Führer
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Le nom masculin allemand Führer qui signifie « chef », « dirigeant », « leader » ou « guide » (du verbe führen signifiant « mener », « conduire » ou « guider »), terme qui a fait florès au cours du XXe siècle, est surtout connu pour avoir désigné la personne d'Adolf Hitler à partir de son accession au pouvoir en 1933.
Dans la suite du texte, il est surtout question de l'évolution de ce terme en Allemagne.
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[modifier] Avant la prise de pouvoir
Ce terme et la thématique du « Guide » est présent de longue date dans la mouvance völkisch et surtout nazie. Le Führerprinzip est omniprésent dans l'argumentaire nazi des années 1920.
Dans sa monumentale biographie d'Adolf Hitler, l'historien Ian Kershaw cite ainsi Luise Solmitz, une institutrice de Hambourg qui assista le 23 avril 1932 à un meeting électoral du NSDAP :
- « Personne ne disait « Hitler », mais toujours simplement « le Führer ». « le Führer dit », « le Führer veut », et ce qu'il disait et voulait paraisssait bel et bon. » (page 524)
C'est aussi le diminutif du titre officiel de Reichsführer, que s'est fait attribuer, par une loi, Adolf Hitler, alors chancelier, à la mort du président Hindenburg en août 1934. Après le référendum d'août 1934, où il obtient 89% de voix, Hitler devient ainsi, en fait et en droit, le chef de l'Allemagne autant que le chef du gouvernement.
Hitler est devenu rapidement l'objet d'un véritable culte de la personnalité en tant que chef du parti nazi dès les années 1925-1926 avec le renforcement de son ascendance sur le parti, consécutif à ses premiers succès médiatiques et électoraux dus paradoxalement à son échec lors du putsch de la brasserie en novembre 1923, à son procès et surtout suite à la publication de Mein Kampf .
On le désignait en général comme « le Führer ». Ses collaborateurs s'adressaient à lui en disant Mein Führer, c'est-à-dire « Mon guide, mon chef ». Un slogan de l'Allemagne nazie était Ein Volk, ein Reich, ein Führer, qui signifie « Un peuple, un empire, un chef ».
L'allemand Führer est l'équivalent de l'anglais leader. Il est encore souvent employé dans ce sens dans la vie politique allemande. A l'origine, le führer était le chef de file du groupe parlementaire du parti, le véritable directeur politique du parti, et celui qui, en cas de victoire électorale, était jugé comme étant le candidat naturel pour la direction du nouveau gouvernement. Ce n'est pas obligatoirement le président ou le secrétaire général du parti comme souvent en France, ces fonctions restant essentiellement administratives au sein du parti.
Hitler est élu Führer du NSDAP dès sa création en 1921 au congrès de Salzbourg, après la fusion de plusieurs partis d'inspiration proche (nationalistes, racistes et populistes), dont le parti ouvrier allemand (DAP) de 1919 dont il est déjà le dirigeant de la propagande et « l'homme fort ». Il n'en devient le président que quelques mois plus tard avec le renouvellement du comité directeur en se faisant attribuer à cette occasion les « pouvoirs dictatoriaux » pour la « direction administrative » du parti en sus de sa « direction politique », ce qui n'était pas spécialement dans la tradition allemande. Dans la pratique, cette direction administrative est confié à des « suppléants auprès de la présidence du parti » : Rudolf Hess, puis Martin Bormann.
En 1925, lors de la fondation légale du parti après l'interdiction consécutive au putsch de la brasserie, Hitler est réélu président du parti (les mandats sont de trois ans, le président est élu par le Congrès sur proposition du comité directeur) et Obertsführer (guide suprême) du NSDAP et de la SA. Il est aussi le führer de tout le mouvement national-socialiste, c'est-à-dire du parti dont il est déjà le président, des SA dont il est le commandant suprême, mais aussi de toutes les organisations rattachées au parti et autonomes administrativement (syndicats, mouvements de jeunes, des mères de familles et même des ligues féminines, etc.) Dans la pratique, il délègue à des lieutenants la direction de toutes ces organisations, se réservant la politique générale du mouvement.
[modifier] Après 1933
Après la liquidation des partis politiques concurrents, puis le vote de la loi instituant l'unité du Parti et de l'État, Hitler, déjà chancelier fédéral (Reichskanzler) et führer du parti devient de fait le führer de l'État et du peuple allemand.
En tant que chancelier, chef d'un cabinet de concentration nationale où les nazis seront toujours minoritaires, il se fait déléguer par le Reichstag des pouvoirs spéciaux renouvelables tous les quatre ans, et normalement à l'origine réservés au président du Reich par la constitution de 1919 qui restera toujours en vigeur, amendée dans le sens du national-socialisme, jusqu'en septembre 1945, date officielle de la dissolution du Reich par les autorités militaires alliées.
Il en profite aussi pour transformer le Reich en un état unitaire (les Länders perdent leur statut d'états fédérés ; le gouvernement central y est représenté par un gouverneur (Staathalter)), mais décentralisé (larges pouvoirs des ministres-présidents). (Voir Gleichschaltung). Les gauleiters ne sont que les directeurs locaux du parti, chargés de surveiller l'administration du Länder, mais en pratique, ils sont toujours, soit le staathalter, soit le ministre-président local.
À la mort d'Hindenburg, Hitler assure les fonctions de chef de l'État après autorisation du Conseil des ministres, avec le « modeste » titre de Führer du Reich en détournant un article de la constitution de Weimar qui confie l'interim présidentiel au chancelier après avoir refusé de se faire élire président du Reich « par déférence » envers le vieux maréchal Hindenburg.
Toutes ces mesures constitutionnelles sont avalisées par le Reichstag, puis par référendum conformément d'ailleurs à la constitution. C'est le Führerstaat, système où Hitler concentre sur sa personne les fonctions toujours distinctes en théorie de chef du gouvernement, de l'État, du parti unique et de l'armée. Il obtient même, à ce titre, l'autorisation que les militaires soient obligés de lui prêter un serment personnel à la manière des empereurs romains dont il s'est d'ailleurs ouvertement inspiré. Il était dans sa jeunesse un grand lecteur de l'historien Theodor Mommsen.
En pratique cependant, il délègue ses pouvoirs dictatoriaux « souverains » (car par délégation du peuple et de ses représentants : double suffrage (direct et indirect) à des « commissaires » dans le cadre d'un département administratif, géographique ou d'une mission déterminée: c'est le Führerprinzip, système qui lui a été inspiré par son expérience militaire et la lecture du traité du constitutionnaliste Carl Schmitt sur la dictature (1922).
Les fonctions protocolaires et honorifiques du chef de l'État sont souvent dévolues à Hermann Göring, deuxième personnage de l'État en tant que président du Reichstag (et donc vice-président de la République) et à sa femme Emma, « Première Dame du Reich », Hitler n'étant pas marié, et celles du chancelier à Joseph Goebbels, vice-chancelier à partir de 1934 et à son épouse Madgalena.
Dictateur habile, Hitler s'arrange toujours pour qu'aucun de ses lieutenants ne soit en mesure de le supplanter sans s'associer avec d'autres chefs importants du parti, des SS et de l'armée, et il entretient entre ceux-ci les haines, rivalités, surveillances et délations réciproques.
Enfin, il prend personnellement le portefeuille de la guerre en 1938, et obtient le pouvoir de se constituer une armée personnelle internationale en 1939 (la Waffen SS) à l'intérieur même de la Wehrmacht (10% des effectifs de celle-ci en 1944).
Dès 1939, il abandonne le titre de chancelier (mais non les fonctions) et en 1941, avec le renouvellement quadriennal de ses pouvoirs, il se fait attribuer par le Reichstag les fonctions de « juge suprême » avec le droit de vie ou de mort sur les citoyens du Reich et la possibilité de légiférer par ordonnances secrètes (c'est-à-dire non promulguées, et donc non publiées). Il a ainsi désormais les mains totalement libres juridiquement pour éliminer secrètement et massivement ses adversaires politiques, raciaux ou autres.
Juste avant son suicide, le 30 avril 1945, Hitler transfère ses pouvoirs présidentiels à l'amiral Karl Dönitz. Le maréchal du Reich Hermann Göring et son rival, le ministre de l'Intérieur, le général Heinrich Himmler, Reichsführer des SS, sont destitués, exclus du parti et condamnés à mort sur ses ordres pour « haute trahison ». Ses pouvoirs de chancelier sont transmis au vice-chancelier Goebbels et la présidence du parti à Martin Bormann, jusqu'ici chef de la Chancellerie du parti (fonction issue en 1933 de la fusion de la vice-présidence, du secrétariat général et de la trésorerie de cette organisation).
Après le suicide de Goebbels et la fuite de Bormann qui lui ont transféré également leurs pouvoirs respectifs, Dönitz prend le titre de président du Reich par interim, nomme un nouveau chancelier par interim, et dissout le NSDAP qui n'a plus de raison d'être du fait de l'échec de sa mission historique (la revanche de l'Allemagne sur les pays de l'Entente de 1914-1918).
[modifier] Aujourd'hui
Le mot Führer a aujourd'hui une connotation négative en allemand et on évite de l'utiliser tel quel. Pour « guide », on dira plutôt Anführer qui signifie la même chose.
[modifier] Dérivés
- Le surnom de « Duce du Fascisme » qu'utilisaient les partisans de Benito Mussolini, président du Parti national fasciste, en est un équivalent en italien.
- Le titre de « Caudillo » en espagnol a une consonance nettement plus militaire et même religieuse.
- Le président mexicain Plutarco Elías Calles était qualifié de « Jefe Maximo » durant sa dictature de fait, le « maximat ».
- L'argentin Juan Peron préférait le surnom plus fasciste de « conductor », repris par...
- les dictateurs roumains, le fasciste Ion Antonescu, et le communiste Nicolae Ceauşescu sous la forme locale « conducator ».
- Mao Zedong était également volontiers qualifié de « Grand Timonier »,
- Staline de « dirigeant suprême »
- Fidel Castro est appelé « Lider Maximo ».