Histoire du droit
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L'histoire du droit est une section de l'histoire qui est également utile aux praticiens du droit.
Pour les juristes, l'histoire du droit vise surtout à développer des connaissances sur le développement des normes actuellement en vigueur, et donc à faciliter leur compréhension et leur portée, par la connaissance de l'esprit de la loi.
Pour les historiens, en revanche, l'histoire du droit s'intègre à un objectif plus large de connaissance des sociétés anciennes. Le droit paraît être un bon indice des normes qui structurent une société en un temps donné dans la mesure où il tend à régler une large part des interactions entre les individus au sein d'une société, mais aussi de différents groupes sociaux ou de différents États entre eux.
On peut distinguer plusieurs objets d'études pour l'histoire du droit, auxquels correspondent différents types de sources et différentes approches historiques.
Sommaire |
[modifier] Les coutumes, les codes et les institutions
L'approche la plus triviale de l'histoire du droit consiste à étudier les formes explicites de celui-ci. Il s'agit principalement d'établir et d'étudier les textes exprimant les normes juridiques : codes (tel le Code de Justinien), coutumes, recueils de lois (registres). Ces textes peuvent recouvrir des réalités matérielles très diverses selon la période considérée : les lois n'ont pas toujours eu l'organisation abstraite et la formulation générale qu'elles ont aujourd'hui. Les textes juridiques sont parfois des recueils de traditions orales (coutume de Beauvais). En outre, les lois peuvent être intégrées à des textes d'autres natures, religieuse par exemple ; ainsi les livres de l'Ancien Testament consacrés aux prescriptions juridiques (Nombres, Deutéronome) sont-ils mêlés à des récits mythiques sur les origines de l'homme et à des livres prophétiques.
À partir des textes, l'historien du droit peut chercher à décrire et analyser, lorsqu'elles existent, les institutions chargées d'appliquer les normes exprimées. Ces institutions sont alors envisagées selon leur fonctionnement théorique et non pas selon leur pratique effective.
Cette approche présente un intérêt évident pour la connaissance des sociétés anciennes. Il faut pourtant se garder de considérer les textes juridiques comme des normes strictement observées et connues de tous.
[modifier] Les doctrines et les théories du droit
L'historien du droit dispose également de textes réflexifs sur la notion même de droit ou de justice. Il peut alors étudier les écoles juridiques (e.g. droit naturel, réformateurs du droit pénal au XVIIIe siècle) concurrentes et leurs sources philosophiques.
[modifier] XVIe et XVIIe siècles
La langue employée pour le droit est un élément très important. Le latin est resté pendant très longtemps la langue du droit. L'apparition de formes nationales de droit en Europe est liée à l'unification politique et culturelle de ces pays. Le français, par exemple, était encore très peu parlé avant la Renaissance, et même relativement peu encore à la veille de la Révolution. L'édit de Villers-Cotterêts (1539) consacra cette langue comme langue du droit et de l'administration en France (voir langue officielle).
Les efforts de codification des lois s'accompagnent souvent de commentaires explicatifs ou pédagogiques. C'est ce que l'on appelle aujourd'hui la doctrine. Dans certaines circonstances, le commentaire des textes prend une importance considérable, au point de se substituer aux codes eux-mêmes pour la pratique du droit. Ainsi, l'ordonnance de 1673 sur le commerce de terre (France, Louis XIV), qui fonde le code du commerce, est-elle accompagnée d'un ouvrage qui l'explique, l'interprète, voire la complète (Jacques Savary, Le parfait négociant).
Vers la même époque, le développement des échanges maritimes et l'expansion économique des États du nord de l'Europe poussèrent à l'élaboration des premières formes de droit international, avec Hugo Grotius.
[modifier] Lumières, Révolutions française et américaine
Le siècle des Lumières vit une réflexion importante s'opérer sur le droit naturel et la notion de citoyenneté. Les premiers tâtonnements en Europe sur les questions de constitution apparurent avec Sieyès. Ce dernier avait en effet pour ambition, avec la constitution de l'an III (1795) de mettre en place une jurie constitutionnaire, ce qui fut le premier projet d'un contrôle étendu de la constitutionnalité des actes des organes de l'État.
Toujours en France, l'unification du droit français, déjà amorcée par Louis XIV avec l'édit de Saint-Germain-en-Laye (1679) se poursuivit avec le droit civil et le droit pénal. Le fameux code Napoléon, en réalité entièrement préparé par Cambacérès, est l'illustration de l'effort de codification déjà entamé par Louis XIV. La spécificité du code civil français a été sa procédure de validation.
Les pères de l'indépendance américaine fondèrent les États-Unis sur des questions de taxation, et développèrent un droit très sophistiqué sur les brevets et la propriété intellectuelle (Thomas Jefferson), qui reste une composante très forte de la culture économique aux États-Unis. C'est aux États-Unis que l'on trouve les réflexions les plus poussées sur le droit de la propriété intellectuelle et le droit des affaires, notamment en matière de secret des affaires. Une grande part des négociations actuelles à l'OMC repose sur ces enjeux.
C'est à cette époque que s'opère la séparation entre les deux principaux systèmes juridiques dans le monde :
- le droit civil (système juridique)
- la Common law, dans le monde anglo-saxon.
L'Islam conserve un droit religieux, tandis que le droit coutumier n'existe plus que dans deux Etats.
[modifier] Époque contemporaine
Ce n'est que tardivement que s'opère une distinction claire entre doctrine et jurisprudence, de sorte que les ouvrages de commentaires sont souvent aussi des recueils de décisions jugées spécialement intéressantes. Ces documents constituent une première manière d'approcher la pratique effective du droit.
L'apparition du droit positif au XXe siècle sous l'influence du positivisme, avec la théorie du normativisme de Hans Kelsen introduisant la notion de hiérarchie des normes, est aussi une étape très importante dans l'évolution du droit.
Depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, la multiplication des lois, l'intrication en Europe entre le droit communautaire et les droits nationaux engendrent des problèmes de sécurité juridique (notion de sûreté en droit naturel), qui ont fait l'objet de deux rapports du Conseil d'État.
[modifier] Les procédures et les pratiques
Au moins depuis le Moyen Âge, pour l'Europe, les institutions chargées d'appliquer le droit ont gardé des traces écrites de leur activité. L'objectif de ces documents écrits n'était pas au premier chef de renseigner les futurs historiens du droit, mais plutôt d'assurer la pérennité et l'authenticité — dans certains cas la publicité — des décisions prises. Les archives des juridictions sont, comme toutes archives pour un historien, une source très importante pour les historiens du droit.
La première approche mise en œuvre consiste à comparer les textes juridiques avec leur application effective dans les juridictions. La pratique des juridictions et les textes qu'elles ont laissés permettent aussi de connaître les conceptions du droit et de la justice chez les praticiens du droit : outre la référence au texte de loi ou à la coutume appliquée (parfois en concurrence avec une autre), les attendus sont parfois suivis de l'explication de la décision eu égard au cas particulier que chaque jugement représente. Il est encore possible de traiter ces sources selon une approche quantitative. On examinera par exemple la fréquence des contentieux, la nature des litiges ou la durée des procédures.
Les archives des juridictions permettent enfin de connaître les procédures utilisées et le fonctionnement des tribunaux. On peut ainsi étudier les modalités de financement des institutions judiciaires ou la part respective de l'écrit et de l'oral dans les procédures. Le statut, la nature et les moyens de la preuve sont un thème central dans l'histoire tant du droit civil que du droit pénal. Les documents relatant les procès (minutes des procès conservés au greffe, mémoires, etc.) constituent une source centrale pour leur étude.
[modifier] Les acteurs, les justiciables, les auxiliaires de la justice
Les archives des juridictions permettent d'approcher l'histoire du droit avec les outils de l'histoire sociale. Les études peuvent porter sur la formation ou l'origine sociale des juges et des auxiliaires de justice (avocats, notaires, huissiers de justice, arbitres, etc.) comme sur celles des justiciables. De nombreux historiens (A. Farge, F. Chauvaud, B. Garnot) notamment en France, ont choisi les sources judiciaires pour mieux connaître des groupes sociaux dont elles sont les seules traces écrites.
Au sens strict, l'histoire du droit pourrait ne recouvrir que les deux premières approches mentionnées (Carbasse). Aujourd'hui encore, les décisions judiciaires nourrissent le droit par le biais de la jurisprudence.
Les historiens (C. Ginzburg, S. Cerutti) cherchent à se distancer d'une approche téléologique du droit qui restituerait une progression continue vers sa conception actuelle. Ils insistent alors sur le caractère réversible des évolutions constatées sur la longue durée, et sur l'aspect construit des choix entre des modes concurrents d'exercice de la justice. Dans cette perspective, la prise en compte de l'application effective du droit est un élément essentiel de l'histoire de celui-ci.
[modifier] Voir aussi
[modifier] Liens externes
- Histoire du droit des obligations.
- Recueil des sources du droit romain par Yves Lassard et Alexandr Koptev.
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