    Ici c'est un pasteur protestant qui désire attirer dans son parti l'abbé de Cheverus et son digne ami, dont la vertu et la science jetaient un si grand éclat dans la ville, et qui, après une conférence où il leur fait part de ses objections et entend leurs réponses, s'écrie :

    « Ces hommes sont si savants, qu'il n'y a pas moyen d'argumenter avec eux ; leur vie est si pure et si évangélique, qu'il n'y a rien à leur reprocher. » 

    Ailleurs, frappé de l'estime et de la vénération que M. de Cheverus et M. de Matignon s'étaient conciliées par leurs vertus, le même journal fait cette réflexion dont personne ne contestera la justesse :

    « En voyant de tels hommes, qui peut douter s'il est permis à la nature humaine d'approcher de la perfection de l'Homme-Dieu et de l'imiter de très près? » 

  5. Il apprit si parfaitement l'anglais, dit un journal de cette ville,

    « qu'il était devenu le maître des difficultés de la langue : c'était lui qui en connaissait le mieux les arrangements, les constructions et les étymologies. » 

    II était aussi très savant dans la littérature française, grecque et latine ; tous les jours il rafraîchissait sa mémoire par la lecture des auteurs classiques, et on le regardait dans cette contrée, non seulement comme un savant, mais encore comme un zélateur dévoué de la bonne littérature.
  6. Le tableau de ses missions a été peint par l'auteur de sa vie, avec autant de charme que de vérité. On croirait lire une page du Génie du Christianisme :

    « II partit sous la conduite d'un guide, à pied, le bâton à la main, comme les premiers prédicateurs de l'Évangile. Jamais il n'avait fait encore part reille route ; il fallait tout le courage d'un apôtre pour en supporter les peines. Une sombre forêt, aucun chemin tracé, des broussailles et les épinés, à travers lesquelles il était obligé de s'ouvrir un passage, et puis, après de longues fatigues, point d'autre nourriture que le morceau de pain qu'ils avaient pris à leur départ, le soir, point d'autre lit que quelques branches d'arbre étendues par terre, et encore fallait-il allumer un grand feu tout autour pour éloigner les serpents et autres animaux dangereux qui auraient pu, pendant le sommeil, leur donner la mort. Ils marchaient ainsi depuis plusieurs jours, lorsqu'un matin c'était un dimanche, grand nombre de voix, chantant avec ensemble et harmonie, se font entendre, dans le lointain. M. de Cheverus écoute, s'avance, et à son grand étonnement, il discerne un chant qui lui est connu, la messe royale de Dumont, dont retentissent nos grandes églises et cathédrales de France, dans nos plus belles solennités. Quelle aimable surprise et que de douces émotions son cœur éprouva ! Il trouvait réunis à la fois, dans cette scène, l'attendrissant et le sublime car quoi de plus attendrissant que devoir un peuple sauvage, sans prêtres depuis cinquante ans, et qui n'en est pas moins fidèle à solenniser le jour du Seigneur ; et quoi de plus sublime que ces chants sacrés, inspirés par là piété seule, retentissant au loin dans cette immense et majestueuse forêt, redits par tous les échos, en même temps qu'ils étaient portés au ciel par tous les cœurs ! » 

  7. On vit alors l'intrépide missionnatre braver le fléau, se multiplier pour secourir les malades, catholiques et protestants, s'acquittant auprès d'eux de tous les soins d'un infirmier, et leur rendant les services les plus humiliants, si la charité n'ennoblissait pas tout ce qu'elle inspire. On lui représente qu'il ne doit pas s'exposer ainsi :

    « II n'est pas nécessaire que je vive, répond-il, mais il est nécessaire que les malades soient soignés les moribonds assistés. » 

    On pense bien qu'une si belle conduite porta au plus haut point rattachement et l'admiration des habitants de Boston. Partout où l'abbé de Cheverus paraissait, on s'estimait

    heureux de lui faire honneur. Chose remarquable dans les repas de cérémonie où les bienséances l'obligeaient à se trouver et où assistaient également jusqu'à trente ministres de sectes diverses, c'était toujours lui que le maître de la maison et les Ministres eux-mêmes invitaient, comme le

    plus digne, à bénir la table, et qui faisait avec le signe de la croix la prière accoutumée de l'Eglise catholique.
  8. On sait qu'il fut vivement agité à ce sujet ; son bon cœur le rappelait en France, son bon cœur le retenait en Amérique. Enfin, après de longues irrésolutions, il annonça à ses ouailles, le dimanche d'après Pâques, qu'il resterait avec elles, partageant leur bonne et leur mauvaise fortune, qu'elles lui tiendraient lieu de tous ses parents et amis de France, dont il se privait pour elles.
  9. L'homme évangélique, montant en chaire, aperçut une multitude de femmes accourues de toutes parts pour assister au supplice de ces infortunés. Alors, d'une voix forte et sévère, il prononça ce discours, qui ne convient pas seulement aux États-Unis, mais à d'autres contrées de l'Europe qui se disent plus civilisées :

    « Les orateurs, s'écrie-t-il, sont ordinairement flattés d'avoir un auditoire nombreux, et moi j'ai honte de celui que j'ai sous les yeux. II y a donc des hommes pour qui la mort de leurs semblables est un spectacle de plaisir, un objet de curiosite. Mais vous, surtout, femmes, que venez-yous faire ici ? Est-ce pour essuyer les sueurs froides de la mort qui découlent du visage de ces infortunés? Est-ce pour éprouver les émotions douloureuses que cette scène doit inspirer à toute âme sensible? Non, sans doute : c'est donc pour voir leurs angoisses et les voir d'un œil sec, avide et empressé. Ah ! j'ai honte pour vous ; vos yeux sont pleins d'homicide. Tous vous vantez d'être sensibles, et vous dites que c'est la première vertu de la femme ; mais, si le supplice d'autrui est pour vous un plaisir et la mort d'un homme un amusement de curiosité qui vous attire, je ne dois plus croire à la vertu ; vous oubliez votre sexe, vous en faites le déshonneur et l'opprobre » 

  10. Rien ne fut changé entre eux, si ce n'est que l'évêque, forcé de prendre la première place, tâchait de faire compensation par un redoublement de soins et d'égards envers son digne ami. La dignité épiscopale dont il fut revêtu n'altéra jamais l'aimable simplicité de son caractère, ni sa vie de dévouement et de charité.
  11. Un jour, un pauvre marin, avant de partir pour un voyage de long cours, lui recommanda sa femme, qu'il laissait seule et sans appui. L'évêque en prit soin comme de sa propre sœur, et cette pauvre femme étant tombée malade, il se fit son infirmier, et lui rendit jusqu'aux services les plus humiliants. Au bout de plusieurs mois, le marin, étant revenu, trouva, tn rentrant chez lui, l'évêque de Boston, qui montait, chargé de bois, à la chambre de la malade, pour lui faire du feu et préparer des remèdes. Frappé d'admiration à la vue de tant de charité, le marin tombe aux pieds de l'évêque, les arrose de ses larmes, et ne sait comment dire sa reconnaissance. Cheverus le relève, l'embrasse, calme son émotion et le rassure sur la maladie de sa femme. Vers le même temps, il y avait, en dehors de la ville de Boston, un pauvre nègre, infirme, couvert de plaies, sans ressources et gisant sur son grabat. L'évêque le découvre, se fait son infirmier, va ous les soirs, après la chute du jour, panser ses plaies, faire son lit et pourvoir à tous ses besoins. Son humilité eût caché cette bonne œuvre, sans la curiosité de sa servante qui, ayant remarqué que tous les matins son habit était couvert de poussière et de duvet, voulut savoir d'où cela pouvait provenir. Elle suit de loin son maître, et elle le voit entrer dans la cabane du pauvre nègre ; alors elle s'approche, regarde à travers les planches mal jointes, et quel est son élonnement, de voir l'évêque allumer du feu, prendre entre se,s bras le malade gisant sur le lit de douleur, l'étendre doucement prés du brasier, panser ses plaies, lui donner à manger, remuer sa couche pour la lui rendre plus douce, puis Je reporter dans son lit, le couvrir, l'embrasser, en lui souhaitant une heureuse nuit, comme ferait la mère la plus tendre pour son enfant chéri ! Après ces traits de bonté, qui ne sont que quelques-uns entre mille, observe l'auteur de sa vie, on conçoit sans peine l'amour des fidèles de Boston pour leur évêque. La plupart des parents voulaient que leurs enfants, au baptême, portassent le nom de Jean, parce que c'était celui de M. de Cheverus. Un jour même il arriva à ce sujet un fait assez plaisant. L'évêque ayant demandé, selon l'usage, au parrain et à la marraine : « Quel nom voulez-vous donner à cet enfant ? - Jean Cheverus, évêque, répondirent-ils. - Pauvre enfant, dit le prélat, Dieu te préserve jamais de le devenir ! » M. de Cheverus a raconté que l'éloge qui l'avait le plus vivement touché, pendant son séjour à Boston, fut le trait d'une femme protestante qui vint chez lui pour lui faire part des peines de son cœur. Il était absent, et ayant aperçu sur son bureau un volume de lord Byron, elle attacha une épingle à ce passage du Giaour : « Absoudre les péchés des hommes, exempt toi-même de crimes et de soucis, telle a été l'occupation de ta vie, depuis le berceau jusqu'à la vieillesse. » - « Je commis un peltt péché d'orgueil, disait-il en riant, et je dus m'en confesser. »
  12. Un Américain,- grand amateur de l'antiquité, qui avait voyagé en Italie, s'était permis de plaisanter sur le culte des reliques, dans deux lettres adressées à l'Anthologie mensuelle. Cheverus répond dans le même journal ; il fait appel aux propres sentiments du voyageur : « Le célèbre poète français, lui dit-il, l'abbé Delille, voyageant en Grèce, écrivait d'Athènes à une dame de Paris : « Ayant aperçu une fontaine de marbre dans la basse-cour d'une maison particulière, je m'en approchai, et reconnaissant à la belle sculpture que c'était un reste d'un ancien et magnifique tombeau, je me prosternai, je baisai le marbre à plusieurs reprises, et dans l'enthousiasme de mon adoration, j'en vins à briser le seau d'un domestique qui avait eu l'irrévérence de venir y puiser de l'eau. La première fois que j'entrai à Athènes, les plus petites pierres détachées d'anciennes ruines étaient choses sacrées à mes yeux, et je remplis toutes mes poches des petits morceaux de marbre que je pouvais trouver. » Telle était la vénération de l'abbé Delille pour l'antiquité païenne ; et vous-même, monsieur, qui êtes un amateur de la belle littérature, un admirateur de la savante antiquité, vous avez dû ressentir quelque chose du même enthousiasme, en foulant sous vos pieds cette terre classique où Virgile et Horace ont fait entendre leurs chants mélodieux, où Cicéron prononçait ses belles harangues, où Tite-Live a écrit son histoire, et en contemplant tous ces magnifiques restes de l'ancienne Rome. Eh quoi donc ? n'y a-t-il qu'à l'égard des restes de l'antiquité religieuse et sacrée que toute espèce d'enthousiasme devra être improuvée? On est saisi de respect pour un marbre antique, et on ne le sera pas pour les ossements des fondateurs de la foi ou ce qui a servi à leur usage ! »
  13. Avant de partir, voulant, selon ses expressions, exécuter son testament, il donna au diocèse l'église, la maison épiscopale et le couvent des ursulines, dont il avait la propriété ; il laissa aux évêques ses successeurs sa bibliothèque, composée des meilleurs ouvrages, et qui était l'objet auquel il tenait le plus ; il distribua tout le reste de ce qui lui appartenait à ses ecclésiastiques, à ses amis, aux indigents, et, comme il était venu pauvre à Boston, il voulut en repartir pauvre.
  14. On raconte de lui des traits fort touchant nous n'en citerons qu'un seul. Informé qu'un maire est en querelle avec son curé, il va le trouver : « Monsieur, lui dit-il, j'ai un grand service à vous demander ; vous me trouverez peut-être indiscret, mais j'attends tout de votre obligeance. Le maire, hors de lui-même et tout confus, proteste qu'il n'y a rien qu'il ne soit disposé à faire pour un prélat si vénéré. « Eh bien, ce dit l'évêque en se jetant à son cou et en l'embrassant, le service que j'ai à vous demander, c'est d'aller porter ce baiser de paix à votre curé. » Le maire promit, tint parole, et la réconciliation, fut faite.
  15. Digne imitateur de Fénelon, qui disait que les évoques ont leurs jours de bataille, il encourage les travailleurs, plus encore par ses exemples que par ses paroles, s'empresse d'ouvrir son palais à près de trois cents victimes dufléau, les nourrit, pourvoit à tous leurs besoins, et les sert de ses propres mains. Une pauvre femme reste à la porte de l'évêché et n'ose point entrer, parce qu'elle est protestante ; l'évêque l'apprend, court la chercher lui-même : « Venez, lui dit-il, nous sommes tous frères, surtout dans, le malheur ! » Et il la conduit dans les salles avec ses autres compagnes d'infortune.
  16. Pendant le jubilé de 1826, il redoubla ses instructions, et il reçut le bonheur de ramener à Dieu un ancien religieux qui s'était marié sous le règne de la terreur. Il lut sa rétractation en chaire, et prononça, à ce sujet, un discours touchant, où il développa ces paroles de l'Ecclésiastique :

    « Ne méprisez point l'homme qui se détourne de son péché, et ne lui faites pas de reproches : souvenez-vous que nous sommes tous dignes de châtiment. » 

  17. Bien différent, dit très bien l'auteur de sa vie, de ces esprits remuants et confiants en eux-mêmes, qui, arrivant à la tèie d'une administration, aspirent à tout changer, ont amener à leur sens, tout disposer suivant leurs propres idées, il s'attacha religieusement à conserver ce qui était, à connaître ce qu'on avait pratiqué avant lui et suivre, il ne troubla aucune existence, ne changea aucun règlement. Je succède à un saint, répétait-il souvent, je respecte tout ce qu'il a fait ; tous ses actes sont pour moi comme une arche sainte que je ne veux pas même toucher du bout du doigt. »
  18. Cheverus arrive, et prenant pour texte ces paroles de Saint Paul : « Au milieu de vous, je n'estime savoir autre chose que Jésus crucifié, » il ajoute Si j'avais à parler des sciences humaines, ce serait au milieu de cette savante école, ce serait de vous-mêmes, messieurs, que je viendrais prendre des leçons ; mais aujourd'hui il s'agit de la science de la croix ; c'est là nia science spéciale, la science que j'étudie et prêche depuis quarante ans, parmi les nations civilisées comme parmi les peuplades sauvages, parce qu'elle on vient également à tous, et vous permettrez à un vieil évêque de vous communiquer le fruit de ses longues études. » Un exorde aussi insinuant gagna tous les cœurs ; le silence le plus parfait ; l'attention la plus soutenue, l'intérêt le plus vif accueillirent toutes les paroles du vieil évêque.
  19. « Sans approuver l'exclusion prononcée contre les pairs nommés par le roi Charles X, je me réjouis de me trouver hors de la carrière politique. J'ai pris la ferme résolution de ne pas y entrer, et de n'accepter aucune place, aucune fonction. Je désire rester au milieu de mon troupeau, et continuer à y exercer un ministère de charité, de paix et d'union. Je prècherai la soumission au gouvernement ; j'en donnerai l'exemple, et nous ne cesserons, mon clergé et moi en plus attaché aux habitants de Bordeaux ; je les remercie de l'amitié qu'ils me témoignent. Le vœu de mon cœur est de vivre et de mourir au milieu d'eux, mais sans autres titres que ceux de leur archevêque et de leur ami. » 

  20. Je ne serais pas digne de voire estime, dit-il un jour aux autorités de sa ville épiscopale, si je vous cachais mes affections pour la famille déchue, et vous devriez me mépriser comme un ingrat, puisque Charles X m'a comblé de ses bontés. »
  21. « Tout le monde me gâte, disait-il ; on m'a toujours gâté, je ne sais pourquoi. » Lui seul ignorait que sa douceur, sa charité, ses manières franches et cordiales, lui avaient gagné tous les cœurs.
  22. En nommant M. Georges, son neveu, grand vicaire, il lui avait dit :

    « Me voilà sur mon déclin, et je sais que la vieillesse se fait facilement illusion : plus les faits s'affaiblissent, plus on se dissimule son impuissance. On se croit toujours capable, alors même qu'il est évident que l'on ne l'est plus ; et cependant tout souffre, tout languit, la religion se perd, Je ne veux point que mon diocèse éprouve ce malheur ; je veux donner ma démission et me retirer, le jour même où je ne pourrai plus suffire a aux devoirs de ma place. Ce jour, je ne le discernerai pas moi-même ; mais, en vous associant à mon administration, je charge votre conscience du devoir de me le faire connaître. Si vous ne me le disiez pas, vous seriez responsable, devant Dieu, de tout le mal que je ferai, faute d'avoir été averti. » 

  23. Ainsi les Bordelais, qui l'avaient salué de leurs vives acclamations, quand il reparut parmi eux, revêtu de la pourpre romaine, virent, quatre mois après, son cercueil traverser les mêmes rues au milieu des chants lugubres de l'Eglise et de l'expression profonde de la douleur universelle.

[modifier] Source partielle

« Jean Lefebvre de Cheverus », dans Louis-Gabriel Michaud, Biographie universelle ancienne et moderne : histoire par ordre alphabétique de la vie publique et privée de tous les hommes avec la collaboration de plus de 300 savants et littérateurs français ou étrangers, 2e édition, 1843-1865 [détail édition]

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