Emil Racoviţă

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Emil G. Racoviţă (souvent écrit Émile Gustave Racovitza) est né le 15 novembre 1868 à Iassy en Roumanie, dans une famille de Moldaves passionnés de musique et de poésie. Il est le père de la biospéléologie ou biospéléologie.

Sa formation intellectuelle a été favorisée par le contact avec des personnalités culturelles de l'époque. La rencontre avec Grigore Cobalcescu, un grand naturaliste roumain, a été également décisive, car celui-ci lui a inculqué pendant le lycée l'amour des sciences naturelles et de l'évolutionnisme. Plus tard, en signe de reconnaissance, Racovita donnera le nom de son professeur à une île près du Pôle Sud.

Après le baccalauréat (1886), Emil Racovita a poursuivi ses études à Paris et en 1889 il a obtenu la licence en droit. Il n'exercera jamais dans le domaine de la justice, car il se consacrera entièrement à l'étude des sciences naturelles qui le passionnaient depuis le lycée.

Celui qui fut son guide pendant une longue période a été le zoologiste et le biologiste Henri de Lacaze-Duthiers (1821-1901), professeur à la Sorbonne et au Muséum national d'histoire naturelle et membre de l'Académie des sciences.

Racovita a passé en 1891 son examen de licence en sciences naturelles, étant le premier classé des candidats de cette session-là. 1891 marque également le début de Racovita dans les publications spécialisées, ainsi que le début de sa spécialisation dans l'étude de la faune marine.

Sa thèse de doctorat de mai 1896, avec le titre "Le lobe céphalique et l'encéphale des annélides polychètes", renforce sa position d'autorité dans ce domaine, position due à des études approfondies et basées sur la méthode historique de recherche. L'ouvrage du jeune roumain est beaucoup apprécié par les milieux scientifiques français en raison de son originalité, de sa vision d'ensemble et de son approche.

Après la fin de ses études, Racovita rentrera dans son pays d'origine pour faire son service militaire.

La renommée internationale dont il jouissait à l'époque le fait remarquer par Henryk Arctowski (1871–1958) qui le recommande à Adrien de Gerlache (1866-1934) en vue de l'expédition polaire belge que ce dernier prépare. Il participe ainsi au premier hivernage antarctique à bord de la Belgica (1897-1899) en compagnie de Adrien de Gerlache, Henryk Arctowski, Roald Amundsen (1872-1928), Frederick Cook (1865-1940), Antoine Dobrowolski (1872-1954), Émile Danco (1869-1898) et Georges Lecointe (1869-1929). L'expédition part vers le Pôle Sud le 18 août 1897 et revient à Anvers le 5 novembre 1899, avec des résultats scientifiques extrêmement riches.

L'expédition du navire Belgica a été l'expression de la témérité humaine qui ne pouvait plus admettre que sur la Terre puissent exister des "tâches blanches". Deux siècles étaient passés depuis que le grand James Cook avait navigué dans les mers du sud, découvert l'Australie et la Nouvelle Guinée et révélé le premier au monde le continent du sud extrême. Lors de la préparation de l'expédition, il existait peu d'informations et des indices vagues sur les terres autour du Pôle Sud. "Belgica" a quitté le port d'Anvers le 18 août 1897. Les 19 membres de l'expédition étaient de Belgique, Norvège, Pologne, USA et Roumanie. Le plus âgé avait 32 ans.

Se référant au choix de Racovita comme zoologiste de l'expédition, le médecin du navire Frédérik Cook écrivait après le retour de l'expédition : Des efforts extraordinaires ont été faits pour avoir un zoologiste compétent, qui ait les qualités nécessaires à un explorateur polaire. Ce fut une des plus grandes difficultés. On en a cherché en vain en Belgique et en France et on a trouvé finalement Racovita, qui avait été recommandé à Gerlache par son maître Lacraze-Duthiers et par Eduard von Beneden, membre de la commission "Belgica", qui connaissait ses qualités exceptionnelles et lui faisait totalement confiance. Mais Racovitza faisait son service militaire et on craignait que les interventions diplomatiques nécessaires pour sa permission eurent été trop lentes. Heureusement, il a été libéré et il a pu ainsi se joindre la famille croissante des pionniers.

Inquiet d'arriver au point d'où commençait l'expédition proprement dite, Racovita est parti avant le départ du navire "Belgica", voyageant de Rio de Janeiro jusqu'à Punta Arenas avec un navire plus rapide. Ici, dans l'attente du navire de l'expédition, Racovita fait un court voyage de trois semaines par la cordillère des Andes et la Pampa sud-américaine. À cette occasion, il a recueilli des observations intéressantes sur la faune et la flore de la région.

"Belgica" se dirige enfin vers le sud et après une dernière escale d'approvisionnement le navire pénètre le 13 décembre dans la zone antarctique où il restera environ 15 mois. Il dut affronter les icebergs, les tempêtes terribles du sud. Il découvre des côtes, des golfes, des îles jamais explorés et qui seront inscrits pour la première fois sur les cartes. En signe de respect pour le grand professeur qui a marqué le début de son activité, sur la demande de Racovita et avec l'approbation unanime de l'équipage, l'une des îles a été baptisée : Cobalcescu. Après avoir pénétré beaucoup plus vers le sud, "Belgica" fut prise dans une banquise et immobilisée pratiquement dans le désert de glace. À partir du 28 février 1898, elle a hiverné dans la banquise australe, au-delà du parallèle 70, pendant 13 mois. Pendant ce temps, l'équipage s'est occupé des mesurages, de la chasse, de la pêche, a fait des excursions sur la banquise, a étudié la vie des oiseaux et des animaux, a recueilli des observations astronomiques et magnétiques. Après un an d'isolement entre les glaces, quand il n'avaient presque plus de provisions, les membres de l'équipage ont décidé de forcer la sortie à travers les glaces. Ils ont creusé un canal dans la banquise et ont réussi à sortir dans la mer libre. Le 25 mars 1889, "Belgica" était à Punta Arenas et le 5 mai, à Anvers où il a été reçu triomphalement.

Après le retour de cette expédition, Racovita commence à s'affirmer dans le domaine de la science. À Bruxelles en 1899, à Paris, à la Sorbonne, en 1900, et en Roumanie, la même année, il présente devant un grand et enthousiaste auditoire les résultats de ce voyage extraordinaire. Plus de 1 200 exemplaires du monde animal, 400 du monde végétal, des centaines de clichés sont le résultat de ses recherches de 15 mois près du Pôle Sud. Distribués aux chercheurs et aux savants d'Europe, ils ont constitué l'objet de plus de 600 études scientifiques publiées sous les directives d'Emil Racovita.

En 1893, Racovita est élu membre de la Société zoologique de France. Cela a ouvert la série des honneurs qui lui ont été accordées par des institutions scientifiques, sociétés et académies du monde entier. Il fut également nommé président d'honneur de la Société spéléologique de France.

On lui propose de s'établir dans le pays à l'Université de Bucarest, dans l'intention de créer à Constanta un laboratoire d'études maritimes. Bien qu'il l'ait souhaité, Racovita n'a pas pu l'accepter, car il était lié à des promesses antérieures concernant une activité scientifique en France. Il mène une carrière scientifique en France jusqu'en 1920 avant de rentrer en Roumanie ou il enseigne la biologie à la faculté des sciences de l'université de Cluj jusqu'en 1940. Il fonde en 1920 le premier Institut de spéologie. Il préside l'académie de Roumanie à partir de 1926.

Il s'établit à Banyuls-sur-Mer, comme sous-directeur du laboratoire "Arago" et co-directeur de la revue "Archives de zoologie expérimentale et générale", où il restera pendant deux décennies qui ont été extrêmement fructueuses sur le plan scientifique. Racovita déploie son activité aux côtés d'un de ses professeurs les plus appréciés, G. Pruvat. Ils font des études marines sur une barque à voiles et ensuite sur une barque à vapeur "Roland". Ils élargissent leurs recherches dans la Méditerranée de l'ouest, la côte catalane et les îles Baléares. De nombreux hommes de science français participent à ces recherches. Le centre dirigé par Racovita et Pruvat devient un noyau de recherches beaucoup apprécié en Europe.

Lors du voyage effectué le 15 juillet 1904, sur l'île de Majorque, Racovita explore la grotte de Cueva del Drach. Pendant trois jours, il étudie les organismes inférieurs adaptés à la vie des cavernes. L'un de ces organismes (Thyphlocirolana Moraguesi) l'impressionne, car il ressemblait beaucoup aux organismes marins déjà connus. Dorénavant, Racovita se dédiera presque en exclusivité à l'étude des cavernicoles, jetant les bases d'une nouvelle science - la Biospéologie ou biospéléologie.

Il explorera des grottes dans toute l'Europe, accompagné pendant un certain temps par une jeune Française, Hélène Boucard, qu'il épouse en 1907. Les recherches faites avant celles du savant roumain n'attribuaient au milieu souterrain que peu de chances d'existence de la vie. Partant de la découverte du cavernicole dans la grotte de Cueva del Drach, il a cherché à démontrer, et il l'a réussi d'une façon brillante, que la faune des cavernes est beaucoup plus riche et variée que l'on pensait et que son étude peut aboutir à des résultats intéressants.

Après avoir étudié avec Hélène Boucard et avec son collaborateur René Jeannel de nombreuses grottes d'Europe et d'Afrique, en 1907 Racovita commencera la publication de la revue de spécialité "Biospeologica" où il publiera ses observations sur les grottes sous le titre "Énumération des grottes visitées". Il publiera également dans cette revue l'étude "Essai sur les problèmes biospéléologiques", considéré comme "le certificat de naissance" de la biospéléologie.

La fin de la guerre et les appels répétés des autorités roumaines déterminent Racovita à quitter définitivement la France et à revenir dans son pays natal. Il est nommé professeur titulaire à la chaire de biologie de l'Université de Cluj, le 2 février 1920, à l'occasion de l'inauguration de cette institution.

Le 26 avril 1920, une loi décide de la création de l'Institut de spéléologie de Cluj, le premier du genre au monde. Emil Racovita est nommé directeur à vie de cet institut.

Racovita a également participé à des expéditions spéléologiques, notamment dans les Monts Apuseni dans les Carpates. Rien que dans la période 1920-1927 ont été étudiées et inventoriées 1116 grottes, inconnues en grande partie.

En 1920, il est élu membre titulaire de l'Académie roumaine. De 1926 à 1929 il a été président de l'Académie. Jusqu'en 1940, la vie de Racovita s'écoule riche en événements scientifiques.

Racovita n'a pas été oublié par sa patrie d'adoption, la France, qui l'a apprécié même après son établissement en Roumanie. Il est invité d'honneur à Banyuls-sur-Mer en 1932, lors du cinquantenaire du laboratoire "Arago". Il visite Paris en 1936 où il tient trois conférences à la Sorbonne. De retour à Cluj, il continue son activité jusqu'en 1940, année du Diktat de Vienne, quand Emil Racovita, septuagénaire, est obligé de s'établir à Timisoara. Il rentre en 1945 à Cluj, là où son nom était devenu un symbole de son autorité et probité scientifique. Il a travaillé jusqu'au dernier jour de sa vie, le 19 novembre 1947.

Racovitza est l'auteur notamment d'un Essai sur les problèmes biospéologiques (1907) et de Speology (1927). Jusqu'en 1920, il dirige la revue intitulée Archives de zoologie expérimentale et générale. Il est fondateur de la biospéologie et est considéré comme un des plus grand scientifique roumain.