Le Sophiste
Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Vous avez de Le Sophiste (écrit au environ de 360 avant J.-C.) est un dialogue de Platon traitant de la nature du sophiste, et de celle de l'être. Il décrit la discussion de Théétète, qui tient le rôle de répondant, et de l'Etranger, qui défend la position platonicienne. A noter que cet étranger vient d'Elée, tout comme Parménide, bien qu'il n'en soit pas un disciple. Et comme dans les derniers écrits de Platon, Socrate n'intervient pas, car la discussion ne porte plus vraiment sur la théorie des Idées, qui était la doctrine principale que Platon a attribué à Socrate.
Sommaire |
[modifier] La définition du sophiste
Le point de départ de ce dialogue, qui parle de l'être et du non-être, est curieusement la tentative de définir le sophiste. La méthode à employer est une succession de dichotomies, méthode qui prouve son efficacité pour le pêcheur à la ligne! Le choix du pêcheur n'est pas un hasard, car celui-ci est défini par opposition à la chasse des animaux terrestres. En effet, parmi les hommes qui capturent leur proie, on peut distinguer ceux qui les pêchent et ceux qui les chassent à terre.
Le sophiste lui est un chasseur d'animaux terrestres, les hommes. En poursuivant les dichotomies, on peut aussi dire qu'il chasse les hommes riches, qu'il veut s'enrichir, et qu'il le fait par des discours. Le sophiste est un marchand de discours.
De plus, le sophiste se prétend spécialiste en tout, il contredit tout le monde sur tous les sujets. Or, il est absolument impossible de tout connaître. Par conséquent, il faut en conclure que le sophiste ne parle pas des choses réelles, il ne fait que les imiter. Il crée des illusions et non pas une vraie copie des choses. Le sophiste parle, mais ne parle de rien. Comment est-ce possible?
[modifier] Critique de la thèse de Parménide
Les sophistes arrivent à parler du non-être, puisqu'ils créent des illusions pour tromper les gens riches. Et même l'Etranger y arrive, ne serait-ce qu'en disant qu'il est imprononçable et impensable. Cela semble être une auto-contradiction de dire que le non-être est ceci ou cela. Car on parle de lui comme d'une unité existante, ayant certaines propriétés. Le non-être devrait seulement ne pas être. Or ce n'est pas le cas, puisque les sophistes ou l'Etranger en parlent. La seule solution possible est donc de s'opposer à la thèse de Parménide, pour qui seul l'être est. Même le non-être doit avoir un certain être.
Sans cela en effet, il serait impossible de critiquer les sophistes. On ne pourrait dire qu'ils mentent, puisque le faux étant le non-être, ils ne pourraient rien dire de faux. Pour dire que les sophistes mentent, il faut donc qu'ils puissent parler du non-être, c'est-à-dire de ce qui est faux. Il faut pouvoir dire que ce qui n'existe pas existe, et que ce qui existe n'existe pas.
Les notions d'être et d'un, au centre de la philsophie de Parménide, si elles ne sont pas révisées, nous laisserons impuissants face aux sophistes. Parménide identifie l'être, le tout et l'un. Or l'Etranger remarque que c'est impossible. L'un ne peut pas être le tout sous peine d'être deux, l'un et le tout. Le tout ne peut pas être un s'il a des parties. D'autre part, si l'être est un, alors il n'est pas le tout, et alors le tout n'existe pas. Dans tous les cas, Parménide semble difficile à suivre.
[modifier] La nature de l'être
La question de l'être a souvent été la cause du conflit entre matérialistes, pour qui l'être est le corps, et partisans des Idées, qui non seulement admettent l'existence de l'âme, mais aussi d'entités transcendantes comme la justice ou la sagesse. L'Etranger rejoue le conflit entre Socrate et les sophistes. Il montre le caractère intenable du matérialisme, puis propose une nouvelle conception de l'être: existe ce qui a la puissance soit d'agir, soit de pâtir. Cette thèse va obliger les partisans des formes à faire évoluer leurs positions.
On ne peut plus soutenir que les Idées sont immobiles et séparées. Les formes et les choses corporelles communiquent entre elles. Il y a de l'être dans ce qui est en repos comme dans ce qui est en mouvement. Cela signifie que l'être est à la fois le repos et son contraire, le mouvement. Conclusion de l'Etranger: l'être et le non-être nous mènent tous les deux à la contradiction.
La contradiction cependant ne tient pas longtemps. On aboutit à la contradiction, si l'on pense que tout ce qui est est en mouvement, ce qui supprimerait l'intellect, ou que tout ce qui est est en repos, ce qui supprimerait les corps. Autrement dit, l'être est un mélange de repos et de mouvement.
[modifier] L'apport de la dialectique
La méthode dichotomique, utilisée au début de l'ouvrage, est définie par l'Etranger comme étant la dialectique. Le dialecticien est capable, à partir d'une forme, de distinguer les autres formes qui sont incluses en elle, et de voir comment communiquent les différents genres établis. Or, la notion d'être, qui est mélangée, a besoin du travail de ce dialecticien.
Nous avions les catégories d'être, de repos, et de mouvement. Il faut ajouter le même et l'autre. Ces catégories, qui ne sont pas réductibles aux précédentes ont la propriété d'être homologiques, elles s'appliquent à elles mêmes. Le même se dit toujours du même, et l'autre se dit toujours relativement à un autre.
Commençant par le mouvement, L'Etranger applique les nouvelles catégories aux premières. Le mouvement est autre que le repos et autre que le même. Mais le mouvement participe aussi au même. Par conséquent, relativement à lui-même, le mouvement est le même, relativement au repos, le mouvement est l'autre. De la même façon, le mouvement est le même que l'être, dans son rapport à lui-même, et autre que l'être, dans son rapport au repos. On commence ici à voir la conclusion approcher, pusique l'on a réussi à mettre l'être et le non-être dans la même chose, ce qui était le but de la discussion. Tous les autres genres ont aussi de l'être et du non-être.
Quant à l'être, il est l'autre du non-être. De même, lorsque nous parlons du non-être, nous ne parlons pas de lui en tant que tel, mais en tant que l'autre de l'être. L'Etranger avance même encore un peu (trop?): le non-être existe en tant qu'autre de l'être. Puisque l'autre a de l'être comme toutes les autres catégories, alors l'autre de l'être existe. Le non-être existe. Parménide est réfuté.
[modifier] Retour au problème du discours et du sophiste
Ainsi, tout est mélangé, et l'on ne peut parler que si les choses sont mélangés. Si l'être n'était pas mélangé au non-être, aucun discours ne serait possible. Il reste quand même à vérifier que, si le discours est lui aussi un être, alors le non-être puisse se mélanger au discours, afin d'obtenir le discours faux. Car le sophiste se défendra en disant que le discours ne se mélange pas, et que le faux est impossible.
L'Etranger commence par une analyse linguistique du discours. La phrase est l'association d'un nom et d'un verbe. Le verbe montre l'action effectuée, alors que le nom montre qui fait l'action. Et tout discours, pour en être un, doit porter sur quelque chose. Alors, on peut dire que la phrase fausse est celle qui dit quelque chose d'autre que ce qui est, alors que la vraie dit ce qui est. Mais cette phrase fausse dit réellement quelque chose de ce qui n'est pas. La phrase fausse a donc aussi un être.
Il est enfin possible de définir le sophiste. La tromperie est bel et bien possible, puisque l'on peut tenir des discours faux. Le sophiste va imiter les choses qu'il ne connait pas. Mais le sophiste n'est pas naïf, c'est un imitateur ironique, qui sait qu'il trompe son interlocuteur. Son but ne vise au fond qu'à contredire son opposant.
[modifier] Voir aussi
|
|
