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Extraits commentés de l'Unique et sa propriété - Wikipédia

Extraits commentés de l'Unique et sa propriété

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L'Unique et sa propriété (en allemand Der Einzige und sein Eigentum) est l'ouvrage principal de Max Stirner, philosophe allemand du début du XIXème siècle.


Sommaire

[modifier] Les extraits commentés de l'Unique

(Ce résumé est une ébauche non retravaillée, à prendre avec des pincettes)

La pagination se réfère à l'édition numérique "les classiques des sciences sociales", et plus précisément au fichier sous format Word (.doc), nous vous renvoyons sur leur site : http://classiques.uqac.ca/


[modifier] La critique de l'humanisme, de la religion et du patriotisme

Réfutation de Feuerbach qui pense que « l’homme est pour l’homme l’être suprême. » Stirner lui répond « Je n’ai fondé ma cause sur rien. » La critique de la religion effectuée par ce dernier aboutissait, on s'en souviendra, à anthropologiser la théologie, Dieu et la religion. Stirner s'insurge: on crée ainsi une nouvelle idole, l'Humanité Chez Feuerbach : L'homme se perd d'abord en Dieu. C'est l'homme générique c'est à dire l'espèce humaine toute entière qui est en réalité un Dieu pour l'homme. L'homme est donc fin en soi. Les valeurs traditionnelles sont simplement laïcisées. Elles en deviennent même plus fortes car elles ne sont plus imposées de l'extérieur mais sont inhérentes à l'homme. Stirner pense que l’Humanisme peut donner lieu à un nouveau type d’aliénation

P21 : Il critique d’abord le fait qu’on l’empêche toujours de se défendre soi-même, mais qu’il faille toujours s’habiller du manteau d’un Bien quelconque.

Critique de Dieu : « Dieu ne s'occupe que de sa cause, seulement il est tout dans tout, de sorte que tout est sa cause. Mais nous ne sommes pas tout dans tout et notre cause est bien mince, bien méprisable; aussi devons-nous « servir une cause supérieure ». — Voilà qui est clair : Dieu ne s'inquiète que du sien. Dieu ne s'occupe que de lui-même, ne pense qu'à lui-même et n'a que lui-même en vue; malheur à ce qui contrarie ses desseins. Il ne sert rien de supérieur et ne cherche qu'à se satisfaire. La cause qu'il défend est purement — égoïste! »

Puis critique de l’Humanité : « Et l'Humanité, dont nous devons aussi défendre les intérêts comme les nôtres, quelle cause défend-elle? Celle d'un autre? Une supérieure? Non, L'Humanité ne voit qu'elle-même, l'Humanité n'a d'autre but, que l'Humanité; sa cause, c'est elle-même. Pourvu qu'elle se développe, peu lui importe que les individus et les peuples succombent à son service; elle tire d'eux ce qu'elle en peut tirer, et lorsqu'ils ont accompli la tâche qu'elle réclamait d'eux, elle les jette en guise de remerciement dans la hotte de l'histoire. La cause que défend l'Humanité n'est-elle pas purement — égoïste ? »

Critique du patriotisme. La patrie ce n’est pas moi.

Attaque de la morale : « Ma cause, dites-vous, devrait au moins être la «bonne cause»? Qu'est-ce qui est bon, qu'est-ce qui est mauvais? Je suis moi-même ma cause, et je ne suis ni bon ni mauvais, ce ne sont là pour moi que des mots. »

P13 : « Nos athées sont de pieuses gens. » Thème de l’égoïste : p22 : « Ces illustres exemples ne vous suggèrent-ils rien? Ne vous invitent-ils pas à penser que l'Égoïste pourrait bien avoir raison? Pour ma part, j'y vois une leçon; au lieu de continuer à servir avec désintéressement ces grands égoïstes, je serai plutôt moi-même l'Égoïste. »

[modifier] L'homme selon Max Stirner

L’enfance : Dès la naissance apparaît le conflit entre l’individu et la nature, et entre l’individu et les autres. « la lutte pour l'autonomie et la suprématie est inévitable » Stirner met en avant la curiosité de l’enfant, qui est comme l’exercice de son individualisation, le test de sa force par rapport aux autorités. D’abord, l’enfant répond au principe de plaisir. Puis, à l’adolescence, il découvre l’Esprit : P25 : « Le jeune homme ne s’attache plus aux choses, mais cherche à saisir les pensées que ces choses recèlent; ainsi, par exemple, il cesse d'accumuler pèle-mêle dans sa tête les faits et les dates de l'histoire, pour s'efforcer d'en pénétrer l’esprit. » P26 : Nous nous mettons non plus à craindre le châtiment paternel, mais notre propre conscience. (Surmoi ?) Mais le jeune homme se trouve limité dans cette spiritualité : P27 :« Tout esprit que je suis, je ne suis pas esprit parfait, et je dois commencer par rechercher cet esprit parfait » On est alors engagé à s’agenouiller devant le « Saint Esprit ».

L’homme fait dépasse cette idéalité, il ne cherche plus à tordre le monde selon la forme de l’Esprit. Il suit son intérêt. P28 : « Comparez donc l'homme fait au jeune homme. Ne vous paraît-il pas plus âpre, plus égoïste, moins généreux? Sans doute! Est-il pour cela plus mauvais? Non, n'est-ce pas? Il est simplement devenu plus positif, ou, comme vous dites aussi, plus « pratique ». Le grand point est qu'il fait de soi le centre de tout plus résolument que ne le fait le jeune homme, distrait par un tas de choses qui ne sont pas lui : Dieu, la Patrie, et autres prétextes à « enthousiasme ». L'homme ainsi se découvre lui-même une seconde fois. Le jeune homme avait aperçu sa spiritualité, et s'était ensuite égaré à la poursuite de l'Esprit universel et parfait, du Saint-Esprit, de l'Homme, de l'Humanité, bref de tous les Idéaux. L'homme se ressaisit et retrouve son esprit incarné en lui, fait chair et devenu quelqu'un. » « Aujourd'hui, je détruis ces incarnations mensongères, je rentre en possession de mes pensées, et je dis : Moi seul ai un corps et suis quelqu'un. Je ne vois plus dans le monde que ce qu'il est pour moi; il est à moi, il est ma propriété. Je rapporte tout à moi. Naguère, j'étais esprit, et le monde était à mes yeux digne seulement de mon mépris; aujourd'hui, je suis Moi, je suis propriétaire, et je repousse ces esprits ou ces idées dont j'ai mesuré la vanité. Tout cela n'a pas plus de pouvoir sur Moi qu'aucune « puissance de la terre » n'en a sur l'Esprit. »

[modifier] Les anciens et les modernes

Les anciens, en fait, c’est l’enfance de l’humanité. Les anciens fouillèrent ce qui se cachait derrière la vérité. Le Christ : Le révolutionnaire qui déclencha le modernisme, c’était le Christ. Le Christ est l’homme moderne. Les anciens croyaient en la vérité du monde, alors que les chrétiens se considéraient comme « un étranger sur la terre ». P32 : Les anciens croyaient au naturel, les modernes au spirituel.

La rupture : Elle commence avec les sophistes : P32 : « Ils reconnaissent donc dans l'esprit la véritable arme de l'homme contre le monde » « , mais ils sont encore bien loin de sanctifier l'esprit, car ce dernier n'est pour eux qu'une arme, un moyen, ce que sont pour les enfants la ruse et l'audace » Socrate : Socrate opère le changement radical, en affirmant qu’il ne faut pas former que son esprit, mais aussi son cœur. P33 : « Aussi Socrate déclare-t-il qu'il ne suffit pas d'employer en toutes circonstances son intelligence, mais que la question est de savoir à quel but il sied de l’appliquer. Nous dirions aujourd'hui que ce but doit être le « Bien »: mais poursuivre le bien, c'est être — moral : Socrate est donc le fondateur de l’éthique. » Socrate prône l’éducation du cœur et franchit un nouveau cap vers la spiritualisation. Le cœur étant passionnel, voire viscéral, il faut l’éduquer. Pour se libérer définitivement des antiques forces, il a fallu les expulser du cœur (vaincre les passions en fait.)

Les Sceptiques : Ils consacrèrent cette rupture d’avec la nature : P33 : « Avec Socrate commence l'examen du cœur, et tout son contenu va être passé au crible. Les derniers, les suprêmes efforts des Anciens aboutirent à rejeter du cœur tout son contenu, et à le laisser battre à vide : ce fut l'œuvre des SCEPTIQUES. » « Le résultat de la culture sophistique fut que l'intelligence ne se laisse plus arrêter par rien, celui de l'éducation sceptique, que le cœur ne se laisse plus émouvoir par rien. »

L’homme en quète d’esprit : P35 : Pour l’homme en quête d’esprit : « Toute sa vie tient dans ses rapports avec le spirituel : il pense, et le reste n'est rien; quelque direction que prenne son activité dans le domaine de l'esprit, prière, contemplation ou spéculation philosophique, toujours ses efforts se réalisent sous la forme d'une pensée. Aussi Descartes, lorsqu'il fut parvenu à la parfaite conscience de cette vérité, pouvait-il s'écrier : « Je pense, c'est-à-dire je suis ». Cela signifie que c'est ma pensée qui est mon être et ma vie, que je n’ai d'autre vie que ma vie spirituelle, que je n’ai d’autre existence que mon existence en tant qu’esprit, ou, enfin, que je suis absolument esprit et rien qu'esprit. »

P38 : B) Les Modernes. La vérité de l’Esprit (les modernes), prend le pas sur celle du monde (la nature des Anciens). P38 : « Nous avons dit plus haut que « pour les Anciens le monde était une vérité ; nous pouvons dire maintenant : Pour les Modernes, l'Esprit était une « vérité », mais à condition d'ajouter, comme précédemment, « une vérité derrière la fausseté de laquelle ils cherchèrent et finalement parvinrent à pénétrer ». »

La réforme protestante : toujours pire et plus ascétique.

Le cœur chrétien s’est ainsi atrophié : P39 : « Il n'est capable ni d'amitié ni d'amour. Et que pourrait-il aimer chez les hommes? Tous sont des « égoïstes », nul n'est vraiment l'Homme, le pur esprit; le Chrétien n'aime que l'esprit, mais où est-il le pur esprit? » « Aimer l'homme corporel, en chair et en os, ne serait plus un amour « spirituel », ce serait une trahison envers l'amour « pur », « l'intérêt théorique ». » « Les hommes comme vous et moi ne fournissent à l'amour pur, à la pure théorie, qu'un sujet de critique, de raillerie et de radical mépris; ils ne sont pour lui, comme pour les prêtres fanatiques, que de l' « ordure » et pis encore »

L’esprit multiplie les plans de rédemption : L’esprit croit planer au dessus des choses. Mais il y reste en fait lié, et il multiplie donc les plans de rédemption…

P40 : Analogie Théologie-Humanisme : « Nous verrons par la suite que les plus récentes révoltes contre Dieu ne sont elles-mêmes que les dernières convulsions de cette « théologie », ce sont des insurrections théologiques. »

[modifier] L’Esprit

L’esprit enchaîné au monde : L’Esprit se voulant parfait, mais ne l’étant pas sur terre, il n’est pas libre, il est enchaîné au monde par ses imperfections. P41 : « Comme l'extravagant ne vit et ne possède son monde que dans les figures fantastiques que crée son imagination, comme le fou engendre son propre monde de rêves, sans lequel il ne serait pas fou, ainsi l'esprit doit créer son monde de fantômes, et, tant qu'il ne l'a pas créé, il n'est pas Esprit » « Qu'est-ce donc que l'Esprit? L'Esprit est le créateur d'un monde spirituel (…)Ainsi donc, l'Esprit n'existe que lorsqu'il crée du spirituel, et son existence résulte de son union avec le spirituel, sa création. »

P42 : Plus de corps, juste un esprit : On nous fait croire que nous sommes Esprits et non corps en nous soutenant que le corps ne sert que de réceptacle à notre esprit. Les athées n’arrivent pas à sortir de cette théologie : Ils sont contre l’égoïsme, alors que l’égoïsme est tout ce à quoi aspire l’individu. P42 : « De graves doutes se sont élevés au cours des temps contre les dogmes chrétiens et t'ont dépouillé de ta foi en l'immortalité de ton esprit. Mais un dogme est resté debout : tu es toujours fermement convaincu que l'Esprit est ce qu'il y a de meilleur en toi et que le spirituel doit primer en toi tout le reste. Quel que soit ton athéisme, tu communies avec les croyants en l'immortalité dans leur zèle contre l'Égoïsme. » « Qu'entends-tu donc par un égoïste? Celui qui, au lieu de vivre pour une idée, c'est-à-dire pour quelque chose de spirituel, et de sacrifier à cette idée son intérêt personnel, sert au contraire ce dernier » L’Egoïste ne vit pas pour une idée, il vit pour lui-même, pour ses intérêts personnels.

P43 : Pour celui qui aspire toujours à l’Esprit : Comme on sait qu’on contient toujours du non-Esprit, on applaudit l’autre qui est tout-esprit, et cet autre, on l’appelle Dieu.

Critique de Feuerbach : « Ce Dieu, qui est esprit, Feuerbach l'appelle « notre essence ». Pouvons-nous accepter cette opposition entre « notre essence » et nous, et admettre notre division en un moi essentiel et un moi non essentiel? Ne sommes-nous pas ainsi de nouveau condamnés à nous voir misérablement bannis de nous-mêmes ? » P44 : Citation de Feuerbach : « L'être de l'homme est pour l'homme l'être suprême. Cet être suprême, la religion l'appelle Dieu et en fait un être objectif; mais il n'est, en réalité, que le propre être de l'homme ; et nous sommes à un tournant de l'histoire du monde, parce que désormais pour l'homme ce n'est plus Dieu, mais l'Homme qui incarne la divinité. »

Feuerbach ne détruit pas le sentiment chrétien, il essaye de faire descendre le ciel sur terre : En faisant cela, il nous rend l’aliénation encore plus insupportable : « [(L’Esprit] habite le ciel et habite en nous, nous ne sommes que sa « demeure ». Si Feuerbach détruit sa demeure céleste et le force à venir s’installer chez nous avec armes et bagages, nous serons, nous, son terrestre logis, singulièrement encombrés. »

P45 : §2 – Les Possédés : Sur les revenants et leur lien avec l’Esprit, Dieu… : Si on cesse de croire aux revenants, on a tôt fait de cesser de croire aux Esprits en général. P45 : « As-tu déjà vu un Esprit ? — Moi? non, mais ma grand-mère en a vu. — C'est comme moi : je n'en ai jamais vu, mais ma grand-mère en avait qui lui couraient sans cesse dans les jambes ; et, par respect pour le témoignage de nos grands-mères, nous croyons à l'existence des esprits. Mais n'avions-nous pas aussi des grands-pères, et ne haussaient-ils pas les épaules chaque fois que nos grands-mères entamaient leurs histoires de revenants? Hélas! oui, c'étaient des incrédules et ils ont fait grand tort à notre bonne religion, tous ces philosophes. ! Nous le verrons bien par la suite ! Qu'y a-t-il au fond de cette foi profonde dans les revenants, sinon la foi dans l'existence d'êtres spirituels en général ? Et la seconde ne serait-elle pas déplorablement ébranlée, s'il était établi que tout homme qui pense doit hausser les épaules devant la première? » P46 : « Depuis que l'Esprit a paru dans le monde, depuis que « le Verbe s'est fait chair », ce monde spiritualisé et livré aux enchantements n'est plus qu'une maison hantée. »

Critique du « sacré » : Le sacré se glisse partout, et il ne suffit pas de le nommer réel pour qu’il n’entrave pas mon égoïsme, pour qu’il ne me demande pas de sacrifice : Par exemple la « vérité » : « La vérité est sacrée et éternelle ! Mais toi, qui t'emplis de cette sainteté et en fais ton guide, tu seras toi-même sanctifié. Le Sacré ne se manifeste jamais à tes sens, ce n'est jamais comme être matériel que tu en découvres la trace ; il ne se révèle qu'à ta foi, ou plus exactement à ton Esprit, car il est lui-même quelque chose de spirituel, un Esprit ; il est Esprit pour l'Esprit. La notion de sainteté ne se laisse pas extirper aussi facilement que beaucoup semblent le croire, qui se refusent à employer encore ce mot « impropre ». À quelque point de vue qu’on se place pour m'accuser d’égoïsme, ce reproche sous-entend toujours que l’on a en vue quelque chose d'autre que moi, que je devrais servir de préférence à moi-même, que je devrais estimer plus important que tout le reste, bref, quelque chose en quoi je devrais chercher mon véritable salut, c'est-à-dire quelque chose de « saint », de « sacré ». »

Les égoïstes involontaires : Il y a des égoïstes qui n’arrivent pas à ne pas l’être, et qui verse dans le sacré pour fuir leur égoïsme. P47 : « Rien n'est sacré que pour l'Égoïste qui ne se rend pas compte de son égoïsme, pour l'Égoïste involontaire. » « Tous ses soins, toutes ses peines pour s'affranchir de son moi ne sont qu'un effort mal compris pour affranchir son moi. »

Ces égoïstes involontaires s’aliènent leur propre dépassement : Ce n’est pas tant qu’on ne peut pas évoluer, c’est qu’en consacrant ses progrès dans quelque chose d’extérieur, on se les rend à soi-même extérieur : P47 : « à chaque minute de ton existence, une nouvelle minute de l'avenir te fait signe et t'appelle ; en te développant, tu te dégages « de toi », de ton moi actuel. Ce que tu es à chaque instant est ton œuvre, et tu dois à cette œuvre de ne pas te perdre, toi, son auteur. Tu es toi-même un être supérieur à ce que tu es, tu te dépasses toi-même. Mais ce fait que tu es supérieur à toi, que tu n'es pas seulement une créature, mais en même temps ton créateur, t'échappe en ta qualité d'Égoïste involontaire, et c'est pourquoi l' « être supérieur » reste pour toi un étranger. Tout être supérieur, Vérité, Humanité, etc., est un être au-dessus de nous. » Tu deviens un « possédé »

Critique de l’humanisme à partir de là : P48 : « À côté d'un individu humain, l'« Homme » n'est-il pas un être supérieur ? Et les Vérités, les Droits, les Idées qui découlent de son concept ne doivent-ils pas, comme révélations de ce concept, être respectés et tenus pour — sacrés ? » L’Homme devenant quelque chose de sacré, il nous empêche à nous de devenir nous-même. P49 : il ajoute : « Que votre être suprême soit le Dieu unique en trois personnes, le Dieu de Luther, l' « Être suprême * » du Déiste, ou qu'il ne soit nullement Dieu mais l’ « Homme », c'est tout un pour qui nie l'être suprême lui-même : Vous tous qui servez un Être suprême quel qu'il soit, vous n'êtes que des — gens pieux, l'athée le plus frénétique comme le plus fervent chrétien. »

Vanité et religion : Le monde est Vanité, celui qui ne l’accepte pas (le religieux), part à la recherche de la vérité derrière cette Vanité. P49 : « Derrière le monde existant, ils cherchèrent la « chose en soi », l'être, l'essence ; derrière la chose, ils cherchèrent la non-chose »

Le Christ, premier « Humaniste » : P50 : « C'est le Christ qui mit en lumière cette vérité que le véritable Esprit, le fantôme par excellence, est — l'Homme. L'esprit fait chair, c'est l'Homme » Comme il peut y avoir de « mauvais esprits », l’Homme se martyrise de pouvoir le posséder en soi.

LA MAROTTE : P52 : L’humanité entière est rendue folle par le besoin d’un infini, d’un idéal. Ces « Esprits » sont comme des « idées fixes ». « ces fous de grande envergure ont encore cette ressemblance avec les pauvres gens dûment déclarés fous qu'ils se ruent haineusement sur quiconque touche à leur marotte »

P54 : Critique de Proudhon qui dit : « Les hommes sont destinés à vivre sans religion, mais la morale est éternelle et absolue; qui oserait aujourd’hui attaquer la morale ? » Or pour Stirner, la morale, par exemple par rapport à l’inceste ne vaut pas grand chose : « La croyance morale n'est pas moins fanatique que la religieuse. Et cela s'appelle « liberté de conscience », quand un frère et une sœur sont jetés en prison au nom d'un principe que leur « conscience » avait rejeté ? » Différence de points de vue fondamentale entre ces deux anarchistes. Rappel : Proudhon disait : « Pour rétablir la religion, il faudrait supprimer l’Église. »


P55 : Critique de Feuerbach : « Nous ne disons plus, par exemple, « Dieu est l'amour », mais bien « l'amour est divin »; remplaçons même le prédicat divin par son équivalent « sacré », et nous en sommes toujours à notre point de départ, nous n'avons pas fait un pas. L'amour n'en reste pas moins pour l'homme le Bien, ce qui le divinise, ce qui le rend respectable, sa véritable « humanité », ou, pour nous exprimer plus exactement, l'amour est ce qu'il y a dans l'homme de véritablement humain, et ce qu'il y a en lui d'inhumain, c'est l'égoïsme sans amour. »

P56 : L’esprit libre : On a battu l’obscurantisme en brèche en affirmant que l’intelligence pouvait comprendre les choses divines, et on a vu du religieux partout (cf Hegel). L’esprit est libre, mais moi je suis lié à l’esprit. En enlevant à la religion le primat sur l’Esprit, on a asservi encore plus l’homme, car désormais en nous, l’égoïsme devient encore plus délicat à obtenir. P57 : « Piété et moralité diffèrent en ce que la première reconnaît Dieu et la seconde l'Homme pour législateurs »

L’Opposition légale : Elle est incapable puisque liée encore et toujours à une morale. P58 : « Accordez-moi tout d'un coup que le Bien n'est autre chose que la —Loi, et que Moralité égale Légalité ! (…)Ainsi finalement se complète et s'absolutise la domination de la Loi. « Ce n'est pas moi qui vis, c'est la Loi qui vit en moi. » J'en arrive à n'être plus que le « vaisseau de sa gloire ». » « Voyez-vous ce qui arriverait si l'opposition voulait réellement, si elle voulait de toute l'énergie de sa volonté ? Non, non : qu'elle sacrifie la Volonté à l'Amour, qu'elle renonce à la Liberté — pour les beaux yeux de la Morale. Elle ne doit jamais « réclamer comme un droit » ce qu'il lui est seulement permis de « demander comme une grâce ». » Mais pourtant : P59 : « Où était, chez les « bons », le courage de faire la Révolution, cette Révolution qu'ils vantent et exploitent aujourd'hui, après qu'un autre l'a faite ? Ce courage ils ne pouvaient l'avoir, car toute révolution, toute insurrection est toujours quelque chose d' « immoral », auquel on ne peut se résoudre à moins de cesser d'être « bon » pour devenir « mauvais » ou ni bon ni mauvais »

Interdiction d’être égoïste : P64 : « On doit tirer profit de soi, mais ne pas chercher son, profit. » disent les moralistes. A tel point que pour calomnier quelqu’un, on essaye de montrer qu’il agit « pour lui » et non pour un idéal. Le drame c’est que : « Le désintéressement pullule là où règne la « possession », aussi bien sur les possessions du Diable que sur celles du bon Esprit : là, vice, folie, etc.; ici, résignation, soumission, etc. Où tourner ses regards sans rencontrer quelque victime du renoncement ? » P66 : « Ô Laïs, ô Ninon, que vous eûtes raison de mépriser cette blême sagesse ! Une grisette, libre et joyeuse, pour mille vieilles filles blanchies dans la vertu ! »

Christianisme et lutte contre les passions : P66 : Le Christianisme a voulu qu’on ne soit pas esclave de ses passions, mais pourquoi cette lutte contre les passions, ne pas la mener également contre le christianisme ? « « Nous devons bien posséder un esprit, mais l'Esprit ne doit pas nous posséder. » » D’où l’idée de revenir vers le corps : « Ce n'est cependant que par la « chair » que je puis secouer la tyrannie de l'Esprit, car ce n'est que quand un homme comprend aussi sa chair qu'il se comprend entièrement, et ce n'est que quand il se comprend entièrement qu'il est intelligent ou raisonnable. »

L’éducation ou le formatage : P68 : « il y a une grande différence entre les sentiments ou les pensées que ce qui m'entoure éveille en moi, et les sentiments et les pensées qu'on me fournit tout faits. » « Qui a pu ne pas remarquer ou tout au moins éprouver que toute notre éducation consiste à greffer dans notre cervelle certains sentiments déterminés, au lieu d'y laisser germer au petit bonheur ceux qui y auraient trouvé un sol convenable ? »

P70 : §3 – La Hiérarchie Bizarre histoire de l’humanité : Nègre puis Mongole, proche de la nature (nègre, les anciens) et proche de l’esprit (mongole ou chinois, les modernes, réformateurs, mais qui, réformant, n’arrivent pas à sortir de leur gangue). L’homme civilisé s’occupe de l’Esprit, alors que le Barbare reste enfant, il cherche à subvenir à ses besoins. Les civilisé réduisent les barbares à l’esclavage. P75 : « Tel est le sens de la Hiérarchie : La Hiérarchie est la domination de la pensée, la royauté de l'Esprit. »

P78 : L’égoïsme mal compris : « La victoire des idées n'est complète que lorsqu'elles cessent d'être en contradiction avec les intérêts personnels, c'est-à-dire lorsqu'elles donnent satisfaction à l'égoïsme. » Les gens croient en vouloir au criminel par moralité, en fait, ils lui en veulent parce que s’il n’était pas puni, les voleurs se multiplieraient et ils perdraient leur sécurité. De même, « C'est parce que le vol lui paraît a priori abominable que Proudhon croit flétrir la propriété en disant que « la propriété, c'est le vol ». » « Cela dit, qu'est-ce donc que le « désintéressement »? Être désintéressé, c'est n'avoir qu'un intérêt idéal, devant lequel s'efface toute considération de personne. » La classe bourgeoise a abandonné l’idéal des lumières quand elle a vu ce qu’elle risquait d’y perdre. P81 : « Je ne blâme pas la Bourgeoisie de ne pas s'être laissé détourner de son but par Robespierre et d'avoir pris conseil de son égoïsme pour savoir jusqu'à quel point elle devait s'assimiler les idées révolutionnaires. Mais ceux que l'on pourrait blâmer (si toutefois il peut être question ici de blâmer quelqu'un ou quelque chose), ce sont ceux qui se laissent imposer comme leurs intérêts les intérêts de la classe bourgeoise. Ne finiront-ils pas un jour par comprendre de quel côté est leur avantage ? » P82 : « Leur personne leur semble à eux-mêmes trop mince, trop insignifiante (ce qu'elle est donc, en effet) pour oser prétendre à tout et pouvoir se réaliser entièrement. Ce qui prouve qu'il en est bien ainsi, c'est qu'ils se scindent eux-mêmes en deux personnes, une éternelle et une temporelle, et qu'ils ne favorisent jamais que l'une à l'exclusion de l'autre » P84 : « On se contenta pendant longtemps de l'illusion de posséder la vérité, sans qu'il vînt à l'esprit de personne de se demander sérieusement s'il ne serait peut-être pas nécessaire, avant de posséder la vérité, d'être soi-même vrai. »

P87 : Avec Descartes, triomphe de la raison : « Elle est ainsi parvenue au triomphe de l'Esprit ou de la Raison, et tout est Esprit parce que tout est raisonnable : » « Seuls l'Esprit, la pensée existent. Tel est le principe de la philosophie moderne, et c'est le principe chrétien dans toute sa pureté » P88 : Bacon et Hume ont été disqualifié de la philosophie, car ils ne cherchaient pas à percer un monde intelligible. Les philo. modernes tournent toute à la théologie, mais pas les leurs.

P91 : Le protestantisme : P91 : « Du fait que par le Protestantisme la foi est devenue plus intérieure, la servitude également est devenue plus intérieure » P92 : « C'est cette scission de l'homme en « instincts naturels » et « conscience » (canaille intérieure et police intérieure) qui fait le Protestant. » P93 : Les protestants, austères, ont gagné sur les jésuites plus sensualistes, et en cela, ils ont accompagnés une nouvelle victoire de l’Esprit. P95 : « L'Église protestante, au contraire, tenant le mariage et les liens de la famille pour sacrés, fait abstraction de ce qu'ils ont de mondain et n'y voit rien qui ne puisse convenir à ses prêtres »

P102 : L’agrandissement du territoire de l’Esprit : P102 : (On dirait du Lautréamont ) « Autour de l'autel se dresse une église, et cette église grandit, et ses murailles s'écartent chaque jour davantage. Ce que couvre l'ombre de ses voûtes est — sacré, inaccessible à tes désirs, soustrait à tes atteintes. Le ventre creux, tu rôdes au pied de ces murailles, cherchant pour apaiser ta faim quelques restes de profane, et les cercles de ta course vont sans cesse s'élargissant. Bientôt cette église couvrira la Terre entière, et tu seras refoulé à ses plus lointaines limites; encore un pas, et le monde du sacré a vaincu, tu t'enfonces dans l'abîme. Courage donc, paria, puisqu'il est temps encore ! Cesse d'errer, criant famine, à travers les champs fauchés du profane ; risque tout, et rue-toi à travers les portes au cœur même du sanctuaire ! Si tu consommes le sacré, tu l'auras fait tien ! Digère l'hostie, et tu en es quitte ! »

III) Les Affranchis « Les Affranchis ne sont que des « Modernes », les plus modernes d'entre les modernes »

P103 : §1. Le libéralisme politique Avec l’humanisme : « Ce qu'il y a en nous d'inhumain, d' « égoïste » doit rester confiné dans le cercle inférieur des « affaires privées », et nous distinguons soigneusement l'État de la « société civile », domaine de l' « égoïsme ». » « Le véritable Homme, c'est la Nation ; l'individu, lui, est toujours un égoïste. » La vie privée n’est pas celle du plaisir, elle reste celle du vice. P104 : « Le civisme, c'est l'idée que l'État est tout, qu'il est l'Homme par excellence et que la valeur de l'individu comme homme dérive de sa qualité de citoyen. »

Le droit dominateur : P106 : « La nuit du 4 Août fut la nuit de mort des privilèges (les villes, les communes, les magistratures étaient privilégiées, dotées de privilèges et de droits seigneuriaux), et lorsqu'elle prit fin se leva l'aube du Droit, des droits de l'État, des droits de la Nation. » P107 : « Désormais, tout droit que ne concède pas le Monarque-État est une « usurpation », tout privilège qu'il accorde devient un « droit ». »

La liberté bourgeoise : P110 : « Si c'est le mérite de l'homme qui fait sa liberté (et que manque-t-il à la liberté que réclame le cœur du bon bourgeois ou du fonctionnaire fidèle ?), servir, c'est être libre. Le serviteur obéissant, voilà l'homme libre ! » « Sois ce que tu pourras, un Crésus ou un gueux — l'État bourgeois te laisse le choix —, mais aie de « bonnes opinions »! Ceci, l'État l'exige de toi » P112 : « Pourquoi donc « liberté »? Parce que nul intermédiaire ne s'interpose plus entre moi et l'État, mais que je suis directement en relation avec lui ; parce que je suis citoyen, et non plus sujet d'un autre, cet autre fût-il le roi : ce n'est pas devant la personne royale que je m'incline, mais devant sa qualité de « chef d'État ». » P113 : En n’étant plus un individu s’opposant à l’individu, le « prince constitutionnel » devient la Loi s’opposant à l’individu. L’individu se retrouve face à un Dieu, la Loi… P114 : « Dès que le bourgeois soupçonne qu'il dépend du caprice, du bon plaisir, de la volonté de quelqu'un que n'autorise pas une « puissance supérieure », il brandit son libéralisme et crie à l' « arbitraire ». » Autrement dit, l’égoïsme est encore une fois conspué et on ne lui laisse plus les moyens de s’exprimer. L’Individu est nié.

Sur la liberté de la Presse : P115 : « Ce qui est libéral, c'est-à-dire légal, peut seul être imprimé ; pour le reste, gare aux « délits de presse »! »


§2 – Le libéralisme social Se sentant asservis par des égoïstes, le but premier des libéraux socialistes semble être de conspuer l’égoïsme. La société n’a pas de corps, elle n’est qu’une vue de l’Esprit. P123 : Pour les socialos : « C'est donc ce qu'il a qui fait l'homme. Et, par leur avoir, les hommes sont inégaux. » « Le Socialisme conclut que nul ne doit posséder, de même que le Libéralisme politique concluait que nul ne doit commander. Si pour l'un l'État seul commandait, pour l'autre la Société seule possède. » « la Société communiste se résume dans ce qu'on peut appeler la « gueuserie » générale. » Pour le socialo : « Le gueux est son idéal, et nous devons devenir tous des gueux. » « Tel est le second vol fait à la « personnalité » au profit de l’« humanité ». On ne laisse à l'individu ni le droit de commander ni le droit de posséder : l'État prend l'un, la Société prend l'autre. »

Responsabilité des pauvres : P124 : « c'est bien notre faute s'il y a un État et s'il y a des riches. » Il ne suffit pas d’incriminer la société actuelle et de chercher des boucs-émissaires…

Le primat des « travailleurs » P125 : « tous les travailleurs (dans le sens, naturellement, de producteurs pour la communauté, travailleurs communistes) sont égaux. » Confusion des socialistes entre art et travail « . Dans une fabrique d'épingles, par exemple, l'ouvrier qui ne fabrique que des têtes, ou qui ne fait que passer à la filière le fil de laiton, est ravalé au rang de machine, c'est un forçat et ce ne sera jamais un artiste ; son travail ne saurait l'intéresser et le satisfaire » P127 : les socialos disent que : « Si tu étais un « fainéant », il ne reconnaîtrait pas en toi l'homme, il y verrait un « homme paresseux » à corriger de sa paresse, et à catéchiser pour le convertir à la croyance que le travail est la « destination » et la « vocation » de l'homme. » « La Bourgeoisie rendait la production libre, le Communisme force à la production et n'admet que les producteurs, les artisans. Il ne suffit pas que les professions te soient ouvertes, il faut que tu en pratiques une. » Il faut être un travailleur altruiste, et surtout pas un égoïste.

Les socialistes sont incapables d’être égoïstes et restent, par là, religieux : P128 : « Que la société n'est pas un « moi » capable de donner, de prêter ou de permettre, mais uniquement un moyen, un instrument dont nous nous servons — que nous n'avons aucun devoir social, mais uniquement des intérêts à la poursuite desquels nous faisons servir la société — que nous ne devons à la société aucun sacrifice, mais que si nous sacrifions quelque chose ce n'est jamais qu'à nous-mêmes — ce sont là des choses dont les Socialistes ne peuvent s'aviser : ils sont « libéraux », et, comme tels, imbus d'un principe religieux ; la Société qu'ils rêvent est ce qu'était auparavant l'État : — sacrée ! » De plus, Les socialos prétendent faire travailler tout le monde pour que tout le monde ait des loisirs. Pour cela, elle en appelle à l’altruisme, mais il faut bien comprendre que ces loisirs, eux, relèvent du pur égoïsme.

§3. – Le libéralisme humanitaire (ou Libéralisme critique) (Bauer, Feuerbach…) P131 : Ces « humanitaires » veulent supprimer tout égoïsme, mais leurs buts humanitaires sont également égoïstes, « Mets ton humanité au-dessus de toute spécification limitative, sois par elle un homme sans restriction, un « homme libre »; autrement dit, reconnais dans l'humanité l'essence déterminante de tous tes prédicats » P132 : « Dans la société humaine que nous promet l'Humanitaire. il n'y a évidemment pas de place pour ce que toi et moi avons de « particulier » et rien ne peut plus entrer en ligne de compte qui porte le cachet d' « affaire privée ». Ainsi se complète le cycle du Libéralisme ; son bon principe est l'Homme et la liberté humaine, et son mauvais principe est l'Égoïste et tout ce qui est privé : là est son dieu, ici son diable. »

Une nouvelle formulation de la propriété : Il y a une propriété des pensées qui fait l’Individu. P133 : « Lorsque les Socialistes à leur tour abolissent la propriété, ils négligent de remarquer que cette propriété se perpétue sous forme d'individualité. N'y a-t-il donc point d'autre propriété que l'argent et les biens au soleil ? Chacune de mes pensées, chacune de mes opinions * ne m'est-elle pas également propre, n'est-elle pas mienne ? » Mais l’humanitaire veut supprimer cette propriété là : « Il n'appartient pas à la personne d'avoir des opinions à elle, tout ce qu'elle pourrait avoir en propre doit faire retour à quelque chose de plus général qu'elle : de même que l'État a confisqué la volonté, et que la Société a accaparé la propriété, l'« Homme » à son tour doit totaliser les pensées individuelles et en faire de la pensée humaine, purement et universellement humaine. » « Pour réduire à l'impuissance la volonté et la propriété privées, il faut avant tout dompter l'individualisme ou l’égoïsme. Après cette victoire de principe, étape suprême dans l'évolution de l' « homme libre », on verra les buts d'ordre inférieur, tels que le « bien-être » social des Socialistes, s'évanouir devant la sublime, la radieuse « idée de l'Humanité ». Tout ce qui n'est pas « universellement humain » est un a parte qui ne satisfait que quelques-uns ou un seul, ou qui, s'il satisfait tout le monde, ne satisfait chacun qu'en tant qu'individu et non en tant qu'homme ; autrement dit, tout ce qui n'est pas humanité pure est « égoïsme ». »

Le travail et les humanitaires : P136 : Pour les humanitaires : « Le seul travail qui honore l'homme est le travail humain et conscient, qui n'a pas un but égoïste, mais qui a pour but l'Homme, l'épanouissement des énergies humaines, de telle sorte qu'il permet de dire : laboro, ergo sum, je travaille, donc je suis homme. L'Humanitaire veut le travail de l'Esprit mettant en œuvre toute matière, » Stirner répond à ces Humanitaires que : - Quand un homme fait une découverte, il est naturellement porté à la partager, mais il n’a pas fait cette découverte pour les autres, mais toujours pour Lui-même. « Il travaille donc pour lui-même, pour satisfaire son désir. Que son œuvre se trouve être utile aux autres et même à la postérité, cela n'enlève point à son travail son caractère égoïste. » P137 : « À l'ancien « rendez hommage à Dieu », le Moderne répond « rendez hommage à l'Homme ». Mais mes hommages je compte les garder pour moi. »

Résumé : P140 : « Résumons donc les étapes parcourues par le Libéralisme :

Primo : L'individu n'est pas l'Homme, aussi la personnalité individuelle n'a-t-elle aucune valeur : donc, pas de volonté personnelle, pas d'arbitraire, plus d'ordres ni d'ordonnances ;

Secundo : L'individu n'a rien d'humain, aussi le mien et le tien n'ont-ils aucun fondement dans la réalité : donc, plus de propriété ;

Tertio : Attendu que l'individu n'est pas Homme et n'a rien d'humain, il ne doit être rien du tout ; c'est un égoïste, et la Critique doit supprimer lui et son égoïsme pour faire place à l'Homme, « qui vient seulement d'être découvert ». » P141 : « maintenant l'Homme s'oppose aux hommes, ou, puisque les hommes ne sont pas l'Homme, au non-Homme. » Impossibilité d’être soi : « je n'ai pas pu me trouver tant que je me suis cherché comme Homme »

Eloge de l’égoïsme : « Je veux être tout ce que je puis être, avoir tout ce que je puis avoir. Que les autres soient ou aient quelque chose d'analogue, que m'importe ? Avoir ce que j'ai, être ce que je suis, ils ne le peuvent. Je ne leur fais aucun tort, pas plus que je ne fais de tort au rocher en ayant sur lui le « privilège » du mouvement. S'il pouvait l'avoir, il l'aurait. » « Je ne veux respecter en toi rien, ni le propriétaire, ni le gueux, ni même l'Homme, mais je veux t'employer. » P142 : « J'apprécie que le sel me fait mieux goûter mes aliments, aussi ne me fais-je pas faute d'en user ; je reconnais dans le poisson une nourriture qui me convient, et j'en mange ; j'ai découvert en toi le don d'ensoleiller et d'égayer ma vie, et j'ai fait de toi ma compagne. Il se pourrait aussi que j'étudiasse dans le sel la cristallisation, dans le poisson l'animalité, et chez toi l'humanité, mais tu n'es jamais à mes yeux que ce que tu es pour moi, c'est-à-dire mon objet, et en tant que mon objet, tu es ma propriété » Les critiques contre l’égoïste : P144 :« Je ne suis pas libre tant que je ne me dépouille pas de tout intérêt, et je ne suis pas homme tant que je ne suis pas désintéressé. Soit, mais il m'importe en somme assez peu d'être homme et d'être libre, tandis qu'il m'importe beaucoup de ne laisser échapper sans en profiter aucune occasion de m'affirmer et de me mettre en valeur. »

La critique est contre l’État : En 1842, la critique s’est rendue compte que l’État, ce n’était pas « l’Homme »… Aussi récuse-t-elle l’État à partir de cette date. On peut s’attendre à ce qu’elle récuse aussi la masse, car « Comment, en effet, des « êtres spirituels » de rang inférieur pourraient-ils tenir devant l'Esprit suprême ? L' « Homme » renverse de leur piédestal les idoles fausses. » Ne peut-on y déceler l’élitisme Nietzschéen ? P147 : « Le Critique en arrive à nier toute humanité : parti de cette hypothèse que l'humain est le vrai, il se retourne lui-même contre cette hypothèse en contestant le caractère d'humanité à tout ce à quoi on l'avait jusqu'alors accordé. Il aboutit simplement à prouver que l'humain n'a d'existence que dans sa tête, tandis que l'inhumain est partout. L'inhumain est le réel, le partout existant ; en s'évertuant à démontrer qu'il n'est « pas humain », le Critique ne fait que formuler explicitement cette tautologie que l'inhumain n'est pas humain. »


P152 : Deuxième partie : Moi « Comment pouvez-vous croire que l'Homme-Dieu soit mort aussi longtemps qu'en lui, outre le Dieu, l'Homme ne sera pas mort aussi ? »

P153 : I) La propriété, l’Individualité La liberté : C’est une illusion inaccessible. Elle peut donc nous entraîner vers l’abnégation qui nie notre individualité et empêche d’exprimer notre besoin de propriété. P154 : « il ne te suffit pas d'être « libre », tu dois être plus, tu dois être « propriétaire ». » P155 : « La Liberté n'existe que dans le royaume des songes ! L'Individualité, c'est-à-dire ma propriété, est au contraire toute mon existence et ma réalité, c'est moi-même. Je suis libre vis-à-vis de ce que je n'ai pas ; je suis propriétaire de ce qui est en mon pouvoir, ou de ce dont je suis capable. Je suis en tout temps et en toutes circonstances à moi, du moment que j'entends être à moi et que je ne me prostitue pas à autrui. L'état de liberté, je ne puis vraiment le vouloir, vu que je ne puis pas le réaliser, le créer; tout ce que je puis faire, c'est le désirer et y — rêver, car il reste un idéal, un fantôme. » La liberté intérieure est encore une illusion, ce n’est que la liberté de l’Esprit, mais je ne suis pas qu’un esprit, et j’ai également un corps. Les gens veulent être libre pour l’amour d’eux-mêmes, mais c’est également pour l’amour d’eux-mêmes qu’ils s’asservissent aux yeux d’une femme… Il faut donc bien avouer que la liberté n’est pas l’essentiel. Une liberté abnégation : P160 : « vous pressant avidement sur ses pas, vous vous faites libres de vous-mêmes, « vous faites abnégation de vous-mêmes » »

L’individu : P160 : « Le premier est originellement, essentiellement libre, parce qu'il ne reconnaît que lui ; il n'a pas à commencer par s'affranchir, parce que, a priori, il rejette tout hors de lui, parce qu'il n'apprécie que lui, ne met rien au-dessus de lui, bref, parce qu'il part de lui-même et arrive à lui-même » P165 : « L'individualité renferme en elle-même toute propriété et réhabilite ce que le langage chrétien avait déshonoré. Mais l'individualité n'a aucune mesure extérieure, car elle n’est nullement, comme la liberté, la moralité, l’humanité, etc., une idée : — Somme des propriétés de l’individu, elle n’est que le signalement de son — propriétaire. »

Liberté-Puissance : Il ne faut pas attendre la liberté du droit, ou des autres, la liberté consiste en ce que l’on est capable de faire ou non. P162 : « Ma liberté ne devient complète que lorsqu'elle est ma — puissance » « S'ils vous donnent cependant la liberté, ce ne sont que des fripons qui donnent plus qu'ils n'ont. Ils ne vous donnent rien de ce qui leur appartient, mais bien une marchandise volée ; ils vous donnent votre propre liberté, la liberté que vous auriez pu prendre vous-mêmes, et s'ils vous la donnent, ce n'est que pour que vous ne la preniez pas et pour que vous ne demandiez pas, par-dessus le marché, des comptes aux voleurs »


P166 : II. – Le Propriétaire , L’Individu Je possède des attributs, des propriétés, mais ils ne me possèdent pas. P168 : « Je puis compter au nombre de mes attributs un esprit chrétien, un esprit loyal, etc., et cet esprit est ma propriété ; mais je ne suis pas cet esprit : il est à moi, et je ne suis pas à lui »

Contre l’État, l’association des égoïstes : P171 : « La moralité est incompatible avec l'égoïsme, parce que ce n'est pas à Moi mais seulement à l'Homme que je suis qu'elle accorde une valeur. Si l'État est une société d'hommes, et non une réunion de Moi dont chacun n'a en vue que lui-même, il ne peut subsister sans la Moralité et doit être fondé sur elle. Aussi l'État et Moi sommes-nous ennemis. Le bien de cette « Société humaine » ne me tient pas au cœur, à moi l'égoïste ; je ne me dévoue pas pour elle, je ne fais que l'employer ; mais afin de pouvoir pleinement en user, je la convertis en ma propriété, j'en fais ma créature, c'est-à-dire que je l'anéantis et que j'édifie à sa place l'association des Égoïstes. » P277 : « Ce n'est que dans l'association que votre unicité peut s'affirmer, parce que l'association ne vous possède pas, mais que vous la possédez et que vous vous servez d'elle. » P278 : « Bref, la société est sacrée et l'association est ta propriété, la société se sert de toi et tu te sers de l'association »

Pour clore ce chapitre : P176 : « en quels termes déclarer que Je suis mon Justificateur, mon Médiateur et mon Propriétaire ? Je dirai : Ma puissance est ma propriété. Ma puissance me donne la propriété. Je suis moi-même ma puissance, et je suis par elle ma propriété. »


A – Ma Puissance Le Droit : Le Droit est esprit de la société, c’est quelque chose de « sacré » donc pourquoi respecterais-je le droit ? « Le Droit est l'Esprit de la société. Si la Société a une volonté, c'est précisément cette volonté qui constitue le Droit : la société n'existe que par le Droit. Mais comme elle n'existe que par le fait d'exercer une souveraineté sur l'individu, on peut dire que le Droit est sa volonté souveraine » Le droit n’est qu’une permission que nous offre l'Esprit de la société, mais sans lui, il nous suffirait de nous saisir de nos droits : P178 : « Le droit de tous (celui de manger, par exemple) est le droit de chaque individu. Si chacun veille à se le garder intact, tous l'exerceront d'eux-mêmes ; que l'individu ne s'inquiète donc pas de tous et défende son droit sans se faire le zélateur d'un droit de tous ! » « Lorsqu'on parle de droit, il est une question qu'on se pose toujours : « Qui, ou quelle chose, me donne le droit de faire ceci ou cela ? » Réponse : « Dieu, l'Amour, la Raison, l'Humanité, etc.! » Eh ! non, mon ami : ce qui te le donne, ce droit, c'est ta force, ta puissance, et rien d'autre (ta raison, par exemple, peut te le donner). » P180 : « Emparez-vous de la jouissance, et elle vous appartiendra de droit ; mais quelle que soit l'ardeur de vos désirs, si vous ne la saisissez pas, elle restera le « droit bien acquis » de ceux dont elle est le privilège. Elle est leur droit, comme elle eût été votre droit si vous la leur aviez arrachée. » Le Droit est un objet qui ne me concerne pas : P191 : « Droit « en soi et pour soi » : Donc, nullement relatif à moi ! Droit ; « absolu » : Donc, séparé de Moi ! Un être en soi et pour soi ! Un Absolu ! Un Droit éternel à côté d'une Vérité éternelle ! »


L’illégalisme : P182 : « Une seule voie vous est ouverte si vous voulez donner tort aux puissants : c'est la force ; dépouillez-les de leur puissance, vous les aurez réellement mis dans leur tort et privés de leurs droits ; sinon, vous ne pouvez rien, vous vous ferez de la bile en silence ou vous serez sacrifiés comme des fous encombrants. » La domination ne s’exerce qu’avec l’assentiment des dominés : P184 : « Celui qui doit, pour exister, compter sur le manque de volonté des autres est tout bonnement un produit de ces autres, comme le maître est un produit du serviteur. Si la soumission venait à cesser, c'en serait fait de la domination. » Le crime est une rébellion de l’Individu contre l’État : P185 : « Aux mains de l'État, la force s'appelle « droit », aux mains de l'individu, elle s'appelle « crime ». Crime signifie : emploi de sa force par l'individu ; ce n'est que par le crime que l'individu peut détruire la puissance de l'État, quand il est d'avis que c'est lui qui est au-dessus de l'État et non l'État qui est au-dessus de lui. » P220 : « C'est par le crime que l'Égoïste s'est toujours affirmé et a renversé d'une manière sacrilège les saintes idoles de leurs piédestaux. Rompre avec le Sacré ou, mieux encore, rompre le Sacré peut devenir général. Ce n'est pas une nouvelle révolution qui approche ; mais, puissant, orgueilleux, sans respect, sans honte, sans conscience, un — crime ne gronde-t-il pas avec le tonnerre à l'horizon, et ne vois-tu pas que le ciel, lourd de pressentiments, s'obscurcit et se tait ? »

Droit=Puissance : Le droit n’est qu’une façon détournée de parler de la puissance, la loi reste toujours celle du plus fort, ou plutôt de la force : P195 : « Le Droit ne rentrera dans son néant que lorsqu'il aura été absorbé par la Force, c'est-à-dire quand on aura compris que « la force prime le droit ». Alors, tout droit se révélera privilège, et le privilège lui-même apparaîtra sous son vrai jour comme puissance — puissance prépondérante. » Aussi la puissance me suffit-elle, indépendamment du Droit : « Ce que je possède indépendamment de la sanction de l'Esprit, je le possède sans droit, je le possède uniquement par ma puissance. Je ne réclame aucun droit et n'ai donc à en reconnaître aucun »

L’Unique et le droit : P194 : « La dernière opposition et la plus radicale, celle de l'Unique à l'Unique, est au fond bien éloignée de ce qu'on entend par opposition, sans pour cela retomber dans l'unité et l'identité. En tant qu'Unique, tu n'as plus rien de commun avec personne, et par là même plus rien d'inconciliable ou d'hostile. Tu ne demandes plus contre lui ton droit à un tiers et ne te tiens plus avec lui sur le « terrain du droit » ni sur aucun autre terrain commun. L'opposition se résout en une séparation, en une unicité radicale »


P196 : II – Mes Relations Jusqu’à maintenant, les hommes n’ont jamais su vivre sans société fondée sur des fantômes : l’Église, l’État ou autre… Ce sont donc toujours les égoïstes qui ruinent ces sociétés en voulant être eux-mêmes, car dans des institutions comme l’État ou l’Église : P197 : « M'est-il en elles possible, m'est-il par elles permis d'être moi-même ? Puis-je penser et agir comme je veux, puis-je me manifester, m'affirmer, vivre ma vie à moi ? Ne dois-je pas laisser intactes la majesté de l'État et la sainteté de l'Église ? » P200 : « États, Constitutions, Églises, etc., se sont toujours évanouis dès que l'individu a levé la tête, car l'individu est l'ennemi irréconciliable de tout ce qui tend à submerger sa volonté sous une volonté générale, de tout lien, c'est-à-dire de toute chaîne » & « Tout ce qui est sacré est un lien, une chaîne. »

Socrate n’était pas assez égoïste : S’il avait été moins bête, il n’aurait pas reconnu la valeur du droit du peuple qui lui imposait la mort. Il a été lâche en n’ayant pas la force d’affirmer son Moi. : P199 : « Combien n'a-t-on pas vanté chez Socrate le scrupule de probité qui lui fit repousser le conseil de s'enfuir de son cachot ! Ce fut de sa part une pure folie de donner aux Athéniens le droit de le condamner. Aussi n'a-t-il été traité que comme il le méritait ; pourquoi se laissait-il entraîner par les Athéniens à engager la lutte sur le terrain où ils s'étaient placés ? Pourquoi ne pas rompre avec eux ? S'il avait su, s'il avait pu savoir ce qu'il était, il n'eût reconnu à de tels juges aucune autorité, aucun droit. S'il fut faible, ce fut précisément en ne fuyant pas, en gardant cette illusion qu'il avait encore quelque chose de commun avec les Athéniens, et en s'imaginant n'être qu'un membre, un simple membre de ce peuple. »

Les véritables relations : Elles sont indépendantes de la société, on peut être en société sans « faire » société. Ce n’est pas la structure sociale qui détermine nos relations les uns les autres : nous entrons en relation et louvoyons dans le système où nous nous trouvons pour parvenir à nos fins. P202 : « Qui détermine la manière de vivre de la société de prisonniers ? Encore la prison. Mais qui détermine leurs relations ? Est-ce aussi la prison ? Halte ! Ici, je vous arrête : Évidemment, s'ils entrent en relations, ce ne peut être que comme des prisonniers, c'est-à-dire que pour autant que le permettent les règlements de la prison ; mais ces relations, c'est eux-mêmes et eux seuls qui les créent, c'est le Je qui se met en l'apport avec le Tu ; non seulement ces relations ne peuvent pas être le fait de la prison, mais celle-ci doit veiller à s'opposer à toutes relations égoïstes, purement personnelles (les seules qui puissent s'établir réellement entre un Je et un Tu). » P203 : « La prison, comme la salle, produit une société, une compagnie, une communauté (communauté de travail, par exemple), mais non des relations, une réciprocité, une association. Au contraire, toute association entre individus née à l'ombre de la prison porte en elle le germe dangereux d'un « complot », et cette semence de rébellion peut, si les circonstances sont favorables, germer et porter des fruits. » Ce sont nos relations véritables qui doivent nous unir, et non la primauté d’une institution existant en dehors et sans nous. P206 : « Nos sociétés et nos États sont sans que nous les fassions ; ils peuvent s'allier sans qu'il y ait alliance entre nous, ils sont prédestinés et ils ont une existence propre, indépendante » P212 : « toutes les alliances et toutes les ligues entre peuples sont et resteront des assemblages mécaniques, parce que ceux qui sont ainsi unis (du moment que l'on considère que ce sont les Peuples qui s'unissent) n'ont pas de volonté. Ce n'est que lorsque l'ultime séparation aura eu lieu que la séparation elle-même cessera pour se transformer en alliance. »

Anti-étatisme : Aussi faut-il viser la destruction de l’État et non chercher à l’amender ou le révolutionner. P206 : « C'est bien plutôt à l'ordre lui-même, c'est-à-dire à tout État (status) quel qu'il soit, que la guerre devrait être déclarée, et non pas à tel État déterminé, à la forme actuelle de l'État. Le but à atteindre n'est pas un autre État (l'État démocratique, par exemple), mais l'alliance, l'union, l'harmonie toujours instable et changeante de tout ce qui est et n'est qu'à condition de changer sans cesse » Les véritables relations n’ayant pas besoin d’État, l’État ne fait que les parasiter. Le Moi ne reconnaît aucun souverain : P209 : « « Dans l'État libre, il n'y a pas de gouvernement, etc. » (p. 94). Ceci veut simplement dire que le Peuple, lorsqu'il est le souverain, ne se laisse pas régenter par une puissance supérieure. Mais en est-il autrement dans la monarchie absolue ? Qui dit souverain exclut toute idée d'une puissance supérieure. Que le souverain s'appelle Prince ou Peuple, jamais il ne peut y avoir un gouvernement au-dessus de lui, cela va de soi. Mais dans tout État, absolu, républicain ou « libre », il y aura toujours un gouvernement au-dessus de Moi, et je ne me trouverai pas mieux de l'un que de l'autre. »

L’hypocrisie étatique : C’est celle du Droit, qui ne nous laisse nous exprimer que dans ces limites, au delà desquelles on se rend coupable : P208 « Leur fameuse tolérance ne s'exerce qu'en faveur de ce qui est « inoffensif » et « sans danger »; elle n'est que leur haussement d'épaules devant ce qui ne vaut pas qu'ils en tiennent compte, et n'est qu'un — despotisme plus imposant, plus auguste et plus orgueilleux. »

Contre la patrie : Encore un Esprit parmi d’autre, qui empêche au vrai moi de s’exprimer. P212 : « N'est-ce pas un spectacle sentimental prodigieusement ridicule que celui d'un Allemand qui serre la main à son voisin avec une sainte émotion parce que « lui aussi est un Allemand »? Le voilà bien avancé ! » P213 : « Depuis la Révolution, on cherche à faire le bonheur du Peuple, et pour faire le Peuple heureux, grand, etc., on nous rend malheureux ! Le bonheur du Peuple est — mon malheur. »

Contre les partis : Les partis se veulent des sortes de loges confessionnelles politiques auxquelles il faut « adhérer », mais l’unique n’adhère pas à un parti parce qu’il y reconnaît un idéal sacré, mais parce que celui ci peut l’aider dans ses propres intérêts. P215 : « Il y a dans l'État des partis. « Mon Parti ! Qui voudrait ne pas prendre parti ! » Mais l'individu est unique et n'est pas membre d'un parti. Il s'unit librement et se sépare ensuite librement. Un parti n'est autre chose qu'un État dans l'État, et la « paix » doit régner dans ce petit essaim d'abeilles comme dans le grand. » De cette manière, on interdit le changement de parti, et on traite de « transfuge » celui qui opère de la sorte, mais ce n’est qu’un ramassis moral de plus. « Si quelqu'un passe d'un parti à l'autre, on l'appelle immédiatement transfuge, déserteur, renégat, apostat, etc. La Morale, en effet, exige que l'on adhère fermement à son parti ; le trahir, c'est se souiller du crime d'« infidélité »; mais l'individualité, elle, ne connaît ni « fidélité » ni « dévouement » de précepte ; elle permet tout, y compris l'apostasie, la désertion et le reste » Ça n’empêche pas éventuellement de rejoindre un parti, mais toujours temporairement : P217 : «Ainsi donc, un égoïste ne pourra jamais embrasser un parti, il ne pourra jamais prendre parti ? Mais si, il le peut parfaitement, pourvu qu'il ne se laisse pas saisir et enchaîner par le parti ! Le parti n'est jamais pour lui qu'une partie : il est de la partie, il prend part. »

Contre l’expropriation : Elle repose sur l’idée que la société est quelque chose de sacré, et qu’en devenant propriétaire de quelque chose, on vole la société, mais la société n’est rien de sacré, elle est en dehors de nous. C’est en cela que Proudhon se trompe. P227 : « Il tâche de nous faire accepter l'idée que la Société est le possesseur primitif et l'unique propriétaire de droits imprescriptibles ; c'est envers elle que celui qu'on nomme propriétaire est coupable de vol (« La propriété, c'est le vol * »); si elle retire au propriétaire actuel ce qu'il détient comme lui appartenant, elle ne le vole pas, elle ne fait que rentrer en possession de son bien et user de son droit. — Voilà où on en arrive lorsqu'on fait du fantôme Société une personne morale. » P228 : « Toute chose est la propriété de qui sait la prendre et la garder, et reste à lui tant qu'elle ne lui est pas reprise ; c'est ainsi que la liberté appartient à celui qui la prend » P233 : « Moi, l'individu, je ne vois pas un moindre obstacle dans la richesse de la collectivité que dans la richesse des autres individus, car ni l'une ni l'autre ne m'appartient. »

Pour sortir du paupérisme : Il ne faut pas s’en prendre à la propriété, mais avoir la puissance, avoir la propriété d’exiger son coût de travail. Sinon, le paupérisme reste la faute principalement des pauvres. Il est normal que le bourgeois protège son intérêt. Les pauvres pourraient exiger plus, ils suffiraient qu’ils arrêtent de protéger les riches en ne les attaquant pas P230 : « Le paupérisme ne pourra être enrayé que du jour où ma valeur ne dépendra plus que de moi, où je la fixerai moi-même et ferai moi-même mon prix. Si je veux me voir en hausse, c'est à moi à me hausser et à me soulever. » « Me plaindre ne servirait de rien, mon travail ne sera pas payé ce qu'il vaut ; l'acheteur ne m'écoutera pas, et l'État fera de même la sourde oreille jusqu'au moment où il croira nécessaire de m' « apaiser » pour prévenir l'explosion de ma redoutable puissance. Mais ces moyens d' « apaisement » dont il use en guise de soupape de sûreté sont tout ce que je puis attendre de lui ; si je m'avise de réclamer plus, l'État se tournera contre moi et me fera sentir ses griffes et ses serres, car il est le roi des animaux, le lion et l'aigle. » D’où la nécessité de sortir de tout système de charité, de tout système de dons, car se serait faire la part belle à l’État, ce serait le respecté encore, le conserver sacré, et donc s’empêcher de devenir individu. P235 : « Les pauvres ne deviendront libres et propriétaires que lorsqu'ils — s'insurgeront, se soulèveront, s'élèveront. Quoi que vous leur donniez, ils voudront toujours davantage, car ils ne veulent rien de moins que — la suppression de tout don. » Contre le « la propriété c’est le vol » de Proudhon : P280 : « Proudhon dit que la « propriété, c'est le vol ». Mais la propriété d'autrui (il ne parle que de celle-là) n'existe que par le fait d'une renonciation, d'un abandon, comme une conséquence de mon humilité ; elle est un cadeau. Que signifient alors toutes ces grimaces sentimentales ? Pourquoi faire appel à la compassion comme un pauvre volé, quand on n'est qu'un imbécile et un lâche faiseur de cadeaux ? Et pourquoi rejeter toujours la faute sur les autres et les accuser de nous voler, alors que c'est nous-mêmes qui sommes en faute en ne les volant pas ? S'il y a des riches, la faute en est aux pauvres. »


Contre le collectivisme : Le collectivisme veut donner les moyens à chacun en fonction de ce qu’on juge nécessaire à « l’Homme », mais l’homme, ce n’est pas moi. P238 : « Mais mon égoïsme pourra-t-il se contenter de cela ? Les besoins de l' « Homme » ne sont nullement une mesure applicable à moi et à mes besoins ; car je puis avoir besoin de plus ou de moins. Non, je dois avoir autant que je suis capable de m'approprier. »

Notre richesse ne dépend jamais que de ce qu’on est capable : Tout ce que je suis capable d’exiger, il est normal que je l’exige, ce n’est qu’une question de puissance et de capacité. La richesse est toujours ce qu’on peut obtenir, activement ou passivement. Même les communistes reconnaissent que le travail n’est pas tout, car ils viennent en aide aux retraités. Si les retraités n’avaient pas de pouvoir sur autrui, on ne s’occuperait pas d’eux, c’est donc bien qu’ils exercent un pouvoir. En somme, on ne doit jamais faire l’aumône, mais bien plutôt « acheter » des choses dont on a besoin. On achète le travail d’un ouvrier, comme on achète la subsistance des handicapés, non pas par « charité », mais parce qu’il nous plaît qu’ils vivent. P239 : « Ainsi, ta richesse consiste en tout ce dont tu es capable ! Si tu es capable de procurer un plaisir à des milliers d'hommes, ces milliers d'hommes te donneront des honoraires, parce qu'il est en ton pouvoir de cesser de leur être agréable et que cela les oblige à acheter ton travail. Mais si tu n'es capable d'intéresser personne à toi, tu es tout juste capable de disparaître. » P240 : « La pratique égoïste consiste à ne considérer les autres ni comme des propriétaires ni comme des gueux ou des travailleurs, mais à voir en eux une partie de votre richesse, des objets qui peuvent vous servir. Cela étant, vous ne paierez rien à celui qui possède (« au propriétaire »), vous ne paierez rien à celui qui travaille, vous ne donnerez qu'à celui dont vous avez besoin. » « Weitling a imaginé un nouvel instrument d'échange, le travail. Mais le véritable instrument de paiement reste encore, comme toujours, notre richesse : Tu paies avec ce que tu as « en ton pouvoir ». Songe donc à augmenter ta richesse ! »

Le travail : Comme des formes nombreuses de travail ne permettent pas à l’Unique de s’émanciper, il faut qu’ils prennent le moins de temps possibles, et à cette fin, il est cohérent de s’associer. P242 : « Il est, par conséquent, toujours à souhaiter que nous nous unissions pour les travaux humains, afin qu'ils n'absorbent plus tout notre temps et tous nos efforts comme ils le faisaient sous le régime de la concurrence. » Les communistes n’arrivent pas à concevoir l’existence en dehors du travail, ils ne voient le repos que comme un moyen de produire plus… : « Mais pour qui faut-il gagner du temps ? Pourquoi l'homme a-t-il besoin de plus de temps qu'il n'en faut pour ranimer ses forces puises par le travail ? Ici, le Communisme se tait. Pourquoi ? Eh bien ! pour jouir de soi-même comme Unique, après avoir fait sa part comme homme ! » Mais la richesse ne se limite pas au travail, car on peut facilement s’acquitter de la tâche qui nous est confiée. En fait, la vraie richesse est dans ce que l’homme met dans ce travail. « Tes besoins humains ou généraux peuvent être satisfaits par la Société ; mais c'est à Toi à chercher la satisfaction de tes besoins uniques. La Société ne peut ni te procurer une amitié ou le service d'un ami, ni même t'assurer les bons offices d'un individu. Et pourtant tu auras à chaque instant besoin de services de ce genre, dans les circonstances les plus insignifiantes il te faudra quelqu'un pour t'assister. Ne compte pas pour cela sur la Société, mais fais en sorte d'avoir de quoi — acheter la satisfaction de tes désirs. »

L’argent : Pour abolir l’argent, il suffit de ne plus s’en servir… P247 : « Ce n'est pas l'argent qui vous fait du mal, mais bien votre impuissance à le prendre. » « La concurrence doit précisément son existence à ce que personne ne s'occupe de ses affaires et ne songe à s'entendre avec les autres à leur sujet. Le pain, par exemple, est un objet de première nécessité pour tous les habitants d'une ville. Donc, rien de plus naturel que de s'accorder pour établir une boulangerie publique. Au lieu de cela, on abandonne cette indispensable fourniture à des boulangers qui se font concurrence. Et ainsi de la viande aux bouchers, du vin aux marchands de vin, etc Abolir le régime de la concurrence ne veut pas dire favoriser le régime de la corporation. Voici la différence : dans la corporation, faire le pain, etc., est l'affaire des compagnons ; sous la concurrence, c'est l'affaire de ceux à qui il plaît de concourir ; dans l'association, c'est l'affaire de ceux qui ont besoin de pain, par conséquent la mienne, la vôtre : ce n'est l'affaire ni des compagnons, ni des boulangers patentés, mais bien celle des associés. »

Ma capacité et le Droit : Pour la propriété : P250 : « Donc, une chose ne sera la juste et légitime propriété d'un autre que quand il sera juste pour toi qu'elle soit la propriété de cet autre. Dès qu'il ne te convient plus qu'il en soit ainsi, la légitimité disparaît à tes yeux, et il ne te reste plus qu'à rire du droit absolu du propriétaire. » Pour le sacré (propriété spirituelle) : En plus, il existe la propriété « spirituelle » à laquelle on n’a pas le droit de toucher : si quelqu’un croit fortement à quelque chose, il nous est interdit de s’en moquer. P251 : « L'égoïste s'exprime tout autrement. C'est justement parce que tu tiens quelque chose pour sacré que je te trouve ridicule, et en admettant même que je veuille tout respecter en toi, c'est précisément ton sanctuaire intérieur que je ne respecterais pas. » « On désigne sous le nom d' « impiété » ou de « sacrilège » toutes les infractions qui peuvent être commises contre les biens spirituels, c'est-à-dire envers ce que nous tenons pour sacré ; et la raillerie, l'insulte, le mépris, le scepticisme, etc., ne sont que des nuances différentes de la criminelle impiété. » Pour la presse : P252 : « S'il est des choses que je ne puis ou n'ose écrire, le premier coupable ne peut être que moi-même. — Et, quoique ceci paraisse s'éloigner du sujet, en voici pourtant l'explication : Par une loi sur la presse, je trace ou je permets qu'on trace autour de mes publications une limite au-delà de laquelle commencent le délit et la répression. C'est moi-même qui restreint ma liberté. » P253 : « En un mot, il est impossible que la presse soit libre de ce dont je ne suis pas libre moi-même. »

Sur l’amour : L’amour des libéraux est fade et sans valeur : ils aiment l’Homme, une abstraction idéale qui n’existe pas. P257 : « Les relations des hommes entre eux sont régies, pour tous ceux qui vivent religieusement, par une loi formelle dont on peut bien parfois, au risque de pécher, négliger l'observation, mais dont on ne s'aviserait jamais de nier la valeur absolue. C'est la loi de l'Amour, loi avec laquelle ceux-là mêmes qui semblent combattre son principe et qui haïssent son nom n'ont pas encore su rompre ; car à eux aussi il reste de l'amour, leur amour est même plus profond et plus pur : ils aiment l'Homme et l'Humanité. » Freud dira dans Le malaise dans la culture : « [Les gens] se protègent contre la perte de cet objet [l’objet sexuel] en dirigeant leur amour non sur des objets individuels, mais dans une même mesure sur tous les êtres humains, et elles évitent les oscillations et désillusions de l’amour génital en le déviant de son but sexuel, en transformant la pulsion en une motion inhibée quant au but. » Et Nietzsche dans La volonté de puissance : P116 : « chez l’homme dont l’ego s’affaiblit et s’amenuise, la force du grand amour s’affaiblit aussi. » puis P138 : « l’amour a été travesti en dévouement (et en altruisme), alors qu’il est une conquête ou un don qui résulte de la richesse surabondante de la personnalité. » P259 : « Mais celui qui est pénétré de l'amour sacré (religieux, moral, humain) n'a d'amour que pour le fantôme, pour le « véritable Homme », et il persécute l'individu, l'homme réel, aussi impitoyablement et avec la même froideur que s'il procédait juridiquement contre un monstre. » Stirner P260 : « Faut-il peut-être ne prendre aucun intérêt actif à la personne d'autrui ? Dois-je n'avoir à cœur ni sa joie ni son intérêt, ne puis-je préférer la jouissance que je lui procure à telle ou telle de mes jouissances personnelles ? Loin de là : je puis lui sacrifier avec joie d'innombrables jouissances, je puis m'imposer des privations sans nombre pour augmenter son plaisir, et je puis, pour lui, mettre en péril ce qui, sans lui, me serait le plus cher, ma vie, ma prospérité, ma liberté. En effet, c'est pour moi un plaisir et un bonheur que le spectacle de son bonheur et de son plaisir. Mais je ne me sacrifie pas à lui, je reste égoïste et je — jouis de lui. » P261 : « c'est parce que je ne puis supporter ce pli douloureux sur le front aimé, c'est par conséquent dans mon intérêt, que je l'efface par un baiser. Si je ne t'aimais pas, tu pourrais froncer les sourcils tant que tu voudrais sans m'émouvoir ; je ne veux dissiper que mon chagrin. » Un tel amour peut se forger comme on peut forger de la haine : P262 : « si l'amour est un commandement et une loi, il faut qu'on m'y forme et qu'on m'y dresse, et qu'on me punisse si je viens à l'enfreindre. On exercera donc sur moi, pour m'amener à aimer, la plus énergique « influence morale » possible. Et il est hors de doute que l'on peut exciter et induire les hommes à l'amour aussi bien qu'aux autres passions, à la haine, par exemple. La haine se transmet de génération en génération, on peut se haïr uniquement parce que les ancêtres des uns étaient Guelfes et ceux des autres Gibelins. » Cet amour désintéressé est un des fondements de la charité, et donc du maintien dans l’esclavage : P276 : « . L'égoïsme exige la réciprocité (donnant, donnant), il ne fait rien pour rien, et s'il offre ses services, c'est pour qu'on les — achète. Mais le « service d'amour », comment me le procurer ? C'est le hasard qui fera que j'aurai justement affaire à un « bon cœur ». Et je ne puis émouvoir la charité qu'en mendiant ses services, soit par mon extérieur misérable, soit par ma détresse, ma misère, ma souffrance. — Et que puis-je lui offrir en échange de son assistance ? Rien ! Il faut que je la reçoive comme un cadeau. L'amour ne se paie pas, ou, disons mieux : l'amour peut bien se payer, mais seulement en amour (un service en vaut un autre). »


En ce qui concerne la vérité : Pas plus d’amour de l’Homme que de la Vérité : P265, « Non seulement ce n'est pas pour l'amour de vous que j'exprime ce que je pense, mais ce n'est pas même pour l'amour de la vérité. Non :


« Je chante comme chante l'oiseau Qui habite dans le feuillage. Le chant même que produit ma voix Est mon salaire, et un salaire royal . » » Wilhelm Meister

La Vérité, qu’elle existe ou non, n’a rien qui vaille qu’on lui voue un culte. Si elle m’est utile, alors je la recherche, sinon, je n’en ai que faire. Il faut avoir le courage du mensonge pour préserver son Moi : P270 : « Car le mensonge ne demande pas moins de courage que la vérité, et un courage dont sont dépourvus la plupart des jeunes gens : ils aiment mieux confesser la vérité et monter pour elle sur l'échafaud que conserver, en ayant le courage de mentir, l'espoir de ruiner la puissance de l'ennemi. » « Vous ne voulez pas mentir ? Eh bien ! faites-vous égorger sur l'autel de la vérité et soyez — martyr ! Martyr au profit de qui ? De vous-même, de votre individualité ? Non, de votre idole — de la vérité. »

Le « Vrai Bien » : P275 : Le Communisme veut faire le « bien de tous », « mais quel sera donc ce bien ? Y a-t-il un seul et même bien pour tous, tous se trouveront-ils également bien d'une seule et même chose ? S'il en est ainsi, c'est du « vrai bien » qu'il s'agit. Et nous voilà ramenés précisément au point où commence la tyrannie de la religion. » « la Société ayant décrété que le « vrai bien » est telle ou telle chose, par exemple, la jouissance honnêtement acquise par le travail, s'il arrive que tu préfères, toi, les délices de la paresse, la jouissance sans le travail, la Société, qui veille au « bien de tous », se gardera d'étendre sa sollicitude à ce qui pour toi est le bien. »

Le communautarisme des semblables : Il faudrait pour cela qu’il existe des semblables, mais chacun est trop différent des autres pour que des semblables soient possibles. P277 : « l'hypothèse d'après laquelle les autres seraient nos semblables prend sa source dans une hypocrisie. Personne n'est mon semblable, mais, semblable à tous les autres êtres, l'homme est pour moi une propriété. »

Différence entre révolution et insurrection : C’est la deuxième qui recueille le suffrage de Stirner (si l’on peut employer une telle expression pour un anarchiste). La révolution cherche à s’accommoder de la société, elle cherche à changer les institutions pour changer la vie des hommes. L’insurrection ne se soucie pas de cela : elle surgit parce que les hommes font le pari de vivre autrement, et puis, les choses changent ou non. Ce n’est pas le plus important. P280 : « Révolution et insurrection ne sont pas synonymes. La première consiste en un bouleversement de l'ordre établi, du status de l'État ou de la Société, elle n'a donc qu'une portée politique ou sociale. La seconde entraîne bien comme conséquence inévitable le même renversement des institutions établies, mais là n'est point son but, elle ne procède que du mécontentement des hommes ; elle n'est pas une levée de boucliers, mais l'acte d'individus qui s'élèvent, qui se redressent, sans s'inquiéter des institutions qui vont craquer sous leurs efforts ni de celles qui pourront en résulter. La révolution avait en vue un régime nouveau, l'insurrection nous mène à ne plus nous laisser régir mais à nous régir nous-mêmes et elle ne fonde pas de brillantes espérances sur les « institutions à venir ». Elle est une lutte contre ce qui est établi, en ce sens que, lorsqu'elle réussit, ce qui est établi s'écroule tout seul. Elle est mon effort pour me dégager du présent qui m'opprime ; et dès que je l'ai abandonné, ce présent est mort et tombe en décomposition. » P281 : « En somme, mon but n'étant pas de renverser ce qui est, mais de m’élever au-dessus de lui, mes intentions et mes actes n'ont rien de politique ni de social ; n'ayant d'autre objet que moi et mon individualité, ils sont égoïstes. La révolution ordonne d'instituer, d'instaurer, l'insurrection veut qu'on se soulève ou qu'on s'élève. » Pour illustrer cette proposition, Stirner utilise l’exemple du « rendez à César ce qui appartient à César, et à Dieu ce qui appartient à Dieu » dit par Jésus. Jésus n’était pas un révolutionnaire, il voulait juste suivre sa propre voie ! è cf Gandhi a dit "N’essaye pas de changer le monde, mais sois le changement que tu veux voir dans le monde" « C'est précisément parce qu'il ne visait pas au renversement de l'ordre établi qu'il en fut le plus mortel ennemi et le véritable destructeur. Car il le mura dans son tombeau et, tranquille, sans un regard pour les vaincus, il éleva son temple à lui, sans prêter l'oreille aux cris de douleur de ceux qu'il avait ensevelis sous leurs ruines. » « À quoi tendent mes relations avec le monde ? Je veux en jouir ; il faut pour cela qu'il soit ma propriété, et je veux donc le conquérir. Je ne veux pas la liberté des hommes, je ne veux pas l'égalité des hommes, je ne veux que ma puissance sur les hommes ; je veux qu'ils soient ma propriété, c'est-à-dire qu'ils servent à ma jouissance. Et s'ils s'opposent à mes désirs, eh bien ! le droit de vie et de mort que se sont réserve l'Église et l'État, je déclare que lui aussi — est à moi. »

P284 : C – MA JOUISSANCE DE MOI

Distinction entre « vivre » et « jouir de la vie », proche de celle que les situationnistes font entre « survivre » et « vivre » : Jusqu’à lors, les chrétiens aussi bien que les athées moraux cherchaient à vivre, il commence avec Stirner le temps de profiter de la vie qui rappelle le slogan soixante-huitard « Jouir sans entraves, vivre sans temps morts ». P284 : « tant que je crois, au contraire, avoir encore à découvrir mon vrai moi, tant que je pense devoir faire en sorte que celui qui vit en moi ne soit pas Moi, mais soit le Chrétien ou quelque autre moi spirituel, c'est-à-dire quelque fantôme tel que l'Homme, l'essence de l'Homme, etc., il m'est à jamais interdit de jouir de moi. » P285 : « Pour triompher de l'aspiration à la vie, la jouissance de la vie doit la vaincre sous sa double forme, écraser aussi bien la détresse spirituelle que la détresse temporelle, et exterminer à la fois la soif de l'idéal et la faim du pain quotidien. Celui qui doit user sa vie à la conserver ne peut en jouir, et celui qui la cherche ne l'a pas et ne peut pas non plus en jouir : tous deux sont pauvres, » Phrase qui ne dénoterait pas dans un livre de Vaneigem… Il est donc nécessaire d’abord de se donner les moyens de jouir de la vie, qui nécessite un certain confort humain, puis de s’affranchir de la morale. Problème dont n’arrivent à se défaire ni les libéraux, ni les chrétiens, les premiers cherchant l’Homme, les deuxième cherchant Dieu, aucun ne cherchant vraiment à jouir de la vie, c’est à dire, comme l’entend Stirner : « On use de la vie et de soi-même en la consumant et en se consumant. Jouir de la vie, c'est la dévorer et la détruire. » P288 : « Pauvres êtres, qui pourriez être si heureux s'il vous était permis de gambader à votre guise ! Il faut que vous dansiez au son de la serinette des pédagogues et des montreurs d'ours, et que vous appreniez à faire des tours dont vous n'eussiez jamais de la vie senti le besoin. Cela ne finit-il pas par vous révolter, de voir qu'on vous prend toujours pour autre chose que ce que vous voulez paraître ? Non ! Vous répétez mécaniquement la question qu'on vous a soufflée : « À quoi suis-je appelé ? Quel est mon devoir ? » Et il suffit que vous posiez la question pour qu'aussitôt la réponse s'impose à vous : vous vous ordonnez ce que vous devez faire, vous vous tracez une vocation, ou vous vous donnez les ordres et vous vous imposez la vocation que l'Esprit a d'avance prescrits. Par rapport à la volonté, cela peut s'énoncer ainsi : Je veux ce que je dois. » On est tenté de citer Camus qui semble rejoindre Stirner sur ce point : « La vraie générosité envers l'avenir consiste à tout donner au présent »

Possibilité et réalité : Pour Stirner, c’est inséparable. Ce que l’on peut faire est ce que l’on fait, un point c’est tout. Si j’avais des ailes, je pourrais voler, mais je n’en ai pas, donc je ne peux pas voler. Il ne sert à rien de spéculer, l’essentiel est d’agir conformément à ses vœux, et alors seulement ce qui est possible l’est réellement, par le fait qu’il est réalité. P291 : « On n'est pas capable d'être ce qu'on n'est pas, on n'est pas capable de faire ce qu'on ne fait pas. Cet homme que la cataracte aveugle pourrait-il voir ? Certainement, il suffirait qu'il fût opéré avec succès. Mais, pour le moment, il ne peut pas voir, parce qu'il ne voit pas. Possibilité et réalité sont inséparables. On ne peut pas faire ce qu'on ne fait pas, comme on ne fait pas ce qu'on ne peut pas faire. » C’est de là que nait l’erreur de la « vocation ». On s’imagine que quelque chose est possible alors qu’il n’est pas réel, et on lui court après. Mais alors on s’oublie soit, et oubliant ce qu’on est réellement, on oublie réellement ce qu’on peut être. P293 : « Le mouton ne s'efforce pas de devenir un « vrai mouton », ni le chien un « vrai chien »; aucun animal ne prend son être pour un devoir, c'est-à-dire pour une idée qu'il doit réaliser. Il se réalise par là même qu'il vit sa vie, c'est-à-dire qu'il s'use et qu'il se détruit. » « Votre nature est, une fois pour toutes, humaine ; vous êtes des natures humaines, c'est-à-dire des hommes, et c'est justement, parce que vous en êtes que vous n'avez plus besoin d'en devenir. » Hegel a parachevé la chose en nous projetant dans cette illusion qu’il appelle « l’Esprit ». N’étant pas ce qu’on croit possible d’être, on finit alors toujours comme Pascal à se flageller avec des verges dans l’effroi de ces « espaces infinis ».

Il faut rester maître, i.e. créateur de ses pensées : P297 : « « Cherchez et vous trouverez ! » Ce que je veux chercher, c'est Moi qui le détermine. Si je veux chercher dans la Bible matière à édification, je trouverai ; si je veux la lire et l'examiner à fond, il en résultera pour moi une connaissance et une critique profondes — d'après mes forces. » « De ceci naît cette considération que tout jugement que je porte sur un objet est l'œuvre, la création de ma volonté ; je suis par là de nouveau averti de ne pas me perdre dans la créature qu'est mon jugement, mais de rester le créateur qui juge et qui toujours crée à nouveau. » Rien ne peut prétendre se hisser au dessus de moi, ni l’Esprit, ni la Raison, ni Dieu, ni le Travail, la Famille ou la Patrie… Tout dogmatisme contient le dogme d’un autre qui fait de nous sa propriété en nous ralliant à son dogme. Il convient donc de refuser ces idéalismes et ces doctrines trop parfaites pour découvrir son vrai soi.

La pensée et les contradictions de la Vérité : Il faut pour pouvoir créer son penser, savoir se défaire des réseaux linguistiques dans lesquels nous sommes embarqués et qui constituent une multitudes de vérités, au sens dogmatique, qui entravent notre liberté de penser et concourre plutôt à une pensée libre de nous. P304 : « Pour autant qu'on ne peut se dégager d'une pensée, on n'est, rien qu'homme, on est l'esclave de la langue, cette production des hommes, ce trésor de la pensée humaine. La langue, ou « le mot », exerce sur nous la plus affreuse tyrannie parce qu'elle conduit contre nous toute une armée d'idées fixes. » « Si le penser n'est pas mon penser, il n'est que le dévidement d'un écheveau de pensées, c'est une besogne d'esclave, d' « esclave des mots ». » On pense à Nietzsche qui disait dans La volonté de Puissance : P258 : « Ils ont inventé et créé par l’imagination – mais ce qui a décidé du droit à l’existence de ces poésies et de ces fantaisies, c’est le fait expérimental qu’elles permettaient de vivre ou qu’elles faisaient mourir. Erreurs ou vérités – peu importe, pourvu que la vie fût possible en leur compagnie. Un réseau inextricable s’est ainsi tissé peu à peu. Nous venons au monde, déjà empêtrés dans ce réseau, et la science elle-même ne nous en dégage pas. » Et Stirner, P306, attaque même la Critique : « La Hiérarchie durera tant qu'on croira à des principes, tant qu'on y pensera ou même qu'on les critiquera, car la critique, même la plus corrosive, celle qui ruine tous les principes admis, le fait en définitive encore au nom d'un principe. » « Le critique part d'un axiome, d'une vérité, d'une croyance ; celle-ci n'est pas une création du critique, mais du dogmatique » P307 : « Le critique présuppose ingénument la « vérité » en se mettant à l'œuvre, et il la cherche, convaincu qu'elle est encore à trouver. Il veut découvrir la vérité, et il a justement pour éclairer ses recherches ce « bon » dont nous parlions tout à l'heure. » Mais la Vérité supérieure se veut en dehors de nous, aussi, quelle valeur a-t-elle pour nous ? Si elle nous dépasse, elle n’intéresse pas mon égoïsme, si elle nous est intérieure, elle y est subordonnée et n’a donc plus valeur de vérité. P309 : « Tant que tu crois à la vérité, tu ne crois pas à toi, et tu es un — serf, un homme religieux. Toi seul tu es la vérité, ou plutôt tu es plus que la vérité, car sans toi elle n'est rien. » P310 : « Il n'y a pas de vérité au-dessus de moi, car au-dessus de Moi, il n'y a rien »

P316 : III – L’Unique Tel est l’état parfait de celui « qui ne fonde sa cause sur rien », qui ne se cherche dans aucune vocation supérieure mais dans rien d’autre que lui-même. P319 : « Je ne vis pas plus d'après une vocation que la fleur ne s'épanouit et n'exhale son parfum par devoir. » « Si je base ma cause sur Moi, l'Unique, elle repose sur son créateur éphémère et périssable qui se dévore lui-même, et je puis dire : Je n’ai basé ma cause sur Rien. »


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