Thérésa Tallien
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Juana Maria Ignazia Teresa Cabarrus, dite Madame Tallien et surnommée Notre-Dame de Thermidor, née le 31 juillet 1773 au château de Carabanchel de Arriba, près de Madrid, et morte le 15 janvier 1835 au château de Chimay, dans le Hainaut, femme d'esprit et Merveilleuse du Directoire, avec Joséphine de Beauharnais, Fortunée Hamelin et Juliette Récamier.
La famille Cabarrus serait originaire de la Navarre espagnole et vint au début du XVIIe siècle se fixer à Capbreton. Par son dynamisme dans le commerce elle devait acquérir une grande fortune. Thérésa (ou Thérésia) Cabarrus était la fille du financier François Cabarrus, né à Bayonne le 15 octobre 1752, mort à Séville le 17 août 1810, fondateur de la banque San Carlos (ancêtre de la Banque centrale espagnole) en 1782, ministre des Finances de Joseph Bonaparte et de Ferdinand VII de Bourbon, anobli en 1789 par Charles IV d'Espagne avec le titre de comte. Sa mère était Antonie Galabert, fille d'un industriel français établi en Espagne. Élevée en Espagne, elle fut envoyée à Paris pour parfaire son éducation en 1785. Cette beauté brune épousa en premières noces en 1788 le marquis Jean Jacques Devin de Fontenay, et elle est présentée à la cour de Louis XVI.
Elle s'enthousiasma pour les idées à la mode et participa à la fête de la Fédération. En novembre 1792, en raison de l'inconduite vraie ou supposée de la trop belle Thérésa (elle avait notamment été la maîtresse de Félix Lepeletier de Saint-Fargeau), le divorce fut prononcé entre les deux époux. Elle partit pour Bordeaux, où elle fut arrêtée en 1793 en vertu de la loi des suspects, comme épouse d'émigré.
Tallien, représentant en mission, séduit par sa beauté, la fit libérer et s'installa avec elle. Elle usa de son influence pour protéger tous ceux qu'elle put. Cette liaison d'un conventionnel avec une riche aristocrate fit scandale. Tallien revint à Paris pour se justifier. Thérésa l'y rejoignit et fut à nouveau arrêtée sur ordre du Comité de salut public et enfermée à la prison de la Force, puis à la prison des Carmes, où elle rencontra Joséphine de Beauharnais. Sur le point de passer en jugement, c'est-à-dire à la guillotine, elle lui envoya ce mot : "Je meurs d'appartenir à un lâche." Cette missive détermina Tallien à entrer dans la conjuration contre Robespierre et à s'illustrer le 9-Thermidor à la Convention, où il empêcha l’Incorruptible de prendre la parole.
Libérée, Thérésa fut surnommé Notre-Dame de Thermidor, car la révolution thermidorienne avait sauvé de nombreuses vies.
Ses toilettes extravagantes firent sensation, ne cachant rien de sa beauté, et elle lança la mode néo-grecque. Son salon, dans sa maison des Champs-Elysées, était célèbre. Elle épousa Tallien le 26 décembre 1794 et l'influença grandement dans son parcours politique pendant la Convention thermidorienne, mais l'abandonna bientôt, quand il fut rejeté à la fois par les montagnards et par les modérés, le jugeant dépassé. Après une brève aventure avec le général Hoche, Barras, devenu l'homme fort du nouveau régime, en fit sa maîtresse prétendue. Une caricature de l’Anglais James Gillray, où elle est représentée dansant nue avec Joséphine de Beauharnais devant Barras, à l'hiver 1797, tandis que le général Bonaparte, dans un arrière-fond qui rappelle la campagne d'Égypte, lève discrètement un voile pour apercevoir le tableau, a d'ailleurs été éditée par Hannah Humphrey le 20 février 1805. Dans son château de Grosbois, où Thérésa faisait office de maîtresse de maison, il accueillait Joséphine de Beauharnais, Madame de Mailly, Madame de Chateaurenaud, Cambacérès, Talleyrand, Fouché, Savary, le financier Ouvrard, Choderlos de Laclos, Benjamin Constant, Madame Récamier, le peintre David, mais aussi des filles, dans une ambiance plus grossière qu'élégante.
À l'automne 1798, elle passa de ses bras à ceux du richissime financier Ouvrard, qui l'installa au château du Raincy, qu'il avait loué en 1799. De cette union naquirent trois enfants entre 1800 et 1802, dont le docteur Cabarrus (mort en 1870). Le 28 mai 1800, elle écrivit une lettre à l'ancien député Pierre-Paul Royer-Collard (1763-1845), que le Coup d'État du 18 fructidor an V (4 septembre 1797) avait temporairement éloigné de la politique, dans laquelle elle affirmait être intervenue auprès d'un ministre, dont elle attendait la réponse, et acceptait avec joie l'invitation de son épouse : « ... Je pense qu'elle aura la bonté de ne recevoir que moi... son cœur m'est trop connu pour craindre qu'elle veuille m'exposer à un entretien pénible ce jour là... ». De fait, elle devait craindre qu'on la vît enceinte, alors que son mari était en Egypte et qu'elle vivait avec le banquier Ouvrard.
Le coup d'État de Brumaire mit un terme à la carrière publique de Thérésa. Elle divorça de Tallien le 8 avril 1802, et se remaria le 9 août 1805 avec François Joseph de Riquet de Caraman, jeune comte de Caraman, puis prince de Chimay, le 22 août 1805, après la mort sans enfant de son oncle en 1804. Le couple recevait de nombreux musiciens, comme Daniel Auber, Rodolphe Kreutzer, Luigi Cherubini, Charles de Bériot ou Maria Malibran, à Paris, puis à Chimay, où Thérésa forma une petite cour. Cherubini composa sa Messe en fa dans ce château . Grossie, elle se transforma en bonne mère de famille, veillant sur les onze enfants nés de ses différentes amours. Elle s'éteignit au château de Chimay le 15 janvier 1835 et fut enterrée avec son dernier époux sous la sacristie de l'église locale.
Parlant de madame Tallien dans ses mémoires, la Duchesse d'Abrantès évoque sa beauté animée et charmante, cet air qui réunit vivacité française et volupté espagnole.
Madame Tallien a été représentée en tableau par le peintre Gérard, telle une déesse antique, couronnée de fleurs dans un décor théâtral.
Thérésa avait deux frères, Domingo-Vicente et Francisco. Son fils, Jules Tallien de Cabarrus (fils naturel du banquier Ouvrard) épousa Adèle de Lesseps, soeur aînée de Ferdinand de Lesseps et fille de Mathieu de Lesseps, alors consul général de France à Philadelphie. Joseph de Riquet, premier fils de son union avec François-Joseph-Philippe (1808-1865), devint à le dix-septième prince de Chimay en 1843, les deux autres étant Michel Gabriel Alphonse Ferdinand (1810-1886) et Maria Auguste Louise Thérèse Valentine (1815-1876).
