Bloody Sunday (1972)
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L'expression Bloody Sunday désigne les événements du dimanche 30 janvier 1972 à Londonderry/Derry en Irlande du Nord, où 13 manifestants pacifiques furent tués par des tirs de l'armée britannique.
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[modifier] Contexte
Le Bloody Sunday survient lors d’une des marches organisée par l’Association des Droits Civiques d’Irlande du Nord (Northern Ireland Civil Rights Association - NICRA). Ce mouvement, fondé en novembre 1966, regroupe les divers comités et associations demandant l’égalité pour tous les citoyens nord-irlandais et la fin des pratiques discriminatoires des pouvoirs locaux envers les catholiques au niveau politique, social et économique. Ainsi, les mots d’ordre de la NICRA sont d’abord l’annulation de la loi des Pouvoirs Spéciaux de 1921, la réforme de la police majoritairement protestante, la fin des discriminations pour le logement et l’emploi, et l’abolition du gerrymandering et du vote censitaire qui assurent aux protestants une sur-représentation au Parlement provincial du Stormont. La NICRA est composée aussi bien de syndicalistes, que de communistes, de nationalistes, de républicains et d’étudiants activistes. Se voulant non confessionnelle et non politique, la NICRA compte dans ses rangs des protestants libéraux, dont Ivan Cooper, mais recrute essentiellement dans la classe moyenne catholique. S’inspirant du mouvement des droits civiques américains, le principal slogan de la NICRA est « un homme, une voix » et son hymne « We shall overcome… », son répertoire d’action comprend notamment la non-violence, les marches, et le sit-in.
C’est pour protester contre l’internement administratif, introduit par le Parlement nord-irlandais le 9 août 1971, que la NICRA décide d’organiser une manifestation pacifique à Londonderry/Derry le 30 janvier 1972. Plusieurs centaines de catholiques ont été ainsi emprisonnés sans procès dans des camps d’internement de l’armée britannique.
[modifier] Historique
La NICRA, mené par Ivan Cooper, est déterminée à éviter toute violence entre les différents protagonistes. Malgré son dialogue avec les autorités unionistes, les paramilitaires de l'IRA et ses tentatives de négociation avec les forces de l'ordre britanniques, la manifestation dégénère et 28 manifestants sont blessés par balles dont 13 décéderont sur place. Une quatorzième personne mourra plus tard de ses blessures. Deux versions coexistent :
- selon les britanniques, les parachutistes auraient essuyé des tirs de la part de l'IRA auxquels ils auraient riposté,
- selon les manifestants, l'armée britannique a délibérément tiré sur une foule désarmée.
Une enquête menée rapidement par une commission présidée par Lord Widgery blanchit l'armée britannique en concluant qu'elle répondait aux tirs de l'IRA.
Cependant, aucune arme n'a été retrouvée sur les lieux pas plus que de traces d'explosif sur les victimes. De plus toutes les victimes se comptent parmi les manifestants ; aucun soldat n'a été tué ou blessé ce jour-là (ce qui est surprenant si les militaires ont été la cible de tirs et se sont contentés de riposter). Aussi un doute a longtemps pesé sur cette version des faits. Il faut ajouter à cela qu'un parachutiste britannique ayant déserté trois mois auparavant a révélé bien après les faits que lors d'une séance d'instruction on leur avait explicitement indiqué que lors des prochaines manifestations (quelque soit leur nature), "il faudrait faire des morts". Un autre élément accrédite la préméditation des tirs sur la foule: une communication interceptée par un policier irlandais présent au QG des paras rapporte que les soldats auraient reçu l'ordre d'utiliser des munititons de petit calibre (différentes des munitions habituellement en dotation dans ces unités) dans le but de faire un maximum de dégats. On a en effet retrouvé des balles de petit calibre dans les cadavres des manifestants abattus.
Cette journée, désormais inscrite dans l'Histoire sous le nom de Bloody Sunday, marque une nouvelle étape de ce qui allait devenir la guerre civile irlandaise. Les rangs de l'IRA se gonflèrent après ce massacre, entrainant un engrenage de mort entre attentats et représailles entre les camps en présence, comme lors du Bloody Friday à Belfast. L'armée britannique perdit de sa crédibilité dans l'esprit des républicains qui ne virent plus en elle une force d'interposition mais une force de répression au même titre que la Royal Ulster Constabulary (RUC).
La polémique dura longtemps entre les partisans des deux versions qui campaient sur leurs positions respectives.
Le 16 mai 1997, Channel 4 diffuse un documentaire des journalistes Lena Ferguson et Alex Thomson dans lequel quatre soldats révèlent anonymement que les parachutistes ont tiré l'arme à la hanche dans la foule, contredisant la thèse officielle qui prétendait que les tirs avaient visé des cibles précises et hostiles.
Du fait des critiques adressées à la version britannique de cet évènement, le premier ministre Tony Blair fit ouvrir, le 29 janvier 1998, veille de la commémoration annuelle de la tragédie, une nouvelle enquête sur ces évènements. L'enquête a été confiée au juge Mark Saville, assisté de magistrats canadien et australien. Entre 1998 et novembre 2004, 921 témoins furent audités et 1555 témoignages écrits furent examinés. Plusieurs soldats avoueront avoir menti lors de leurs dépositions précédentes et reconnaîtront que les victimes étaient désarmées. Le rapport final est attendu en 2006.
[modifier] Une source d'inspiration
Il est à noter que la chanson, Sunday Bloody Sunday, de U2, ainsi qu'une version de John Lennon s'inspirent de ces événements.
Le film Bloody Sunday de 2002, réalisé par Paul Greengrass relate également ces événements.